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Sortir du nucléaire n°37



Déc - janv 2008

Analyse

L’EPR, une débauche d’énergie en pure perte

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°37 - Déc - janv 2008

 EPR
Article publié le : 1er janvier 2008


Le nucléaire français en a fait sa vitrine. Pourtant, avant même sa mise en service, l’European Pressurized Water Reactor concentre les critiques, et pas seulement des écolos.



Philippe Leigné a la tête de l’emploi : une allure de cow-boy, un visage carré barré de sourcils broussailleux, et surtout de larges épaules. Il faut bien ça quand on a l’avenir du parc nucléaire français entre les mains. Car c’est ce quinquagénaire qui pilote le fameux projet EPR (European Pressurized Water Reactor) mis au point par Areva et construit par EDF à Flamanville (Manche). Une bête de course capable de fournir 13 milliards de kilowattheures par an, soit la consommation électrique de la Picardie. Du haut de la falaise qui surplombe le chantier, Philippe Leigné observe le ballet des pelleteuses. Une immense dalle ronde dessine l’emplacement du futur réacteur, là où les premières tonnes de béton de l’îlot central devraient être coulées en décembre. “Après un an de travaux, nous sommes globalement dans les temps”, déclare-t- il, sans esquisser un sourire.

Dans son bureau parisien, Bernard Salha, le directeur de l’ingénierie nucléaire d’EDF, griffonne sur un papier le “rétro- planning” censé justifier la construction de l’EPR.
“Les premières centrales nucléaires françaises construites au milieu des années 1970 devront être progressivement remplacées à partir de 2020. Nous devrons alors disposer d’une technologie qui aura pu être testée au moins pendant cinq ans. Cela suppose la mise en marche d’un nouveau réacteur vers 2012”. Sauf que ce schéma qui fleure bon le calcul d’ingénieur est loin de faire l’unanimité. Au sein même d’EDF, au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et dans la communauté scientifique, le choix de l’EPR et la feuille de route de l’électricien en laissent plus d’un pantois.

“Nous n’avions vraiment pas besoin d’un nouveau réacteur. La France est déjà en situation de surcapacité de production nucléaire. On estime aujourd’hui que, sur un total de 58 réacteurs, une dizaine servent uniquement à l’exportation et qu’une quinzaine d’autres au moins ne tournent pas à leur optimum économique” explique Antoine Bonduelle, ingénieur et consultant en énergie. Or, si l’on en croit les dernières projections du Réseau de transport d’électricité (RTE), la consommation électrique française devrait nettement ralentir sa progression dans les années qui viennent. D’ici à 2010, elle augmenterait de 1,3 % chaque année, puis de 1% seulement par an jusqu’en 2020, soit moitié moins vite que durant les années 1990-2000. Bernard Laponche, responsable de l’énergie et de la sûreté nucléaire du gouvernement Jospin et l’un des meilleurs spécialistes en matière d’économies d’énergie, ne décolère pas : “La France a besoin de nouvelles capacités de production d’électricité très souples, pouvant fonctionner rapidement lors des pics de consommation. Or le nucléaire n’est absolument pas rentable dans ce type de situation”

Dans cet épineux dossier de la modernisation du parc nucléaire, les gouvernements successifs et EDF semblent avoir écarté toutes les options autres que l’EPR. La première aurait consisté à allonger la durée de vie des centrales les plus récentes. Outre-Atlantique, l’Autorité de sûreté nucléaire a donné son agrément pour porter la durée d’exploitation de plus de la moitié des réacteurs à soixante ans.
En France, alors que les technologies sont quasi identiques, les réacteurs ne doivent théoriquement pas fonctionner plus de quarante ans. Seconde voie possible : l’augmentation de la puissance du parc existant. Une option choisie par la Suède et étudiée actuellement par la Belgique. “Tout peut se changer dans une centrale, à part la cuve. Il suffit d’une nouvelle pompe à chaleur et de faire varier certains paramètres de calcul pour augmenter la puissance d’un réacteur de 5 à 10% à niveau de sûreté équivalent” explique cet ancien ingénieur d’Areva. En France, le lifting d’une quinzaine de centrales aurait permis d’économiser la construction de l’EPR de Flamanville. Alors, comment expliquer l’empressement du “ lobby” nucléaire français ?

