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Sortir du nucléaire n°89

Déconstruire le discours du promoteur médiatique du nucléaire

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°89 -

 Lobby nucléaire


Beaucoup de militant·es nous demandent régulièrement de répondre pied à pied à Jean-Marc Jancovici, qui défend mordicus le nucléaire comme LA solution pour sauver la planète. Démonter l’ensemble des arguments de fond, nous le faisons dans cette revue à chaque numéro. On s’attachera donc à vous montrer sur quels ressorts d’argumentation se base Jancovici pour construire son argumentaire.



Le “pied dans la porte“

Jancovici parle bien, tout est clair et carré, son raisonnement paraît logique et scientifique. Il sait trouver le bon mot. Face au désastre écologique, il nous parle de sobriété énergétique, ses conclusions sur la décroissance ressemblent fortement à celles que nous pourrions faire dans cette revue ou à celles faites par le mouvement écologiste dans son ensemble... Mais par ce procédé, Jancovici emploie la technique commerciale du “pied dans la porte“. Comment, subjugués par ces bons mots, et étourdis par son analyse de l’effondrement à venir, faite de chiffres et de graphiques en tous genres, ne pas adhérer à ce qui va suivre ? À savoir la réponse globale et rationnelle qu’il fait en présentant le nucléaire, toujours sous son plus beau jour, comme la conséquence logique de ce qui précède. Pour lui, l’énergie nucléaire est sans rivale, écologique, bon marché, facile à mettre en œuvre. Pas de nuances, pas de demi-mesures comme le ferai n’importe quel scientifique. Alors que le propre du scientifique est de douter, jamais l’on ne verra ni Jancovici ni ses partisans douter de ces affirmations. Parlons de ses partisans justement. Dans ses démonstrations pour démonter soigneusement les énergies renouvelables (EnR), il utilise nombre de chiffres et d’exemples très techniques pour mieux flatter l’égo de ses auditeurs. Pour les médias, Jancovici est donc un très bon client avec ses formules à l’emporte-pièce et le soutien inconditionnel du grand nombre de ses “followers“, qui ne savent plus que répondre par l’argument “Jancovici l’a dit“. En fait, jamais Jancovici ne parle des problèmes concrets que pose l’industrie nucléaire. Il vous fera un cours de physique nucléaire mais la physique, à elle seule, ne permet pas de décider le type de société vers laquelle aller : ces choix nécessitent des débats et des prises de décisions de nature politique.

Le décroissant pro-business (chercher l’erreur)

La presse économique lui ouvre grand ses portes : une chronique régulière dans les Échos, des invitations de la part du Figaro qui relaye les thèses climato-négationnistes, etc. Par ailleurs, le think tank The Shift Project, dont il est le président, “oeuvre en faveur d’une économie libérée de la contrainte carbone“. Son objectif économique ne pourrait être plus clair. Prenons en pour preuve sa gouvernance dont la plupart des dirigeant·es et collaborateurs·trices viennent des hautes écoles (ingénieurs, polytechniciens, énarques, HEC...), de l’industrie, du milieu bancaire. Certains sont d’anciens hauts-fonctionnaires ayant travaillé dans des ministères. On trouve dans le conseil d’administration des représentants d’EDF, de Bouygues, de Vinci [1] et comme financeurs EDF, Bouygues, Vinci, BNP Paribas, Enedis, Vicat [2]. Difficile de faire pire dans le genre juge et partie !

Du point de vue économique Jancovici tente de prouver que les énergies renouvelables sont des ennemies du nucléaire. Pour lui chaque euro qui y est investi ne va pas dans l’énergie atomique. Mais l’inverse est tout aussi vrai n’est-ce pas ? Imposer comme solution le nucléaire à grande échelle, a pour conséquence de freiner les investissements dans la recherche d’énergies alternatives et dans leur application… CQFD.

Une négation grossière des risques

"À Tchernobyl il y a eu une cinquantaine de morts instantanés et quelques centaines de morts différés dus au cancer de la thyroïde", affirmait avec aplomb l’"expert" en novembre 2019. Les décès prématurés découleraient en fait du stress de l’évacuation. Ce ne serait donc pas le nucléaire qui tue, mais ceux qui prétendent qu’il est dangereux !

