Compte rendu
Formidable tour de France pour sortir du nucléaire
4 000 km parcourus – Des dizaines de milliers de personnes rencontrées
Le tour de France pour sortir du nucléaire, qui a parcouru 23 départements pendant quatre semaines, du 24 avril au 23 mai 2004, a été une grande réussite. Le nombre de personnes rencontrées sur la route du Tour a été de plusieurs dizaines de milliers mais ce sont en réalité des millions de gens qui ont été sensibilisées grâce à l’important impact médiatique (TV, radios et journaux sur le plan national, régional et local). La caravane du tour a permis de relier différents sites nucléaire civils et militaires et également des sites de production d’énergies renouvelables. L’objectif a été atteint : informer et sensibiliser de façon originale la population sur les enjeux de la politique nucléaire française et montrer que d’autres choix énergétiques sont possibles.
Quelle formidable énergie !
Un grand merci à toute l’équipe permanente, d’une quarantaine de personnes, présente sur le tour et aux centaines de bénévoles qui ont permis que chaque étape se déroule dans les meilleures conditions possibles.
Un coup de chapeau à cette caravane internationale. Citons notamment :
- de nombreux militants du Réseau « Sortir du nucléaire »,
- la compagnie de théâtre "Brut de béton", qui a joué pratiquement tous les soirs la pièce "Tchernobyl now !", adaptée du remarquable ouvrage de Svetlana Alexievitch, "La supplication". Emotion totale. Ce spectacle a été une réussite à chaque étape. Certains soir, il a fallu refuser du monde !
- un camion-scène d’animation du collectif hollandais Theaterstraat (pour les prises de parole, musique, et concerts),
- un bus venu de Hollande (destiné à transporter 20 personnes à travers tout le pays), muni de panneaux solaires qui permettent de recharger tous les appareils (ordinateurs et téléphones portables et particulier) sans recours au nucléaire,
- une remarquable exposition itinérante de l’association suisse ADER sur les énergies renouvelables, la consommation et l’autonomie énergétique, avec une super-équipe de jeunes animateurs compétents et motivés,
- une cuisine collective mobile de Rampenplan, venue des Pays-Bas, qui a proposé tous les jours de succulents repas végétariens et biologiques à un large public,
- un collectif hollandais de vidéo indépendante « Trojan TV », qui a réalisé des films au fur et à mesure du tour (visibles sur leur site internet : https://www.antenna.nl/organicchaos/anti_nuclear/video.html),
- plusieurs autres volontaires, dont un sapeur pompier professionnel, ancien équipier d’une CMIR (Cellule Mobile d’Intervention Radiologique), un militant antinucléaire venu d’Inde, un ancien travailleur du CERN (Centre européen de recherche nucléaire), une journaliste finlandaise représentant l’opposition à la construction d’un EPR en Finlande, et bien d’autres personnes encore que nous remercions chaleureusement.
Cette démarche a été sans précédent en France, tant par son ampleur que par sa dimension culturelle et ses propositions d’alternatives.
Voici une rétrospective étape par étape :
Samedi 24 avril 2004
Manifestation devant la centrale nucléaire de Fessenheim (Alsace).
Environ 2500 personnes : quel début en fanfare ! Bravo aux Alsaciens,
mais aussi aux nombreux Allemands et Suisses présents. Temps :
soleil éclatant, ciel totalement bleu... Que rêver de mieux
?
Mémo : la centrale nucléaire de Fessenheim est la plus vieille
de France, elle est inadaptée au risque sismique important dans
la région, elle est sous la menace d’une rupture du canal voisin
en cas de séisme. C’est aussi la centrale qui a été
arrosée par EDF pendant la canicule de l’été 2003.
C’est rassurant, la technologie nucléaire !
Dimanche 25 avril 2004
Journée festive à Kaysersberg (Alsace). Première
sortie pour toutes les animations qui vont parcourir tout le Tour.Le gymnase
de Kaysersberg ne désemplit pas de toute la journée, qui
se termine en apothéose avec le théâtre. Entre-temps,
le maire de la ville et un de ses collègues voisins ont déployé
sur une tour une gigantesque banderole (150 m2) du Réseau "Sortir
du nucléaire" et on peut voir dans toute la vallée
"Le nucléaire tue l’avenir".

lundi 26 avril 2004, 18ème "anniversaire" de la catastrophe de
Tchernobyl
Le Tour de France arrive à Nancy, ville régulièrement
traversée par des transports ferroviaires de déchets nucléaires.
Animations en ville puis manifestation jusqu’à la préfecture
(place Stanislas). Dépôt d’une gerbe de fleurs, puis "die-in"
en hommage aux victimes de Tchernobyl. Au même moment, la même
scène se déroule un peu partout en France.
Mémo : 18 ans après, non seulement les
conséquences de Tchernobyl ne s’estompent pas, mais au contraire
la situation s’aggrave ! C’est hélas la triste vérité
: de nombreux enfants ont des maladies de vieillards (maladies cardiaques,
rhumatismes), d’autres sont malformés ; les Biélorusses
mangent des produits contaminés (en particulier au césium).
Le pire est encore à venir.
Mardi 27 avril 2004
Dépôt de gerbe devant le Conseil Général de
la Meuse, puis le Tour part pour Bure (Meuse), où il arrive devant
le chantier du site d’enfouissement des déchets nucléaires.
Puis départ vers le moulin de Gourgeon (Haute-Saône) où
l’association Adera démontre la réalité et la pertinence
des énergies renouvelables.
Mémo : l’enfouissement des déchets nucléaires est
un véritable crime contre les générations futures.
Tôt ou tard, dans quelques centaines d’années, la corrosion
ouvrira les fûts, la radioactivité sera libérée.
Elle contaminera les nappes phréatiques, trouvera son chemin vers
la surface. Mais c’est la seule façon de se "débarrasser"
au moindre coût de ces déchets (qui vont rester dangereux
pour des centaines de milliers d’années) et de continuer à
prétendre que le nucléaire est bon marché...
Mercredi 28 avril 2004
Etape de transition jusqu’à Dijon. Contrôle anti-dopage
négatif : aucun des participants du Tour ne se dope à l’uranium
ou au plutonium !
jeudi 29 avril et vendredi 30 avril 2004
Dijon et Valduc (Côte d’Or) - Accueil formidable à l’espace
autogéré des Tanneries (Dijon).
Le vendredi en journée, le Tour se rend devant Valduc, site stratégique
pour la fabrication des armes nucléaires françaises. Autant
le dire : l’horreur absolue. Un des responsables (si on peut dite) sort
du site pour discuter un peu : il prétend travailler... pour la
Paix.
Samedi 1er mai 2004
Le Tour arrive dans le Jura, à Lons-le-Saunier. Pas de site nucléaire
particulier mais... le danger nucléaire est immense partout en
France et même au-delà de nos frontières (qui n’arrêtent
pas la radioactivité, faut-il le rappeler ?) Défilé,
animations, repas, et une belle soirée avec près de 200
personnes pour la diffusion d’un film et la pièce "Tchernobyl
now".
Dimanche 2 mai 2004
Le Tour arrive à Valence, dans la Drôme, ville où
se trouve la Criirad, dont le laboratoire fait des analyses et expertises
indépendantes. Autant que le Réseau "Sortir du nucléaire",
la Criirad a besoin de votre adhésion pour continuer à faire
connaître en toute indépendance les réalités
de l’industrie nucléaire. Le soir, encore un triomphe pour "Tchernobyl
now", puis une conférence de Bruno Chareyron, ingénieur
de la Criirad, à propos de la mission qu’il a menée il y
a quelques semaines au Niger. Stupéfiant !
Mémo : comme on met de l’essence dans une voiture, il faut mettre
de l’uranium dans une centrale nucléaire pour qu’elle fonctionne.
Malgré des menaces et la confiscation de ses appareils de mesure,
la Criirad a pu démontrer l’an dernier que l’extraction de
l’uranium au Niger par la multinationale française Areva-Cogéma
se faisait dans des conditions scandaleuses pour les mineurs, les populations
et l’environnement.
Lundi 3 mai 2004 : à Pierrelatte (Drôme)
Entrée dans le "Triangle des Bermudes" du nucléaire
: Pierrelatte-Cadarache-Marcoule.
Le Tour arrive à la mi-journée à Pierrelatte, devant
la centrale nucléaire du Tricastin et l’usine Eurodif.. Repas,
musique, animations. Les militants locaux assemblent une "tour de
refroidissement" de trois mètres, en bois. Animations, concert
avec de formidables artistes locaux (et toujours l’excellent Achille).
"Tchernobyl now" puis débat en présence de notre
ami Yannick Rousselet, de Greenpeace, grand connaisseur de la filière
française du plutonium.