“Nous sommes confrontés à un réel problème de pyramide des âges” lâche Bernard Salha. Tous les ingénieurs et techniciens spécialisés qui ont participé à la construction du parc nucléaire français dans les années 70-80 sont proches de la retraite. Si les géants français de l’atome souhaitent conserver une compétence en matière de construction et de maintenance d’une installation nucléaire, la transmission du savoir est essentielle.
“Le chantier de l’EPR est un formidable instrument pour former des centaines d’ingénieurs”, conclut Bernard Salha. Le maintien des compétences est évidemment un atout essentiel au moment où le nucléaire revient partout à la mode après des années de purgatoire.

Selon les estimations de l’Agence internationale de l’énergie, le marché mondial de l’industrie nucléaire atteindrait 100 milliards d’euros au cours des deux prochaines décennies, et les Français espèrent bien obtenir une belle part du gâteau. Mais alors que le chantier de l’EPR en Finlande accuse déjà deux ans de retard, la France se devait d’installer ce type de réacteur sur son territoire pour rassurer ses clients potentiels.
“Flamanville sera la vitrine commerciale de la filière nucléaire française. Sa construction est aussi une question de politique industrielle” analyse Pierre Zaleski, un des pères des surgénérateurs aujourd’hui délégué général du Centre de géopolitique de l’énergie et des matières premières (CGEMP).

Car, dans la guerre commerciale à laquelle se livrent Areva et ses principaux concurrents, General Electric et Westinghouse, le premier qui aura réussi à démontrer que son bébé est viable aura gagné une bataille. “La vitesse est sans doute une des seules cartes que peut jouer Areva car, sur le plan technologique, les deux modèles concurrents de l’EPR, notamment l’AP1000 de Westinghouse, paraissent nettement plus séduisants et novateurs”, estime Bernard Laponche. De l’avis même des ingénieurs d’Areva, l’EPR est davantage un modèle “évolutionnaire” que “révolutionnaire”. Bertrand Barré, un très proche conseiller d’Anne Lauvergeon, la patronne d’Areva, s’en explique : “Il y a une quinzaine d’années, les autorités de sûreté française, qui certifient les réacteurs, nous ont fait comprendre qu’il fallait accorder un plus grand prix au retour d’expérience. L’EPR est délibérément peu innovant.” D’où une inflation de vannes, de pompes et un réseau extravagant de tuyauteries (…).

La puissance de l’EPR (1 650 mégawatts), censée être un atout, pourrait en outre se révéler un frein à l’exportation, sauf sur quelques très gros marchés comme la Chine, où un accord pour la construction de deux réacteurs est âprement négocié. “Les infrastructures nécessaires pour installer un réacteur d’une telle puissance sont très lourdes, ce qui réduit évidemment la liste des pays qui peuvent se le payer”, explique Sergueï Kirienko, ancien Premier ministre de Boris Eltsine et aujourd’hui directeur de l’agence fédérale pour l’énergie atomique. Dernier point faible de l’EPR : son coût. Une étude du CGEMP révèle que le prix de production instantané d’un kilowattheure pour l’EPR est près de 40% supérieur à celui de ses deux principaux concurrents. “Le succès commercial de l’EPR dépendra largement de l’échec de l’AP1000”, résume, amer, un des membres de la direction d’EDF.

Mais, au-delà de cette bataille commerciale, c’est l’avenir de la “quatrième génération” qui se joue dans les laboratoires. Derrière ce nom de code, le rêve de tous les fans de l’atome : le nucléaire durable, économe en ressources naturelles, notamment en uranium, et pauvre en déchets. Ce type de réacteur permettrait de produire 50 fois plus d’électricité avec la même quantité d’uranium. Quant aux déchets, la plus grosse part serait réutilisée comme combustible. “A condition d’y mettre les moyens et d’allonger la durée de vie des centrales existantes, on aurait pu sauter l’étape de l’EPR en adoptant directement la quatrième génération vers 2030” affirme Benjamin Dessus, économiste et président de Global Chance. D’autant que les Français avaient théoriquement une longueur d’avance dans cette technologie, car ces réacteurs révolutionnaires ne sont rien moins que des Super-Phenix améliorés. Problème : le surgénérateur a été fermé en 1997 et les équipes ont été dispersées. “Son arrêt a été la condition de la participation des Verts au gouvernement de Lionel Jospin. Quant à ses problèmes techniques, ils n’étaient pas liés à la filière mais à des erreurs de conception et de construction”, assure Pierre Zaleski.