Mieux vaut se garder d’être péremptoire à ce sujet. Les chiffres jancoviciens sont en tout cas inférieurs même aux estimations officielles de 2005 de l’OMS (4 000 morts attendus liés à l’irradiation), elles-mêmes contestées. En 2006, le Centre International de Recherche sur le Cancer tablait sur 16 000 décès prévus pour les seuls cancers ; le rapport TORCH commandé par le Parlement Européen sur 30 000 à 60 000... Les travaux d’Alexei Yablokov et Vassili Nesterenko prévoient, eux, 985 000 décès en excès. Selon Yablokov, sur 830 000 liquidateurs – majoritairement des hommes jeunes – 112 000 à 125 000 sont décédés avant 2005. Peut-on les balayer d’un revers de main ?

Le nucléaire sans impacts sur la santé ?

Interrogé sur les risques sanitaires liés au nucléaire, Jancovici botte en touche, le comparant au charbon. Certes, le bilan du charbon est très mauvais... mais là n’est pas le sujet. Les nuisances liées à la pollution nucléaire et aux mines d’uranium ne peuvent être tenues pour négligeables. Le choix n’est pas entre nucléaire ou charbon, mais entre énergies du passé (charbon, nucléaire) et renouvelables, sachant que le solaire et l’éolien ont un bilan indiscutablement meilleur.

Deuxième parade : invoquer l’UNSCEAR [3] (comité scientifique de l’ONU sur les effets des rayonnements atomiques). "Que dit cet organisme ? Tout simplement que le nucléaire civil, accidents compris, engendre des dangers qui restent minimes" [4]. Selon l’UNSCEAR, la catastrophe de Fukushima n’a pas entraîné de conséquences sanitaires et la multiplication par 20 des cancers de la thyroïde chez les enfants résulte d’un surdiagnostic.

Mais le médecin qui a opéré la plupart des enfants concernés conteste lui-même cette hypothèse. On peut légitimement s’interroger sur l’indépendance de cet organisme lié à l’AIEA et sur les enjeux politiques qui sous-tendent ses travaux.

Là encore, Jancovici martèle son argument-choc : en tant qu’agence de l’ONU, l’UNSCEAR fonctionnerait exactement comme le GIEC (Groupe Intergouvernemental d’Experts sur le Climat). Critiquer l’un reviendrait à douter de l’autre : voilà les antinucléaires catalogués climato-sceptiques et anti-science ! Non seulement l’argument est tordu, mais il a ses limites. Les rapports du GIEC font l’objet d’un processus de relecture très ouvert par des milliers d’experts issus des ONG et du monde universitaire, et les chefs de chapitre sont tenus de répondre à chacune de leurs remarques. On ne peut pas en dire autant de l’UNSCEAR...

Une vision des évolutions énergétiques déconnectée de la réalité

Pour Jancovici, la réduction drastique des énergies fossiles imposerait un recours massif au nucléaire comme "amortisseur" de cette décroissance énergétique. Dans un texte daté de 2014, toujours en ligne sur son site, l’"expert" entendait démontrer par A+B que la croissance des renouvelables n’étant qu’un mirage qui s’essoufflerait vite, miser sur le nucléaire était la seule planche de salut. "Une multiplication par 7 de la production revient à disposer, d’ici 40 ans, d’un parc de 3 000 réacteurs de 1000 MW en service [...] ce n’est pas complètement ridicule en termes purement économiques [...]. Et si nous voulons "décarboniser" complètement l’économie avec essentiellement du nucléaire parce que les petits calculs ci-dessus montrent que ça ne passera pas facilement du côté des renouvelables à ces échelles de temps, c’est du double au quadruple qu’il faut avoir" [5]. Quid de la disponibilité du minerai ? Des risques et des déchets produits ? Mais surtout, quid du réalisme de ces perspectives ?