Mémo : Tricastin-Eurodif : l’absurdité nucléaire
!
Les quatre réacteurs de la centrale nucléaire du Tricastion
fonctionnent presque exclusivement pour alimenter l’usine voisine Eurodif,
qui prépare... le combustible nucléaire ! Cette production
est comptée dans les fameux 78% d’électricité française
d’origine nucléaire : quelle absurdité !
Mardi 4 mai 2004 : Cadarache (Bouches-du-Rhône)
Arrivé en fin de matinée devant l’entrée du site.
Barrage filtrant pour donner de l’information aux salariés qui
viennent travailler. Vers 13h, "die-in" : au son d’une sirène,
les manifestants se couchent sur les voies d’accès du site. Rapidement,
un gigantesque embouteillage se forme. Les gendarmes s’énervent...
pas nous ! Au bout d’une demi-heure, les véhicules disparaissent
comme par enchantement, dirigés vers une autre entrée. Peu
importe : il est temps pour nous de lever le camp et de nous rendre à
Forcalquier : animations, musique, puis une nouvelle représentation
de "Tchernobyl now" devant une salle archicomble : il a fallu
refuser du monde !


Mémo : Cadarache : Ce site nucléaire, situé
à Saint-Paul-lez-Durance (Bouches-du-Rhône), compte en tout
450 bâtiments sur 1600 hectares. Certaines installations ou entreposages
font froid dans le dos :
-
cinq tranchées en pleine terre, où sont stockés
depuis 30 ans des déchets dont certains sont contaminés
par du plutonium. Ils ont probablement contaminé, ou peuvent
encore le faire, la nappe aquifère située quelques mètres
en dessous.
-
le fameux Atelier de Plutonium de Cadarache : l’autorité
de sûreté nucléaire a vainement « exigé
» pendant 8 ans (de 1995 à 2003) la fermeture de ce très
dangereux atelier (inadapté au risque sismique) où sont
manipulées de grandes quantités de plutonium. En juillet
2003, cet atelier a enfin été officiellement fermé.
Or, des activités industrielles y sont toujours menées
et, pire, Areva va y traiter à partir d’août 2004 du
plutonium américain. Incroyable pour une installation... fermée
!
mercredi 5 mai 2004 : Marcoule (Gard)
Nous nous rendons devant le centre nucléaire de Marcoule. Comme
la veille à Cadarache, nous occupons les voies d’accès.
Le soir, à Nîmes, belle manifestation en ville et nouveau
succès de la compagnie Brut de Béton. Puis Gerd la finlandaise
et Kumar l’Indien offrent une dernière fois leurs témoignages
avant de regagner leurs pays respectifs. Courage, les amis, et sûrement
à bientôt !

Mémo : Marcoule. Créé en 1956, Marcoule
(Gard) est un immense site (140 ha en bordure du Rhône) exploité
par le CEA et la Cogéma. Les activités principales sont
la production de combustible nucléaire Mox et l’exploitation du
réacteur expérimental Phénix.
-
Le Mox est un combustible nucléaire contenant
du plutonium. Sur les 58 réacteurs nucléaires français,
20 sont habilités à en recevoir. Le transport du Mox
vers ces réacteurs se fait par camions, avec une protection
minimale (« pour ne pas attirer l’attention », d’après
les autorités). Un incident grave à Mélox ou
au cours d’un des innombrables transports pourrait causer la mort
de centaines ou même de milliers de personnes.
-
Phénix : la vie de ce réacteur de recherche
est ponctuée par des arrêts en raison de fuites et petits
feux de sodium, ainsi que de baisses anormales de réactivité
dans le cœur, que les chercheurs n’ont jamais réussi à
expliquer. Pourtant, le 5 juin 2003, l’Autorité de sûreté
nucléaire a autorisé le redémarrage de Phénix...
aux deux tiers de sa puissance nominale. Sera-ce suffisant pour éviter
un drame ? Phénix pourrait fonctionner ainsi, en dépit
du bon sens, jusqu’en 2008
jeudi 6 mai 2004 : parc éolien d’Avignonet
Le Tour ne se contente pas de dénoncer le nucléaire, il
fait la promotion des alternatives. Mais ce serait tellement mieux si
c’était le service public qui s’en chargeait !
Mémo : Novembre 2003 - Sondage de l’Institut CSA
:"92% des touristes interrogés sur 25 sites en pleine période
touristique considèrent l’utilisation des éoliennes comme
« une bonne chose ». Seulement 16% estiment qu’elles « dégradent
le paysage ». Est-il besoin d’en rajouter ? Notons encore que l’Allemagne
produit désormais l’équivalent de 5 réacteurs nucléaires
rien qu’avec les éoliennes.