Au CEA, deux équipes travaillent sur des projets de réacteurs à neutrons rapides. “Nous prévoyons de mettre au point un prototype en 2020 pour lancer une série vers 2040” explique Philippe Pradel,
le directeur de l’énergie nucléaire, en avouant aussitôt “qu’il sera difficile d’y arriver”. (…)

Les pylônes de la discorde
Le site de Flamanville, qui compte déjà deux centrales nucléaires d’ancienne génération, ne pourra fonctionner qu’aux deux tiers de sa puissance sans la construction d’une nouvelle ligne à très haute tension de 400 000 volts, d’environ 150 kilomètres de long en direction du sud. Car le réseau actuel du Nord-Cotentin ne pourra supporter l’accroissement de la production provoqué par la mise en service de l’EPR sans risques de panne d’électricité à grande échelle. Ce chantier pharaonique nécessiterait, selon RTE, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, 300 pylônes de 45 à 65 mètres de haut positionnés tous les 500 mètres, pour un coût global de 200 millions d’euros. Problème : les 5 départements et les 30 communes concernées par le projet ne veulent pas entendre parler des pylônes et réclament l’enfouissement de la ligne. Or, pour des raisons techniques, aucun pays au monde n’a enfoui une ligne à haute tension sur une distance aussi longue (le record est de 40 kilomètres au Japon) et le coût d’un tel projet est exorbitant : 6 millions d’euros par kilomètre ! Trouver un accord d’ici à la fin de l’année entre les 800 acteurs de la concertation, selon le calendrier prévu, relève de la gageure.

Béatrice Mathieu
Paru dans L’expansion (n° 722 - septembre 2007)

Philippe Leigné a la tête de l’emploi : une allure de cow-boy, un visage carré barré de sourcils broussailleux, et surtout de larges épaules. Il faut bien ça quand on a l’avenir du parc nucléaire français entre les mains. Car c’est ce quinquagénaire qui pilote le fameux projet EPR (European Pressurized Water Reactor) mis au point par Areva et construit par EDF à Flamanville (Manche). Une bête de course capable de fournir 13 milliards de kilowattheures par an, soit la consommation électrique de la Picardie. Du haut de la falaise qui surplombe le chantier, Philippe Leigné observe le ballet des pelleteuses. Une immense dalle ronde dessine l’emplacement du futur réacteur, là où les premières tonnes de béton de l’îlot central devraient être coulées en décembre. “Après un an de travaux, nous sommes globalement dans les temps”, déclare-t- il, sans esquisser un sourire.

Dans son bureau parisien, Bernard Salha, le directeur de l’ingénierie nucléaire d’EDF, griffonne sur un papier le “rétro- planning” censé justifier la construction de l’EPR.
“Les premières centrales nucléaires françaises construites au milieu des années 1970 devront être progressivement remplacées à partir de 2020. Nous devrons alors disposer d’une technologie qui aura pu être testée au moins pendant cinq ans. Cela suppose la mise en marche d’un nouveau réacteur vers 2012”. Sauf que ce schéma qui fleure bon le calcul d’ingénieur est loin de faire l’unanimité. Au sein même d’EDF, au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et dans la communauté scientifique, le choix de l’EPR et la feuille de route de l’électricien en laissent plus d’un pantois.

