6 mai 2024
Alors que les zones nucléaires sont censées être parfaitement étanches pour éviter la dispersion de radioactivité dans l’environnement, à la centrale du Tricastin (Rhône-Alpes), EDF a découvert une voie de communication entre un bâtiment nucléaire et une galerie souterraine. Celle-ci n’étant pas supposée recevoir de radioactivité, elle n’était pas surveillée comme doit l’être une zone nucléaire.
Crédit photo : André Paris
On ne sait ni de quel bâtiment nucléaire il s’agit (bâtiment réacteur, combustible, etc. ?) ni de quelle galerie, ni de quand date la découverte d’EDF. L’annonce se résume à 5 lignes. Elle a été faite le 6 mai 2024, soit 2 mois après qu’EDF ait déclarés les faits aux autorités. L’industriel y parle d’une "anomalie permettant la communication entre un bâtiment classé zone nucléaire et une galerie, située en dessous, classée zone conventionnelle". Quelle type d’anomalie, depuis quand était-elle là, qu’est-ce qui l’a causée, à quelle occasion a-t-elle été détectée ? Autant de questions qui ne trouvent pas de réponse dans le bulletin d’information du public rédigé par l’exploitant nucléaire.
On comprend toutefois qu’il y avait une perte d’étanchéité entre une zone nucléaire et une zone qui n’était pas censée recevoir de la radioactivité. Que l’anomalie n’était pas minime puisque qu’il a fallu "obturer la zone". On comprend aussi que la galerie sous le bâtiment communiquait avec l’environnement. Et que n’étant pas destinée à recevoir de radioactivité elle n’était certainement pas dotée d’un revêtement étanche. EDF mentionne avoir vérifié a posteriori l’impact sur l’environnement et le respect des limites de rejets dans l’environnement qui lui sont imposées. Sans préciser toutefois quels critères il a vérifié (quelles limites de quelles substances ?) ni comment il a contrôlé l’impact environnemental de possibles rejets radioactifs par cette voie de rejet non-autorisée (analyse d’eau et des sols au droit de la galerie ? ou simple vérification des registres compilant les mesures faites pour surveiller ce qui sort des points de rejets autorisés ?).
Le principe même et toute l’organisation d’une centrale nucléaire est basée sur des délimitations de zones (nucléaire / non nucléaire). Le but est d’éviter autant que possible que des radioéléments ne passent à l’extérieur et contaminent des personnes ou l’environnement. On comprend donc mal comment une voie de communication pouvait exister entre un bâtiment contenant de la radioactivité et une galerie souterraine sans que celle-ci ne soit connue et identifiée. Cette perte de confinement est-elle due à la conception même de l’installation (qui fonctionne depuis plus de 40 ans), au délabrement du bâtiment, à des travaux qui auraient généré des dommages collatéraux ?
Le communiqué de l’industriel ne donne aucune réponse à ces questions. Le public restera donc sans explication. Mais la survenue de cet évènement significatif pour l’environnement [1] démontre que le confinement de la radioactivité, le principe qui régit l’organisation de la centrale nucléaire, n’est pas respecté. Avec lui, c’est la protection des personnes et de l’environnement qui est mise en jeu par l’exploitant. Quand EDF ne prête pas suffisamment d’attention à l’entretien de ses bâtiments, il prend le risque de provoquer une contamination radiologique. Et possiblement d’ignorer totalement cette contamination puisque ces points de rejets n’étant pas censés exister, ils ne sont pas surveillés. Il sera de fait impossible pour l’industriel d’agir de manière réactive, il ne pourra que constater la pollution après-coup, trop tard donc. Malgré ses 5 lignes, le communiqué de l’exploitant nucléaire en dit long sur sa manière de gérer et sur les problèmes que son manquements génèrent.
L.B.
Evénements significatifs de mars 2024
Publié le 06/05/2024
5 mars 2024, événement significatif environnement
Lors d’une visite de contrôle, une anomalie permettant la communication entre un bâtiment classé zone nucléaire et une galerie, située en dessous, classée zone conventionnelle est identifiée. Cela n’a eu aucun impact sur l’environnement. La zone a été obturée immédiatement et des travaux sont engagés permettant de restaurer l’intégrité du confinement entre les deux zones. A la suite de la détection de cet écart, des vérifications ont été réalisées démontrant l’absence d’impact sur l’environnement et le respect des limites de rejets associées. Cette situation a fait l’objet d’une déclaration d’un événement significatif pour l’environnement à l’Autorité de sûreté nucléaire le 5 mars 2024.
[1] Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif En dessous des évènements significatifs, il y a les évènements dits « intéressants », et encore en dessous les « signaux faibles ». Un évènement catégorisé « significatif » est donc déjà « en haut de l’échelle » d’importance des évènements