Vendredi 7 mai : maisons autonomes de Bazens
Depuis des années, plusieurs militants de Stop-Golfech vivent
de façon quasi autonome sur le plan énergétique :
maisons bien isolées, panneaux solaires, petite éolienne...
Pendant la tempête de décembre 1999, ils étaient les
seuls à avoir de l’électricité chez eux, les lignes
EDF étant rompues.
Samedi 8 mai : Stop-Golfech !
C’est par un rassemblement d’environs 400 personnes, devant la centrale
nucléaire de Golfech, que débute cette journée. Valence
d’Agen : plus de 500 personnes pour un repas convivial, des débats,
des animations.
Mémo : la centrale nucléaire de Golfech a été
la première à se mettre dans l’illégalité
pendant la canicule de l’été 2003. Dès le mois de
juin, elle a rejeté dans la Garonne de l’eau plus chaude que les
limites maximales autorisées. Il faut dire que la "toile"
des lignes Très haute tension (THT) qui quadrille la France, n’est
pas homogène et certaines centrales, comme Golfech ou Tricastin,
constituent des "nœuds" qui ne doivent pas être arrêtés
sous peine de risque de black-out régional ou même national.
Une fois de plus, l’environnement est sacrifié au profit de la
raison d’Etat... nucléaire.
Dimanche 9 mai : Hiroshi-Barp !
Près de 500 personnes ce midi devant le Laser Mégajoule
du Barp (Gironde), en construction à 20 km de Bordeaux qui va devenir
aussi célèbre qu’Hiroshima, mais... en tant que "ville
bourreau". Le soir : apéro, débats, expositions puis
concert endiablé de la Compagnie Mohein !
Mémo : Couplé à de puissants ordinateurs,
ce Laser va permettre à l’armée française de simuler
les essais atomiques autrefois réalisés en Algérie
et en Polynésie. Pire, le Mégajoule va permettre la mise
au point de "mini-nukes", de "petites" bombes atomiques
destinées à servir réellement et non plus à
dissuader. La France a signé les traité d’interdiction des
essais nucléaires mais dit en substance aux autres pays : "Tout
le monde doit arrêter les essais, mais nous, nous continuons avec
la simulation". Bien entendu, c’est intolérable pour les autres
pays, qui continuent la course à la bombe... sans avoir besoin
d’un Mégajoule, eux ! Mais la France a bien 5 milliards d’euros
à gaspiller dans cet effroyable projet.
Le chantier du Laser Mégajoule : des grues
dans la forêt
Lundi 10 mai : train nucléaire, train d’enfer !
Cette journée de "repos" à Bordeaux permet au
"Tour de France" de dénoncer le passage dans les grandes
villes de trains transportant les déchets nucléaires. Une
centaine de personnes envahissent en fin d’après-midi la gare de
Bordeaux, la redécorent avec des autocollants "certifié
pro-nucléaire", "meurent" subitement au son d’une
sirène à la grande surprise des voyageurs et au désappointement
des cadres de la SNCF.

Occupation du hall de la gare de Bordeaux

La direction de la SNCF certifiée pro-nucléaire
Mémo : les déchets nucléaires issus
des centrales nucléaires sont transportés, à destination
de La Hague (Cotentin) à travers toute la France par camions et
surtout par train. Ces transports font peser un grave danger sur les populations
du fait du risque d’accident ou d’attentat. Parfois, ces "trains
nucléaires" traversent des grandes villes. Des militants ont
ainsi stoppé un de ces trains en plein Bordeaux, le 29 septembre
dernier. La police est intervenue royalement... 25 minutes plus tard.
Des individus mal intentionnés auraient eu tout le temps de dynamiter
le wagon qui contenait de l’uranium et du plutonium.
Mardi 11 mai : la Mort à la centrale nucléaire du Blayais
!
Vers midi, pique-nique devant la centrale. Distribution de documents
"Pour un vrai service public de l’électricité sans
nucléaire" aux salariés. Un militant, revêtu
du costume de la Mort, escalade soudain la grande stèle EDF placée
à l’entrée de la centrale. Un gendarme tente vainement de
l’arrêter, prétendant que « c’est dangereux
», alors qu’il se trouve aux pieds de quatre réacteurs
nucléaires !