“Nous n’avions vraiment pas besoin d’un nouveau réacteur. La France est déjà en situation de surcapacité de production nucléaire. On estime aujourd’hui que, sur un total de 58 réacteurs, une dizaine servent uniquement à l’exportation et qu’une quinzaine d’autres au moins ne tournent pas à leur optimum économique” explique Antoine Bonduelle, ingénieur et consultant en énergie. Or, si l’on en croit les dernières projections du Réseau de transport d’électricité (RTE), la consommation électrique française devrait nettement ralentir sa progression dans les années qui viennent. D’ici à 2010, elle augmenterait de 1,3 % chaque année, puis de 1% seulement par an jusqu’en 2020, soit moitié moins vite que durant les années 1990-2000. Bernard Laponche, responsable de l’énergie et de la sûreté nucléaire du gouvernement Jospin et l’un des meilleurs spécialistes en matière d’économies d’énergie, ne décolère pas : “La France a besoin de nouvelles capacités de production d’électricité très souples, pouvant fonctionner rapidement lors des pics de consommation. Or le nucléaire n’est absolument pas rentable dans ce type de situation”

Dans cet épineux dossier de la modernisation du parc nucléaire, les gouvernements successifs et EDF semblent avoir écarté toutes les options autres que l’EPR. La première aurait consisté à allonger la durée de vie des centrales les plus récentes. Outre-Atlantique, l’Autorité de sûreté nucléaire a donné son agrément pour porter la durée d’exploitation de plus de la moitié des réacteurs à soixante ans.
En France, alors que les technologies sont quasi identiques, les réacteurs ne doivent théoriquement pas fonctionner plus de quarante ans. Seconde voie possible : l’augmentation de la puissance du parc existant. Une option choisie par la Suède et étudiée actuellement par la Belgique. “Tout peut se changer dans une centrale, à part la cuve. Il suffit d’une nouvelle pompe à chaleur et de faire varier certains paramètres de calcul pour augmenter la puissance d’un réacteur de 5 à 10% à niveau de sûreté équivalent” explique cet ancien ingénieur d’Areva. En France, le lifting d’une quinzaine de centrales aurait permis d’économiser la construction de l’EPR de Flamanville. Alors, comment expliquer l’empressement du “ lobby” nucléaire français ?

“Nous sommes confrontés à un réel problème de pyramide des âges” lâche Bernard Salha. Tous les ingénieurs et techniciens spécialisés qui ont participé à la construction du parc nucléaire français dans les années 70-80 sont proches de la retraite. Si les géants français de l’atome souhaitent conserver une compétence en matière de construction et de maintenance d’une installation nucléaire, la transmission du savoir est essentielle.
“Le chantier de l’EPR est un formidable instrument pour former des centaines d’ingénieurs”, conclut Bernard Salha. Le maintien des compétences est évidemment un atout essentiel au moment où le nucléaire revient partout à la mode après des années de purgatoire.

Selon les estimations de l’Agence internationale de l’énergie, le marché mondial de l’industrie nucléaire atteindrait 100 milliards d’euros au cours des deux prochaines décennies, et les Français espèrent bien obtenir une belle part du gâteau. Mais alors que le chantier de l’EPR en Finlande accuse déjà deux ans de retard, la France se devait d’installer ce type de réacteur sur son territoire pour rassurer ses clients potentiels.
“Flamanville sera la vitrine commerciale de la filière nucléaire française. Sa construction est aussi une question de politique industrielle” analyse Pierre Zaleski, un des pères des surgénérateurs aujourd’hui délégué général du Centre de géopolitique de l’énergie et des matières premières (CGEMP).

Car, dans la guerre commerciale à laquelle se livrent Areva et ses principaux concurrents, General Electric et Westinghouse, le premier qui aura réussi à démontrer que son bébé est viable aura gagné une bataille. “La vitesse est sans doute une des seules cartes que peut jouer Areva car, sur le plan technologique, les deux modèles concurrents de l’EPR, notamment l’AP1000 de Westinghouse, paraissent nettement plus séduisants et novateurs”, estime Bernard Laponche. De l’avis même des ingénieurs d’Areva, l’EPR est davantage un modèle “évolutionnaire” que “révolutionnaire”. Bertrand Barré, un très proche conseiller d’Anne Lauvergeon, la patronne d’Areva, s’en explique : “Il y a une quinzaine d’années, les autorités de sûreté française, qui certifient les réacteurs, nous ont fait comprendre qu’il fallait accorder un plus grand prix au retour d’expérience. L’EPR est délibérément peu innovant.” D’où une inflation de vannes, de pompes et un réseau extravagant de tuyauteries (…).