Ce postulat reposait sur des données de 2010 déjà obsolètes en 2014 : en 2011, puis 2013, les coûts du MWh éolien, puis solaire, avaient plongé sous celui du nucléaire [6]. Surtout, les faits ont contredit l’essoufflement promis des renouvelables et l’essor du nucléaire. De 2010 à 2019, la production nucléaire a crû de 1%, contre... 312% pour l’éolien et 2029% pour le solaire [7] ! En 2020, la capacité renouvelable installée a connu une croissance annuelle de 45 % qui, selon l’AIE (qui a révisé ses prédictions à la hausse de 25 %), devrait devenir la nouvelle norme [8]. Pourtant, le propos de Jancovici n’a guère évolué depuis 2014, celui-ci présentant toujours comme "la solution du pauvre" [9] un nucléaire boudé par les investisseurs pour ses coûts prohibitifs. Bien sûr, pour lui, le 100 % renouvelable est une ineptie, ces technologies étant "intermittentes". De nombreux travaux démontrent pourtant la faisabilité de cet objectif. Outre l’étude du CIRED publiée en 2020 sur la possibilité du 100 % renouvelable même par des conditions météorologiques variables et pour un coût égal ou inférieur au mix actuel, en avril 2021, l’université de Stanford a publié une compilation de 56 articles scientifiques parus dans des revues renommées attestant la faisabilité de cette option [10]. Enfin, décrier l’"intermittence" des énergies renouvelables (largement prévisible grâce à la météo), c’est oublier les défaillances du nucléaire qui, elles, ne préviennent pas forcément. En 2016, jusqu’à 21 réacteurs ont été arrêtés simultanément, entre la maintenance ordinaire, les incidents et la nécessité d’expertiser des pièces comportant des défauts !

Le nucléaire passage obligé pour le GIEC ?

En 2019, notre "expert" affirmait aux étudiant·es de l’École des Mines : "Dans le rapport [du Groupe Intergouvermental des Experts sur le Climat], tous les scénarios d’émissions qui permettent de rester sous la barre des 1,5°C sont des scénarios qui voient un nucléaire multiplié par un facteur 2 à 6 d’ici à 2100" [11]. "Tous", vraiment ? Sur 89 scénarios étudiés par le GIEC pour limiter le réchauffement global à 1,5°C, une moitié environ table sur une multiplication par deux ou plus du nucléaire (au vu des projets chinois), mais les autres le voient augmenter bien plus modérément, stagner... et certains proposent même une diminution, voire sa disparition d’ici à la fin du siècle.

Fort de son crédit sur le diagnostic du risque climatique, Jancovici s’adonne à l’approximation et à l’exagération dès qu’il évoque les solutions. Jusqu’à quand ses admirateurs tomberont-ils dans le panneau ?

Anne-Lise Devaux et Charlotte Mijeon

Le “pied dans la porte“

Jancovici parle bien, tout est clair et carré, son raisonnement paraît logique et scientifique. Il sait trouver le bon mot. Face au désastre écologique, il nous parle de sobriété énergétique, ses conclusions sur la décroissance ressemblent fortement à celles que nous pourrions faire dans cette revue ou à celles faites par le mouvement écologiste dans son ensemble... Mais par ce procédé, Jancovici emploie la technique commerciale du “pied dans la porte“. Comment, subjugués par ces bons mots, et étourdis par son analyse de l’effondrement à venir, faite de chiffres et de graphiques en tous genres, ne pas adhérer à ce qui va suivre ? À savoir la réponse globale et rationnelle qu’il fait en présentant le nucléaire, toujours sous son plus beau jour, comme la conséquence logique de ce qui précède. Pour lui, l’énergie nucléaire est sans rivale, écologique, bon marché, facile à mettre en œuvre. Pas de nuances, pas de demi-mesures comme le ferai n’importe quel scientifique. Alors que le propre du scientifique est de douter, jamais l’on ne verra ni Jancovici ni ses partisans douter de ces affirmations. Parlons de ses partisans justement. Dans ses démonstrations pour démonter soigneusement les énergies renouvelables (EnR), il utilise nombre de chiffres et d’exemples très techniques pour mieux flatter l’égo de ses auditeurs. Pour les médias, Jancovici est donc un très bon client avec ses formules à l’emporte-pièce et le soutien inconditionnel du grand nombre de ses “followers“, qui ne savent plus que répondre par l’argument “Jancovici l’a dit“. En fait, jamais Jancovici ne parle des problèmes concrets que pose l’industrie nucléaire. Il vous fera un cours de physique nucléaire mais la physique, à elle seule, ne permet pas de décider le type de société vers laquelle aller : ces choix nécessitent des débats et des prises de décisions de nature politique.