La Mort en ballade au Blayais

La gendarmerie tente en vain d’intervenir...
Mémo : très près de Tcherno... Blaye !
La nuit du 27 au 28 décembre 1999, au cours de la tempête qui
a ravagé la France, cent mille mètres cubes d’eau de la Gironde
sont entrés sans autorisation dans la centrale nucléaire du
Blayais, qui a alors frôlé le désastre. Le 5 janvier,
en dépit des manœuvres d’EDF, le quotidien Sud-Ouest titre "Très
près de l’accident majeur" Quelques semaines plus tard, une
manifestation de plus de 2000 personnes, pacifique, familiale et musicale,
est accueillie par des coups de matraques et des gaz lacrymogènes.
Le pouvoir nucléaire n’aime pas les citoyens.
Mercredi
12 mai : Saintes
Grâce à l’action opiniâtre de l’ACDN (Action des citoyens
pour le désarmement nucléaire), Saintes est la première
ville à avoir signé en faveur du désarmement nucléaire.
La nouvelle maire, UMP, a eu le courage notable de ne pas revenir sur
la signature de son prédécesseur... Un fois de plus, la
pièce "Tchernobyl now" est un succès.
Jeudi 13 mai : Civaux et Poitiers
Encore une étape rondement menée, le quotidien local «
La Nouvelle République » concluant admiratif : « Le
Réseau Sortir du nucléaire est fichtrement bien organisé
». Il est vrai que c’est déjà le 20ème
jour du Tour et que tout le monde est parfaitement rodé.
Mémo : Grave incident à Civaux le 18 mai
1998
Peu de gens le savent, mais la plupart des réacteurs nucléaires
« français » sont en fait de technologie américaine.
A la fin des années 90, l’industrie nucléaire française
construit enfin (si on peut dire) elle-même quatre réacteurs
: deux à Chooz (Ardennes) et deux à Civaux (Vienne), dont
le premier entre en fonction en novembre 1997. Le 18 mai 1998, après
six petits mois, une très grave incident se produit : une fuite
d’eau d’un débit estimé à 30 m3/h sur le circuit
de refroidissement à l’arrêt du réacteur (RRA). Heureusement,
un autre système fonctionne correctement et fait l’appoint
en eau, le temps d’arrêter le pauvre réacteur franchouillard.
Ce véritable brouillon de l’EPR a démontré
sa vulnérabilité.
Vendredi 14 mai : Le Carnet et St-Nicolas-du-Redon
Une formidable étape ! D’abord un passage à la mi-journée
au Carnet (Loire-Atlantique), où 25 000 personnes et une chaîne
humaine de 36 km organisée le 1er juin 1997 ont réussi à
faire annuler la construction d’une centrale nucléaire.
La région étant toujours à la pointe de la mobilisation,
ce sont deux mille personnes qui se sont venues pour cette étape
du Tour de France et ont écrit « SORTONS-EN » pour
une impressionnante image vue du ciel : photos et vidéo ont été
prises depuis un ULM ! La soirée s’achève en apothéose
par un fest-noz. Encore bravo !
Samedi 15 mai : Vannes puis Quimper
A Vannes, présentation de la planche à voiles géante
« Défi Sortir du nucléaire » qui se prépare
à traverser l’Atlantique grâce à la force du
vent. Vous en saurez plus dans quelque temps.
Dimanche 16 mai : sous-marins nucléaires
A l’Ile-Longue se trouve la base de sous-marins nucléaires lanceurs
d’engins. Après avoir déposé une gerbe à la
mémoire de toutes les victimes du nucléaire civil et militaire,
nous tiendrons meeting là, la banderole Sortir du nucléaire
déployée devant le cordon de gendarmes. Soirée à
Dinéault, où souffle le vent de l’espoir qui fait tourner
4 éoliennes de 350 kW. Ici, le point de vue sur l’ouest Finistère
est grandiose, si ce n’était cette ligne à haute tension
transportant de l’électricité... nucléaire, venue
d’ailleurs. Dîner et fest-noz. Après cette journée
"bombes atomiques", nous avions besoin de cet apaisement !
Lundi 17 mai : Brennilis, Mont-St-Michel
Brennilis. La centrale en cours de démantèlement est toujours
là, mais l’amoncellement de conteneurs de déchets dans la
cour a disparu, partis dans l’Aube. Des clients du café, installé
dans l’ancienne infirmerie de la centrale, nous interpellent : "Et
ne revenez plus nous embêter, on est bien, nous, ici". Mais
si, nous reviendrons, et pendant longtemps, car Brennilis c’est loin d’être
fini. Démantèlement, tellement, tellement dément
!
Mont St-Michel. Une pause pleine de symboles sous un soleil éclatant
et avec un bon vent marin. Le Mont-Saint-Michel a mille ans. Le plutonium,
déchet nucléaire, reste radioactif 124 fois 1000 ans !
Mardi 18 mai : dans la Manche
Etape près de Coutances, chez un militant qui est autonome pour
sa consommation électrique grâce à des cellules photovoltaïques
et une petite éolienne. Soirée à Granville, avec
la visite de notre ami de la Confédération paysanne, François
Dufour, très remonté contre les lignes THT.
Mémo : la France compte 200 000 pylônes
HT et THT, qui défigurent le paysage bien plus que nos 200 éoliennes.
En sortant du nucléaire (et donc en décentralisant la production),
on peut réduire environ de moitié le nombre de pylônes.
Si on en remplace seulement la moitié par des éoliennes,
soit 50 000, on produit autant que 15 réacteurs nucléaires
(en tenant compte de ce qu’une éolienne ne fonctionne en moyenne
qu’un tiers du temps).
Mercredi 19 mai : Eoliennes, Flamanville, Cherbourg
Déjeuner au pied de cinq grandes éoliennes en fin d’installation
à Sortosville. Puis, près des deux réacteurs EDF
de Flamanville, le sigle radioactif a été dessiné
avec des galets, et le projet éventuel d’EPR, ici comme à
Penly, dénoncé. Plus tard, le groupe "Mange moi"
et la troupe "Brut de béton" ont animé la soirée,
près de l’arsenal de Cherbourg, qui fabrique les sous-marins à
propulsion nucléaire et entrepose sur la digue du port militaire
les combustibles irradiés, en attente de leur transport vers Cadarache.
Le débat, après « Tchernobyl Now », s’est centré
sur les risques d’accidents et d’attentats.
Jeudi 20 mai : La Hague, Valogne
Départ depuis le "supermarché du plutonium" civil
et militaire et de la poubelle atomique de la Hague (Cogema), pour la
France, l’Europe et encore la Japon. Sur la grille d’entrée, une
grande banderole "NON à la Plutonium connection" a été
déployée. La caravane passe devant le centre de stockage
Manche (Andra) de déchets nucléaires dits de faible et moyenne
activité, aujourd’hui saturé. Puis au terminal ferroviaire
d’AREVA-Cogema de Valognes, l’attention a été attirée
sur les risques dus au transport par le rail des combustibles irradiés
et déchets nucléaires, et à celui du plutonium par
la route vers le sud de la France. Excellente soirée à Caen.
Vendredi 21 mai : Seine-Maritime, pays de l’EPR ?
Déjeuner citoyen à Yvetôt puis arrivée à
Dieppe, à quelques kilomètres des deux réacteurs
de la centrale, nucléaire de Penly, site favori pour recevoir le
réacteur EPR. Il est bien possible que Dieppe devienne dans les
années à venir la capitale de la lutte antinucléaire
! D’ailleurs, une immense esplanade s’offre à nous,
le long de la mer. Les militants locaux nous y accueillent. La banderole
« Le nucléaire tue l’avenir » est accrochée
sur une falaise située en pleine ville, au pied du château.
Demain, c’est l’arrivée du Tour. La satisfaction d’avoir
réussi ce pari un peu fou l’emporte sur la fatigue...
Samedi 22 mai : final à Penly et Rouen.
En milieu de journée, nous voilà devant la trop fameuse
centrale nucléaire de Penly. Pour la dernière fois, la caravane
du Tour fait étape avant de rallier l’arrivée à
Rouen, où environ 1500 personnes participent à la dernière
manifestation du Tour. Nous faisons halte devant une agence EDF et un
courageux salarié rappelle qu’il faut sauver le service public
de la privatisation... et du nucléaire.
Le soir, dernière représentation de « Tchernobyl now
» qui fait encore salle comble, puis dernier débat.
Voilà, l’aventure s’achève. Nous nous retrouvons
le dimanche matin pour un bilan et un dernier repas avant que chacun ne
reparte vers sa région - ou son pays pour nos amis néerlandais,
allemands et suisses. Le combat continue. A bientôt !
Le tour de France pour sortir du nucléaire, qui a parcouru 23 départements pendant quatre semaines, du 24 avril au 23 mai 2004, a été une grande réussite. Le nombre de personnes rencontrées sur la route du Tour a été de plusieurs dizaines de milliers mais ce sont en réalité des millions de gens qui ont été sensibilisées grâce à l’important impact médiatique (TV, radios et journaux sur le plan national, régional et local). La caravane du tour a permis de relier différents sites nucléaire civils et militaires et également des sites de production d’énergies renouvelables. L’objectif a été atteint : informer et sensibiliser de façon originale la population sur les enjeux de la politique nucléaire française et montrer que d’autres choix énergétiques sont possibles.
Quelle formidable énergie !
Un grand merci à toute l’équipe permanente, d’une quarantaine de personnes, présente sur le tour et aux centaines de bénévoles qui ont permis que chaque étape se déroule dans les meilleures conditions possibles.
Un coup de chapeau à cette caravane internationale. Citons notamment :
- de nombreux militants du Réseau « Sortir du nucléaire »,
- la compagnie de théâtre "Brut de béton", qui a joué pratiquement tous les soirs la pièce "Tchernobyl now !", adaptée du remarquable ouvrage de Svetlana Alexievitch, "La supplication". Emotion totale. Ce spectacle a été une réussite à chaque étape. Certains soir, il a fallu refuser du monde !
- un camion-scène d’animation du collectif hollandais Theaterstraat (pour les prises de parole, musique, et concerts),
- un bus venu de Hollande (destiné à transporter 20 personnes à travers tout le pays), muni de panneaux solaires qui permettent de recharger tous les appareils (ordinateurs et téléphones portables et particulier) sans recours au nucléaire,
- une remarquable exposition itinérante de l’association suisse ADER sur les énergies renouvelables, la consommation et l’autonomie énergétique, avec une super-équipe de jeunes animateurs compétents et motivés,
- une cuisine collective mobile de Rampenplan, venue des Pays-Bas, qui a proposé tous les jours de succulents repas végétariens et biologiques à un large public,
- un collectif hollandais de vidéo indépendante « Trojan TV », qui a réalisé des films au fur et à mesure du tour (visibles sur leur site internet : https://www.antenna.nl/organicchaos/anti_nuclear/video.html),
- plusieurs autres volontaires, dont un sapeur pompier professionnel, ancien équipier d’une CMIR (Cellule Mobile d’Intervention Radiologique), un militant antinucléaire venu d’Inde, un ancien travailleur du CERN (Centre européen de recherche nucléaire), une journaliste finlandaise représentant l’opposition à la construction d’un EPR en Finlande, et bien d’autres personnes encore que nous remercions chaleureusement.
Cette démarche a été sans précédent en France, tant par son ampleur que par sa dimension culturelle et ses propositions d’alternatives.
Voici une rétrospective étape par étape :
Samedi 24 avril 2004
Manifestation devant la centrale nucléaire de Fessenheim (Alsace).
Environ 2500 personnes : quel début en fanfare ! Bravo aux Alsaciens,
mais aussi aux nombreux Allemands et Suisses présents. Temps :
soleil éclatant, ciel totalement bleu... Que rêver de mieux
?
Mémo : la centrale nucléaire de Fessenheim est la plus vieille
de France, elle est inadaptée au risque sismique important dans
la région, elle est sous la menace d’une rupture du canal voisin
en cas de séisme. C’est aussi la centrale qui a été
arrosée par EDF pendant la canicule de l’été 2003.
C’est rassurant, la technologie nucléaire !
Dimanche 25 avril 2004
Journée festive à Kaysersberg (Alsace). Première
sortie pour toutes les animations qui vont parcourir tout le Tour.Le gymnase
de Kaysersberg ne désemplit pas de toute la journée, qui
se termine en apothéose avec le théâtre. Entre-temps,
le maire de la ville et un de ses collègues voisins ont déployé
sur une tour une gigantesque banderole (150 m2) du Réseau "Sortir
du nucléaire" et on peut voir dans toute la vallée
"Le nucléaire tue l’avenir".