La puissance de l’EPR (1 650 mégawatts), censée être un atout, pourrait en outre se révéler un frein à l’exportation, sauf sur quelques très gros marchés comme la Chine, où un accord pour la construction de deux réacteurs est âprement négocié. “Les infrastructures nécessaires pour installer un réacteur d’une telle puissance sont très lourdes, ce qui réduit évidemment la liste des pays qui peuvent se le payer”, explique Sergueï Kirienko, ancien Premier ministre de Boris Eltsine et aujourd’hui directeur de l’agence fédérale pour l’énergie atomique. Dernier point faible de l’EPR : son coût. Une étude du CGEMP révèle que le prix de production instantané d’un kilowattheure pour l’EPR est près de 40% supérieur à celui de ses deux principaux concurrents. “Le succès commercial de l’EPR dépendra largement de l’échec de l’AP1000”, résume, amer, un des membres de la direction d’EDF.

Mais, au-delà de cette bataille commerciale, c’est l’avenir de la “quatrième génération” qui se joue dans les laboratoires. Derrière ce nom de code, le rêve de tous les fans de l’atome : le nucléaire durable, économe en ressources naturelles, notamment en uranium, et pauvre en déchets. Ce type de réacteur permettrait de produire 50 fois plus d’électricité avec la même quantité d’uranium. Quant aux déchets, la plus grosse part serait réutilisée comme combustible. “A condition d’y mettre les moyens et d’allonger la durée de vie des centrales existantes, on aurait pu sauter l’étape de l’EPR en adoptant directement la quatrième génération vers 2030” affirme Benjamin Dessus, économiste et président de Global Chance. D’autant que les Français avaient théoriquement une longueur d’avance dans cette technologie, car ces réacteurs révolutionnaires ne sont rien moins que des Super-Phenix améliorés. Problème : le surgénérateur a été fermé en 1997 et les équipes ont été dispersées. “Son arrêt a été la condition de la participation des Verts au gouvernement de Lionel Jospin. Quant à ses problèmes techniques, ils n’étaient pas liés à la filière mais à des erreurs de conception et de construction”, assure Pierre Zaleski.

Au CEA, deux équipes travaillent sur des projets de réacteurs à neutrons rapides. “Nous prévoyons de mettre au point un prototype en 2020 pour lancer une série vers 2040” explique Philippe Pradel,
le directeur de l’énergie nucléaire, en avouant aussitôt “qu’il sera difficile d’y arriver”. (…)

Les pylônes de la discorde
Le site de Flamanville, qui compte déjà deux centrales nucléaires d’ancienne génération, ne pourra fonctionner qu’aux deux tiers de sa puissance sans la construction d’une nouvelle ligne à très haute tension de 400 000 volts, d’environ 150 kilomètres de long en direction du sud. Car le réseau actuel du Nord-Cotentin ne pourra supporter l’accroissement de la production provoqué par la mise en service de l’EPR sans risques de panne d’électricité à grande échelle. Ce chantier pharaonique nécessiterait, selon RTE, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, 300 pylônes de 45 à 65 mètres de haut positionnés tous les 500 mètres, pour un coût global de 200 millions d’euros. Problème : les 5 départements et les 30 communes concernées par le projet ne veulent pas entendre parler des pylônes et réclament l’enfouissement de la ligne. Or, pour des raisons techniques, aucun pays au monde n’a enfoui une ligne à haute tension sur une distance aussi longue (le record est de 40 kilomètres au Japon) et le coût d’un tel projet est exorbitant : 6 millions d’euros par kilomètre ! Trouver un accord d’ici à la fin de l’année entre les 800 acteurs de la concertation, selon le calendrier prévu, relève de la gageure.

Béatrice Mathieu
Paru dans L’expansion (n° 722 - septembre 2007)



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