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En Allemagne, le centre de stockage de déchets radioactifs prend l’eau

Publié initialement dans la revue Sortir du nucléaire n°103 le 1er octobre 2024, mis en ligne le 17 juin 2025



En mai 2024, l’ancienne mine de sel d’Asse, utilisée depuis 1967 comme centre de stockage de déchets radioactifs, a fait les gros titres en Allemagne. De grandes quantités d’eau salée se sont frayées des chemins non prévus dans les galeries et chambres de la mine, à plusieurs centaines de mètres sous la surface. Il n’est pas exclu qu’ils atteignent les 125 000 fûts de déchets nucléaires stockés là-bas, entraînant un risque de corrosion.



Asse II, du sel à la radioactivité

Lorsque les premières centrales nucléaires ont été mises en service en Allemagne dans les années 1960, l’industrie nucléaire et les politiques ont cherché une solution rapide et peu coûteuse au problème croissant des déchets nucléaires. L’ancienne mine de sel Asse leur semblait idéale pour cela : les cavités déjà existantes dans le sel pouvaient « être utilisées sans crainte pour le stockage de déchets radioactifs », écrivaient les autorités. [1]

Le stockage a débuté en 1967. Au départ, seuls les fûts contenant des déchets faiblement radioactifs étaient autorisés. Officiellement, le site portait le nom d’« entrepôt de stockage final expérimental ». Mais la partie « expérimentale » se concentrait principalement sur la manière d’enfouir de plus grandes quantités de déchets à moindre coût ! En a résulté la « technique de déversement » par laquelle les fûts de déchets nucléaires n’étaient plus empilés, mais simplement déversés sur une pente, augmentant leur risque d’être endommagés.

En 1973, l’administration a officiellement autorisé la réception de déchets moyennement radioactifs. Mais, surprise, trois ans plus tard un amendement à la loi exigea une procédure d’autorisation en bonne et due forme pour le stockage des déchets nucléaires. Il était clair pour tous les acteurs que « Asse II », avec ses points faibles, ne pourrait jamais obtenir une telle autorisation. Jusqu’à l’arrêt du stockage fin 1978, l’industrie nucléaire a fortement augmenté les quantités livrées pour se débarrasser d’autant de déchets nucléaires que possible dans la mine.

Quand les galeries s’effritent et que l’eau s’infiltre

Les risques pour la sécurité du site sont rapidement ressortis. Des galeries se sont effondrées, des puits sont devenus instables. Ce que l’on appelle le « fluage » du sel provoque aujourd’hui encore des déplacements imprévisibles dans le sous-sol. Dès le début du projet, les critiques ont mis en garde contre les risques d’infiltrations d’eau dans la mine. Un scénario « hautement improbable » selon les autorités, une pénétration de substances radioactives dans la biosphère étant prétendument exclue. [2] Pourtant, dès 1979, les premières infiltrations d’eau se sont produites. L’eau souterraine afflue en permanence : 12 m³ sont pompés chaque jour. [3]

Si l’eau salée atteint les déchets nucléaires, elle pourrait corroder les fûts en quelques décennies. Les particules radioactives seraient alors poussées jusqu’au dessus du dôme de sel, dans les couches d’eau souterraine qui s’étendent sur des centaines de kilomètres. Les déchets radioactifs « éliminés » à bas prix menacent ainsi de contaminer toute une région.

Le Bundestag a donc décidé en 2013 que tous les déchets nucléaires d’« Asse II » devaient être récupérés. Une opération de plusieurs milliards d’euros à la charge des contribuables. Reste à savoir si l’opération sera menée à bien. L’entreprise publique chargée de l’opération n’a pas encore trouvé de solution. Actuellement, elle prévoit la récupération des déchets nucléaires pour les années 2060.


Notes

[1Asse, Gorleben und andere Katastrophen, .ausgestrahlt, 2011, p.11

[2Salzbergwerk Asse, Forschung für die Endlagerung, Gesellschaft für Strahlenforschung / Institut für Tiefenlagerung, H.-J. Haury, 1985 cité d’après Abschlussbericht Parlamentarischer Untersuchungsausschuss zum Atommülllager Asse II, p.18, note 36

[3La polémique sur le stockage des déchets nucléaires rebondit en Allemagne, Le Monde, 22/09/2008

Asse II, du sel à la radioactivité

Lorsque les premières centrales nucléaires ont été mises en service en Allemagne dans les années 1960, l’industrie nucléaire et les politiques ont cherché une solution rapide et peu coûteuse au problème croissant des déchets nucléaires. L’ancienne mine de sel Asse leur semblait idéale pour cela : les cavités déjà existantes dans le sel pouvaient « être utilisées sans crainte pour le stockage de déchets radioactifs », écrivaient les autorités. [1]

Le stockage a débuté en 1967. Au départ, seuls les fûts contenant des déchets faiblement radioactifs étaient autorisés. Officiellement, le site portait le nom d’« entrepôt de stockage final expérimental ». Mais la partie « expérimentale » se concentrait principalement sur la manière d’enfouir de plus grandes quantités de déchets à moindre coût ! En a résulté la « technique de déversement » par laquelle les fûts de déchets nucléaires n’étaient plus empilés, mais simplement déversés sur une pente, augmentant leur risque d’être endommagés.

En 1973, l’administration a officiellement autorisé la réception de déchets moyennement radioactifs. Mais, surprise, trois ans plus tard un amendement à la loi exigea une procédure d’autorisation en bonne et due forme pour le stockage des déchets nucléaires. Il était clair pour tous les acteurs que « Asse II », avec ses points faibles, ne pourrait jamais obtenir une telle autorisation. Jusqu’à l’arrêt du stockage fin 1978, l’industrie nucléaire a fortement augmenté les quantités livrées pour se débarrasser d’autant de déchets nucléaires que possible dans la mine.

Quand les galeries s’effritent et que l’eau s’infiltre

Les risques pour la sécurité du site sont rapidement ressortis. Des galeries se sont effondrées, des puits sont devenus instables. Ce que l’on appelle le « fluage » du sel provoque aujourd’hui encore des déplacements imprévisibles dans le sous-sol. Dès le début du projet, les critiques ont mis en garde contre les risques d’infiltrations d’eau dans la mine. Un scénario « hautement improbable » selon les autorités, une pénétration de substances radioactives dans la biosphère étant prétendument exclue. [2] Pourtant, dès 1979, les premières infiltrations d’eau se sont produites. L’eau souterraine afflue en permanence : 12 m³ sont pompés chaque jour. [3]

Si l’eau salée atteint les déchets nucléaires, elle pourrait corroder les fûts en quelques décennies. Les particules radioactives seraient alors poussées jusqu’au dessus du dôme de sel, dans les couches d’eau souterraine qui s’étendent sur des centaines de kilomètres. Les déchets radioactifs « éliminés » à bas prix menacent ainsi de contaminer toute une région.

Le Bundestag a donc décidé en 2013 que tous les déchets nucléaires d’« Asse II » devaient être récupérés. Une opération de plusieurs milliards d’euros à la charge des contribuables. Reste à savoir si l’opération sera menée à bien. L’entreprise publique chargée de l’opération n’a pas encore trouvé de solution. Actuellement, elle prévoit la récupération des déchets nucléaires pour les années 2060.



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