lundi 26 avril 2004, 18ème "anniversaire" de la catastrophe de
Tchernobyl
Le Tour de France arrive à Nancy, ville régulièrement
traversée par des transports ferroviaires de déchets nucléaires.
Animations en ville puis manifestation jusqu’à la préfecture
(place Stanislas). Dépôt d’une gerbe de fleurs, puis "die-in"
en hommage aux victimes de Tchernobyl. Au même moment, la même
scène se déroule un peu partout en France.
Mémo : 18 ans après, non seulement les
conséquences de Tchernobyl ne s’estompent pas, mais au contraire
la situation s’aggrave ! C’est hélas la triste vérité
: de nombreux enfants ont des maladies de vieillards (maladies cardiaques,
rhumatismes), d’autres sont malformés ; les Biélorusses
mangent des produits contaminés (en particulier au césium).
Le pire est encore à venir.
Mardi 27 avril 2004
Dépôt de gerbe devant le Conseil Général de
la Meuse, puis le Tour part pour Bure (Meuse), où il arrive devant
le chantier du site d’enfouissement des déchets nucléaires.
Puis départ vers le moulin de Gourgeon (Haute-Saône) où
l’association Adera démontre la réalité et la pertinence
des énergies renouvelables.
Mémo : l’enfouissement des déchets nucléaires est
un véritable crime contre les générations futures.
Tôt ou tard, dans quelques centaines d’années, la corrosion
ouvrira les fûts, la radioactivité sera libérée.
Elle contaminera les nappes phréatiques, trouvera son chemin vers
la surface. Mais c’est la seule façon de se "débarrasser"
au moindre coût de ces déchets (qui vont rester dangereux
pour des centaines de milliers d’années) et de continuer à
prétendre que le nucléaire est bon marché...
Mercredi 28 avril 2004
Etape de transition jusqu’à Dijon. Contrôle anti-dopage
négatif : aucun des participants du Tour ne se dope à l’uranium
ou au plutonium !
jeudi 29 avril et vendredi 30 avril 2004
Dijon et Valduc (Côte d’Or) - Accueil formidable à l’espace
autogéré des Tanneries (Dijon).
Le vendredi en journée, le Tour se rend devant Valduc, site stratégique
pour la fabrication des armes nucléaires françaises. Autant
le dire : l’horreur absolue. Un des responsables (si on peut dite) sort
du site pour discuter un peu : il prétend travailler... pour la
Paix.
Samedi 1er mai 2004
Le Tour arrive dans le Jura, à Lons-le-Saunier. Pas de site nucléaire
particulier mais... le danger nucléaire est immense partout en
France et même au-delà de nos frontières (qui n’arrêtent
pas la radioactivité, faut-il le rappeler ?) Défilé,
animations, repas, et une belle soirée avec près de 200
personnes pour la diffusion d’un film et la pièce "Tchernobyl
now".
Dimanche 2 mai 2004
Le Tour arrive à Valence, dans la Drôme, ville où
se trouve la Criirad, dont le laboratoire fait des analyses et expertises
indépendantes. Autant que le Réseau "Sortir du nucléaire",
la Criirad a besoin de votre adhésion pour continuer à faire
connaître en toute indépendance les réalités
de l’industrie nucléaire. Le soir, encore un triomphe pour "Tchernobyl
now", puis une conférence de Bruno Chareyron, ingénieur
de la Criirad, à propos de la mission qu’il a menée il y
a quelques semaines au Niger. Stupéfiant !
Mémo : comme on met de l’essence dans une voiture, il faut mettre
de l’uranium dans une centrale nucléaire pour qu’elle fonctionne.
Malgré des menaces et la confiscation de ses appareils de mesure,
la Criirad a pu démontrer l’an dernier que l’extraction de
l’uranium au Niger par la multinationale française Areva-Cogéma
se faisait dans des conditions scandaleuses pour les mineurs, les populations
et l’environnement.
Lundi 3 mai 2004 : à Pierrelatte (Drôme)
Entrée dans le "Triangle des Bermudes" du nucléaire
: Pierrelatte-Cadarache-Marcoule.
Le Tour arrive à la mi-journée à Pierrelatte, devant
la centrale nucléaire du Tricastin et l’usine Eurodif.. Repas,
musique, animations. Les militants locaux assemblent une "tour de
refroidissement" de trois mètres, en bois. Animations, concert
avec de formidables artistes locaux (et toujours l’excellent Achille).
"Tchernobyl now" puis débat en présence de notre
ami Yannick Rousselet, de Greenpeace, grand connaisseur de la filière
française du plutonium.