Le décroissant pro-business (chercher l’erreur)

La presse économique lui ouvre grand ses portes : une chronique régulière dans les Échos, des invitations de la part du Figaro qui relaye les thèses climato-négationnistes, etc. Par ailleurs, le think tank The Shift Project, dont il est le président, “oeuvre en faveur d’une économie libérée de la contrainte carbone“. Son objectif économique ne pourrait être plus clair. Prenons en pour preuve sa gouvernance dont la plupart des dirigeant·es et collaborateurs·trices viennent des hautes écoles (ingénieurs, polytechniciens, énarques, HEC...), de l’industrie, du milieu bancaire. Certains sont d’anciens hauts-fonctionnaires ayant travaillé dans des ministères. On trouve dans le conseil d’administration des représentants d’EDF, de Bouygues, de Vinci [1] et comme financeurs EDF, Bouygues, Vinci, BNP Paribas, Enedis, Vicat [2]. Difficile de faire pire dans le genre juge et partie !

Du point de vue économique Jancovici tente de prouver que les énergies renouvelables sont des ennemies du nucléaire. Pour lui chaque euro qui y est investi ne va pas dans l’énergie atomique. Mais l’inverse est tout aussi vrai n’est-ce pas ? Imposer comme solution le nucléaire à grande échelle, a pour conséquence de freiner les investissements dans la recherche d’énergies alternatives et dans leur application… CQFD.

Une négation grossière des risques

"À Tchernobyl il y a eu une cinquantaine de morts instantanés et quelques centaines de morts différés dus au cancer de la thyroïde", affirmait avec aplomb l’"expert" en novembre 2019. Les décès prématurés découleraient en fait du stress de l’évacuation. Ce ne serait donc pas le nucléaire qui tue, mais ceux qui prétendent qu’il est dangereux !

Mieux vaut se garder d’être péremptoire à ce sujet. Les chiffres jancoviciens sont en tout cas inférieurs même aux estimations officielles de 2005 de l’OMS (4 000 morts attendus liés à l’irradiation), elles-mêmes contestées. En 2006, le Centre International de Recherche sur le Cancer tablait sur 16 000 décès prévus pour les seuls cancers ; le rapport TORCH commandé par le Parlement Européen sur 30 000 à 60 000... Les travaux d’Alexei Yablokov et Vassili Nesterenko prévoient, eux, 985 000 décès en excès. Selon Yablokov, sur 830 000 liquidateurs – majoritairement des hommes jeunes – 112 000 à 125 000 sont décédés avant 2005. Peut-on les balayer d’un revers de main ?

Le nucléaire sans impacts sur la santé ?

Interrogé sur les risques sanitaires liés au nucléaire, Jancovici botte en touche, le comparant au charbon. Certes, le bilan du charbon est très mauvais... mais là n’est pas le sujet. Les nuisances liées à la pollution nucléaire et aux mines d’uranium ne peuvent être tenues pour négligeables. Le choix n’est pas entre nucléaire ou charbon, mais entre énergies du passé (charbon, nucléaire) et renouvelables, sachant que le solaire et l’éolien ont un bilan indiscutablement meilleur.

Deuxième parade : invoquer l’UNSCEAR [3] (comité scientifique de l’ONU sur les effets des rayonnements atomiques). "Que dit cet organisme ? Tout simplement que le nucléaire civil, accidents compris, engendre des dangers qui restent minimes" [4]. Selon l’UNSCEAR, la catastrophe de Fukushima n’a pas entraîné de conséquences sanitaires et la multiplication par 20 des cancers de la thyroïde chez les enfants résulte d’un surdiagnostic.

Mais le médecin qui a opéré la plupart des enfants concernés conteste lui-même cette hypothèse. On peut légitimement s’interroger sur l’indépendance de cet organisme lié à l’AIEA et sur les enjeux politiques qui sous-tendent ses travaux.

Là encore, Jancovici martèle son argument-choc : en tant qu’agence de l’ONU, l’UNSCEAR fonctionnerait exactement comme le GIEC (Groupe Intergouvernemental d’Experts sur le Climat). Critiquer l’un reviendrait à douter de l’autre : voilà les antinucléaires catalogués climato-sceptiques et anti-science ! Non seulement l’argument est tordu, mais il a ses limites. Les rapports du GIEC font l’objet d’un processus de relecture très ouvert par des milliers d’experts issus des ONG et du monde universitaire, et les chefs de chapitre sont tenus de répondre à chacune de leurs remarques. On ne peut pas en dire autant de l’UNSCEAR...