Mémo : Tricastin-Eurodif : l’absurdité nucléaire
!
Les quatre réacteurs de la centrale nucléaire du Tricastion
fonctionnent presque exclusivement pour alimenter l’usine voisine Eurodif,
qui prépare... le combustible nucléaire ! Cette production
est comptée dans les fameux 78% d’électricité française
d’origine nucléaire : quelle absurdité !
Mardi 4 mai 2004 : Cadarache (Bouches-du-Rhône)
Arrivé en fin de matinée devant l’entrée du site.
Barrage filtrant pour donner de l’information aux salariés qui
viennent travailler. Vers 13h, "die-in" : au son d’une sirène,
les manifestants se couchent sur les voies d’accès du site. Rapidement,
un gigantesque embouteillage se forme. Les gendarmes s’énervent...
pas nous ! Au bout d’une demi-heure, les véhicules disparaissent
comme par enchantement, dirigés vers une autre entrée. Peu
importe : il est temps pour nous de lever le camp et de nous rendre à
Forcalquier : animations, musique, puis une nouvelle représentation
de "Tchernobyl now" devant une salle archicomble : il a fallu
refuser du monde !


Mémo : Cadarache : Ce site nucléaire, situé
à Saint-Paul-lez-Durance (Bouches-du-Rhône), compte en tout
450 bâtiments sur 1600 hectares. Certaines installations ou entreposages
font froid dans le dos :
-
cinq tranchées en pleine terre, où sont stockés
depuis 30 ans des déchets dont certains sont contaminés
par du plutonium. Ils ont probablement contaminé, ou peuvent
encore le faire, la nappe aquifère située quelques mètres
en dessous.
-
le fameux Atelier de Plutonium de Cadarache : l’autorité
de sûreté nucléaire a vainement « exigé
» pendant 8 ans (de 1995 à 2003) la fermeture de ce très
dangereux atelier (inadapté au risque sismique) où sont
manipulées de grandes quantités de plutonium. En juillet
2003, cet atelier a enfin été officiellement fermé.
Or, des activités industrielles y sont toujours menées
et, pire, Areva va y traiter à partir d’août 2004 du
plutonium américain. Incroyable pour une installation... fermée
!
mercredi 5 mai 2004 : Marcoule (Gard)
Nous nous rendons devant le centre nucléaire de Marcoule. Comme
la veille à Cadarache, nous occupons les voies d’accès.
Le soir, à Nîmes, belle manifestation en ville et nouveau
succès de la compagnie Brut de Béton. Puis Gerd la finlandaise
et Kumar l’Indien offrent une dernière fois leurs témoignages
avant de regagner leurs pays respectifs. Courage, les amis, et sûrement
à bientôt !

Mémo : Marcoule. Créé en 1956, Marcoule
(Gard) est un immense site (140 ha en bordure du Rhône) exploité
par le CEA et la Cogéma. Les activités principales sont
la production de combustible nucléaire Mox et l’exploitation du
réacteur expérimental Phénix.
-
Le Mox est un combustible nucléaire contenant
du plutonium. Sur les 58 réacteurs nucléaires français,
20 sont habilités à en recevoir. Le transport du Mox
vers ces réacteurs se fait par camions, avec une protection
minimale (« pour ne pas attirer l’attention », d’après
les autorités). Un incident grave à Mélox ou
au cours d’un des innombrables transports pourrait causer la mort
de centaines ou même de milliers de personnes.
-
Phénix : la vie de ce réacteur de recherche
est ponctuée par des arrêts en raison de fuites et petits
feux de sodium, ainsi que de baisses anormales de réactivité
dans le cœur, que les chercheurs n’ont jamais réussi à
expliquer. Pourtant, le 5 juin 2003, l’Autorité de sûreté
nucléaire a autorisé le redémarrage de Phénix...
aux deux tiers de sa puissance nominale. Sera-ce suffisant pour éviter
un drame ? Phénix pourrait fonctionner ainsi, en dépit
du bon sens, jusqu’en 2008
jeudi 6 mai 2004 : parc éolien d’Avignonet
Le Tour ne se contente pas de dénoncer le nucléaire, il
fait la promotion des alternatives. Mais ce serait tellement mieux si
c’était le service public qui s’en chargeait !
Mémo : Novembre 2003 - Sondage de l’Institut CSA
:"92% des touristes interrogés sur 25 sites en pleine période
touristique considèrent l’utilisation des éoliennes comme
« une bonne chose ». Seulement 16% estiment qu’elles « dégradent
le paysage ». Est-il besoin d’en rajouter ? Notons encore que l’Allemagne
produit désormais l’équivalent de 5 réacteurs nucléaires
rien qu’avec les éoliennes.

Vendredi 7 mai : maisons autonomes de Bazens
Depuis des années, plusieurs militants de Stop-Golfech vivent
de façon quasi autonome sur le plan énergétique :
maisons bien isolées, panneaux solaires, petite éolienne...
Pendant la tempête de décembre 1999, ils étaient les
seuls à avoir de l’électricité chez eux, les lignes
EDF étant rompues.
Samedi 8 mai : Stop-Golfech !
C’est par un rassemblement d’environs 400 personnes, devant la centrale
nucléaire de Golfech, que débute cette journée. Valence
d’Agen : plus de 500 personnes pour un repas convivial, des débats,
des animations.
Mémo : la centrale nucléaire de Golfech a été
la première à se mettre dans l’illégalité
pendant la canicule de l’été 2003. Dès le mois de
juin, elle a rejeté dans la Garonne de l’eau plus chaude que les
limites maximales autorisées. Il faut dire que la "toile"
des lignes Très haute tension (THT) qui quadrille la France, n’est
pas homogène et certaines centrales, comme Golfech ou Tricastin,
constituent des "nœuds" qui ne doivent pas être arrêtés
sous peine de risque de black-out régional ou même national.
Une fois de plus, l’environnement est sacrifié au profit de la
raison d’Etat... nucléaire.
Dimanche 9 mai : Hiroshi-Barp !
Près de 500 personnes ce midi devant le Laser Mégajoule
du Barp (Gironde), en construction à 20 km de Bordeaux qui va devenir
aussi célèbre qu’Hiroshima, mais... en tant que "ville
bourreau". Le soir : apéro, débats, expositions puis
concert endiablé de la Compagnie Mohein !
Mémo : Couplé à de puissants ordinateurs,
ce Laser va permettre à l’armée française de simuler
les essais atomiques autrefois réalisés en Algérie
et en Polynésie. Pire, le Mégajoule va permettre la mise
au point de "mini-nukes", de "petites" bombes atomiques
destinées à servir réellement et non plus à
dissuader. La France a signé les traité d’interdiction des
essais nucléaires mais dit en substance aux autres pays : "Tout
le monde doit arrêter les essais, mais nous, nous continuons avec
la simulation". Bien entendu, c’est intolérable pour les autres
pays, qui continuent la course à la bombe... sans avoir besoin
d’un Mégajoule, eux ! Mais la France a bien 5 milliards d’euros
à gaspiller dans cet effroyable projet.
Le chantier du Laser Mégajoule : des grues
dans la forêt
Lundi 10 mai : train nucléaire, train d’enfer !
Cette journée de "repos" à Bordeaux permet au
"Tour de France" de dénoncer le passage dans les grandes
villes de trains transportant les déchets nucléaires. Une
centaine de personnes envahissent en fin d’après-midi la gare de
Bordeaux, la redécorent avec des autocollants "certifié
pro-nucléaire", "meurent" subitement au son d’une
sirène à la grande surprise des voyageurs et au désappointement
des cadres de la SNCF.

Occupation du hall de la gare de Bordeaux

La direction de la SNCF certifiée pro-nucléaire
Mémo : les déchets nucléaires issus
des centrales nucléaires sont transportés, à destination
de La Hague (Cotentin) à travers toute la France par camions et
surtout par train. Ces transports font peser un grave danger sur les populations
du fait du risque d’accident ou d’attentat. Parfois, ces "trains
nucléaires" traversent des grandes villes. Des militants ont
ainsi stoppé un de ces trains en plein Bordeaux, le 29 septembre
dernier. La police est intervenue royalement... 25 minutes plus tard.
Des individus mal intentionnés auraient eu tout le temps de dynamiter
le wagon qui contenait de l’uranium et du plutonium.
Mardi 11 mai : la Mort à la centrale nucléaire du Blayais
!
Vers midi, pique-nique devant la centrale. Distribution de documents
"Pour un vrai service public de l’électricité sans
nucléaire" aux salariés. Un militant, revêtu
du costume de la Mort, escalade soudain la grande stèle EDF placée
à l’entrée de la centrale. Un gendarme tente vainement de
l’arrêter, prétendant que « c’est dangereux
», alors qu’il se trouve aux pieds de quatre réacteurs
nucléaires !