Une vision des évolutions énergétiques déconnectée de la réalité

Pour Jancovici, la réduction drastique des énergies fossiles imposerait un recours massif au nucléaire comme "amortisseur" de cette décroissance énergétique. Dans un texte daté de 2014, toujours en ligne sur son site, l’"expert" entendait démontrer par A+B que la croissance des renouvelables n’étant qu’un mirage qui s’essoufflerait vite, miser sur le nucléaire était la seule planche de salut. "Une multiplication par 7 de la production revient à disposer, d’ici 40 ans, d’un parc de 3 000 réacteurs de 1000 MW en service [...] ce n’est pas complètement ridicule en termes purement économiques [...]. Et si nous voulons "décarboniser" complètement l’économie avec essentiellement du nucléaire parce que les petits calculs ci-dessus montrent que ça ne passera pas facilement du côté des renouvelables à ces échelles de temps, c’est du double au quadruple qu’il faut avoir" [5]. Quid de la disponibilité du minerai ? Des risques et des déchets produits ? Mais surtout, quid du réalisme de ces perspectives ?

Ce postulat reposait sur des données de 2010 déjà obsolètes en 2014 : en 2011, puis 2013, les coûts du MWh éolien, puis solaire, avaient plongé sous celui du nucléaire [6]. Surtout, les faits ont contredit l’essoufflement promis des renouvelables et l’essor du nucléaire. De 2010 à 2019, la production nucléaire a crû de 1%, contre... 312% pour l’éolien et 2029% pour le solaire [7] ! En 2020, la capacité renouvelable installée a connu une croissance annuelle de 45 % qui, selon l’AIE (qui a révisé ses prédictions à la hausse de 25 %), devrait devenir la nouvelle norme [8]. Pourtant, le propos de Jancovici n’a guère évolué depuis 2014, celui-ci présentant toujours comme "la solution du pauvre" [9] un nucléaire boudé par les investisseurs pour ses coûts prohibitifs. Bien sûr, pour lui, le 100 % renouvelable est une ineptie, ces technologies étant "intermittentes". De nombreux travaux démontrent pourtant la faisabilité de cet objectif. Outre l’étude du CIRED publiée en 2020 sur la possibilité du 100 % renouvelable même par des conditions météorologiques variables et pour un coût égal ou inférieur au mix actuel, en avril 2021, l’université de Stanford a publié une compilation de 56 articles scientifiques parus dans des revues renommées attestant la faisabilité de cette option [10]. Enfin, décrier l’"intermittence" des énergies renouvelables (largement prévisible grâce à la météo), c’est oublier les défaillances du nucléaire qui, elles, ne préviennent pas forcément. En 2016, jusqu’à 21 réacteurs ont été arrêtés simultanément, entre la maintenance ordinaire, les incidents et la nécessité d’expertiser des pièces comportant des défauts !

Le nucléaire passage obligé pour le GIEC ?

En 2019, notre "expert" affirmait aux étudiant·es de l’École des Mines : "Dans le rapport [du Groupe Intergouvermental des Experts sur le Climat], tous les scénarios d’émissions qui permettent de rester sous la barre des 1,5°C sont des scénarios qui voient un nucléaire multiplié par un facteur 2 à 6 d’ici à 2100" [11]. "Tous", vraiment ? Sur 89 scénarios étudiés par le GIEC pour limiter le réchauffement global à 1,5°C, une moitié environ table sur une multiplication par deux ou plus du nucléaire (au vu des projets chinois), mais les autres le voient augmenter bien plus modérément, stagner... et certains proposent même une diminution, voire sa disparition d’ici à la fin du siècle.

Fort de son crédit sur le diagnostic du risque climatique, Jancovici s’adonne à l’approximation et à l’exagération dès qu’il évoque les solutions. Jusqu’à quand ses admirateurs tomberont-ils dans le panneau ?

Anne-Lise Devaux et Charlotte Mijeon



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