La Mort en ballade au Blayais

La gendarmerie tente en vain d’intervenir...
Mémo : très près de Tcherno... Blaye !
La nuit du 27 au 28 décembre 1999, au cours de la tempête qui
a ravagé la France, cent mille mètres cubes d’eau de la Gironde
sont entrés sans autorisation dans la centrale nucléaire du
Blayais, qui a alors frôlé le désastre. Le 5 janvier,
en dépit des manœuvres d’EDF, le quotidien Sud-Ouest titre "Très
près de l’accident majeur" Quelques semaines plus tard, une
manifestation de plus de 2000 personnes, pacifique, familiale et musicale,
est accueillie par des coups de matraques et des gaz lacrymogènes.
Le pouvoir nucléaire n’aime pas les citoyens.
Mercredi
12 mai : Saintes
Grâce à l’action opiniâtre de l’ACDN (Action des citoyens
pour le désarmement nucléaire), Saintes est la première
ville à avoir signé en faveur du désarmement nucléaire.
La nouvelle maire, UMP, a eu le courage notable de ne pas revenir sur
la signature de son prédécesseur... Un fois de plus, la
pièce "Tchernobyl now" est un succès.
Jeudi 13 mai : Civaux et Poitiers
Encore une étape rondement menée, le quotidien local «
La Nouvelle République » concluant admiratif : « Le
Réseau Sortir du nucléaire est fichtrement bien organisé
». Il est vrai que c’est déjà le 20ème
jour du Tour et que tout le monde est parfaitement rodé.
Mémo : Grave incident à Civaux le 18 mai
1998
Peu de gens le savent, mais la plupart des réacteurs nucléaires
« français » sont en fait de technologie américaine.
A la fin des années 90, l’industrie nucléaire française
construit enfin (si on peut dire) elle-même quatre réacteurs
: deux à Chooz (Ardennes) et deux à Civaux (Vienne), dont
le premier entre en fonction en novembre 1997. Le 18 mai 1998, après
six petits mois, une très grave incident se produit : une fuite
d’eau d’un débit estimé à 30 m3/h sur le circuit
de refroidissement à l’arrêt du réacteur (RRA). Heureusement,
un autre système fonctionne correctement et fait l’appoint
en eau, le temps d’arrêter le pauvre réacteur franchouillard.
Ce véritable brouillon de l’EPR a démontré
sa vulnérabilité.
Vendredi 14 mai : Le Carnet et St-Nicolas-du-Redon
Une formidable étape ! D’abord un passage à la mi-journée
au Carnet (Loire-Atlantique), où 25 000 personnes et une chaîne
humaine de 36 km organisée le 1er juin 1997 ont réussi à
faire annuler la construction d’une centrale nucléaire.
La région étant toujours à la pointe de la mobilisation,
ce sont deux mille personnes qui se sont venues pour cette étape
du Tour de France et ont écrit « SORTONS-EN » pour
une impressionnante image vue du ciel : photos et vidéo ont été
prises depuis un ULM ! La soirée s’achève en apothéose
par un fest-noz. Encore bravo !
Samedi 15 mai : Vannes puis Quimper
A Vannes, présentation de la planche à voiles géante
« Défi Sortir du nucléaire » qui se prépare
à traverser l’Atlantique grâce à la force du
vent. Vous en saurez plus dans quelque temps.
Dimanche 16 mai : sous-marins nucléaires
A l’Ile-Longue se trouve la base de sous-marins nucléaires lanceurs
d’engins. Après avoir déposé une gerbe à la
mémoire de toutes les victimes du nucléaire civil et militaire,
nous tiendrons meeting là, la banderole Sortir du nucléaire
déployée devant le cordon de gendarmes. Soirée à
Dinéault, où souffle le vent de l’espoir qui fait tourner
4 éoliennes de 350 kW. Ici, le point de vue sur l’ouest Finistère
est grandiose, si ce n’était cette ligne à haute tension
transportant de l’électricité... nucléaire, venue
d’ailleurs. Dîner et fest-noz. Après cette journée
"bombes atomiques", nous avions besoin de cet apaisement !
Lundi 17 mai : Brennilis, Mont-St-Michel
Brennilis. La centrale en cours de démantèlement est toujours
là, mais l’amoncellement de conteneurs de déchets dans la
cour a disparu, partis dans l’Aube. Des clients du café, installé
dans l’ancienne infirmerie de la centrale, nous interpellent : "Et
ne revenez plus nous embêter, on est bien, nous, ici". Mais
si, nous reviendrons, et pendant longtemps, car Brennilis c’est loin d’être
fini. Démantèlement, tellement, tellement dément
!
Mont St-Michel. Une pause pleine de symboles sous un soleil éclatant
et avec un bon vent marin. Le Mont-Saint-Michel a mille ans. Le plutonium,
déchet nucléaire, reste radioactif 124 fois 1000 ans !
Mardi 18 mai : dans la Manche
Etape près de Coutances, chez un militant qui est autonome pour
sa consommation électrique grâce à des cellules photovoltaïques
et une petite éolienne. Soirée à Granville, avec
la visite de notre ami de la Confédération paysanne, François
Dufour, très remonté contre les lignes THT.
Mémo : la France compte 200 000 pylônes
HT et THT, qui défigurent le paysage bien plus que nos 200 éoliennes.
En sortant du nucléaire (et donc en décentralisant la production),
on peut réduire environ de moitié le nombre de pylônes.
Si on en remplace seulement la moitié par des éoliennes,
soit 50 000, on produit autant que 15 réacteurs nucléaires
(en tenant compte de ce qu’une éolienne ne fonctionne en moyenne
qu’un tiers du temps).
Mercredi 19 mai : Eoliennes, Flamanville, Cherbourg
Déjeuner au pied de cinq grandes éoliennes en fin d’installation
à Sortosville. Puis, près des deux réacteurs EDF
de Flamanville, le sigle radioactif a été dessiné
avec des galets, et le projet éventuel d’EPR, ici comme à
Penly, dénoncé. Plus tard, le groupe "Mange moi"
et la troupe "Brut de béton" ont animé la soirée,
près de l’arsenal de Cherbourg, qui fabrique les sous-marins à
propulsion nucléaire et entrepose sur la digue du port militaire
les combustibles irradiés, en attente de leur transport vers Cadarache.
Le débat, après « Tchernobyl Now », s’est centré
sur les risques d’accidents et d’attentats.
Jeudi 20 mai : La Hague, Valogne
Départ depuis le "supermarché du plutonium" civil
et militaire et de la poubelle atomique de la Hague (Cogema), pour la
France, l’Europe et encore la Japon. Sur la grille d’entrée, une
grande banderole "NON à la Plutonium connection" a été
déployée. La caravane passe devant le centre de stockage
Manche (Andra) de déchets nucléaires dits de faible et moyenne
activité, aujourd’hui saturé. Puis au terminal ferroviaire
d’AREVA-Cogema de Valognes, l’attention a été attirée
sur les risques dus au transport par le rail des combustibles irradiés
et déchets nucléaires, et à celui du plutonium par
la route vers le sud de la France. Excellente soirée à Caen.
Vendredi 21 mai : Seine-Maritime, pays de l’EPR ?
Déjeuner citoyen à Yvetôt puis arrivée à
Dieppe, à quelques kilomètres des deux réacteurs
de la centrale, nucléaire de Penly, site favori pour recevoir le
réacteur EPR. Il est bien possible que Dieppe devienne dans les
années à venir la capitale de la lutte antinucléaire
! D’ailleurs, une immense esplanade s’offre à nous,
le long de la mer. Les militants locaux nous y accueillent. La banderole
« Le nucléaire tue l’avenir » est accrochée
sur une falaise située en pleine ville, au pied du château.
Demain, c’est l’arrivée du Tour. La satisfaction d’avoir
réussi ce pari un peu fou l’emporte sur la fatigue...
Samedi 22 mai : final à Penly et Rouen.
En milieu de journée, nous voilà devant la trop fameuse
centrale nucléaire de Penly. Pour la dernière fois, la caravane
du Tour fait étape avant de rallier l’arrivée à
Rouen, où environ 1500 personnes participent à la dernière
manifestation du Tour. Nous faisons halte devant une agence EDF et un
courageux salarié rappelle qu’il faut sauver le service public
de la privatisation... et du nucléaire.
Le soir, dernière représentation de « Tchernobyl now
» qui fait encore salle comble, puis dernier débat.
Voilà, l’aventure s’achève. Nous nous retrouvons
le dimanche matin pour un bilan et un dernier repas avant que chacun ne
reparte vers sa région - ou son pays pour nos amis néerlandais,
allemands et suisses. Le combat continue. A bientôt !