1er juin 2022
Ce n’est que début juin 2022 que les faits sont révélés : le 6 avril, une fuite de produits chimiques est découverte sur la centrale de Golfech (Occitanie). Le réservoir de collecte de ces produits était pourtant neuf. EDF n’a pas poussé ses investigations et n’a vu que 15 jours après que les produits chimiques s’étaient aussi propagés ailleurs dans l’installation. Et dans l’environnement ?
D’après EDF, le site nucléaire a été doté cette année d’un réservoir tout neuf dans lequel sont déversés les produits chimiques utilisés pour développer les radios (les tirs radiographiques sont couramment utilisées comme moyen de contrôler les tuyauteries des réacteurs). Le réservoir est dans une fosse bétonnée. C’est dans cette fosse que le 6 avril 2022, EDF découvre des liquides. Analyses faites, ils ne sont pas radioactifs, mais ils ont la même composition chimique de les produits collectés dans le réservoir. Quelles types de substances ont été trouvées ? En quelle quantité ? Depuis quand étaient-elles là, à quand remonte le dernier contrôle de cette zone ? EDF ne le dit pas.
L’industriel a arrêté d’utiliser le réservoir et le système de collecte qui lui est associé. Il a pompé les liquides présents dans la fosse. Et n’a manifestement pas poussé plus loin ses recherches. Ou alors il a pris beaucoup de temps pour le faire car ce n’est que 2 semaines plus tard, le 21 avril, que des liquides similaires sont découverts à un autre endroit, un espace accolé à la fosse en béton. Quel est cet endroit, à quoi sert-il ? Quelles quantité d’effluents y ont été retrouvées ? Là encore, EDF ne le dit pas.
On ne sait pas au total combien de temps a duré la fuite. On ne sait pas d’où vient la fuite (du réservoir, de la fosse, du réseau de collecte ?) ni jusqu’où elle est allée. Depuis qu’EDF a pompé les produits chimiques retrouvés dans la zone accolée à la fosse, plus rien n’y est apparu. Mais quelque part, quelque chose n’est pas étanche. EDF n’a pas été capable de confiner des produits dangereux utilisé dans son installation, ce qui lui incombe pourtant : c’est une obligation en matière de protection de l’environnement.
L’industriel poursuit ses investigations. Les systèmes qui contrôlent la présence de pollution dans les eaux sous le site nucléaire n’ont, pour l’instant, pas détecté d’évolution particulière. Mais l’infiltration d’une pollution dans le sol peut prendre du temps et les eaux être contaminées à retardement, bien après l’incident. Les substances chimiques peuvent aussi avoir rejoint la nappe phréatique et y s’être diluées au point que leurs concentration soient passées sous les seuils de détection des systèmes de mesures. L’absence d’évolution des paramètres physico-chimiques des eaux souterraines ne veut pas dire absence de pollution. Elle peut ne pas avoir été détectée, ou ne pas encore avoir atteint le milieu aquatique.
Sachant que le réservoir a été changé cette année, on aurait pu penser que l’étanchéité de l’ensemble du système (réseau de collecte, réservoir, fosse de rétention en cas de fuite) aurait été vérifiée. On aurait aussi pu penser qu’en découvrant des produits chimiques dans une fosse de rétention, EDF aurait aussitôt lancé des recherches approfondies et exhaustives pour identifier quel chemin ces produits avaient suivi, découvrir les zones de fuites et détecter d’éventuelles infiltrations ou d’autres zones où ces produits dangereux se seraient accumulés. Manifestement, la protection de l’environnement n’est pas la priorité de l’exploitant. Dans cet affaire, EDF n’a montré ni la qualité d’intervention, ni la profondeur d’analyse ni la réactivité exigée d’un industriel qui utilise nombre de produits dangereux, chimiques et radioactifs, dans son installation. EDF s’est contenté de déclarer début mai aux autorités un évènement significatif pour l’environnement [1] . Et dans son communiqué adressé au public, il a écarté toutes les données qui permettraient de caractériser de la fuite (quantité, type de produits etc.) et de se faire une idée de son possible impact sur le milieu naturel (localisation des infiltration, type de revêtement, dates des mesures dans l’eau, dispositifs de surveillance environnementale mis en place etc.).
Les événements significatifs déclarés à l’ASN en mai 2022
Publié le 01/06/2022
Environnement
La centrale nucléaire EDF de Golfech dispose, depuis cette année, d’un nouveau réservoir de collecte des effluents chimiques non radioactifs utilisés pour le développement des films radiographiques [2] Ce réservoir est positionné dans une fosse en béton sur la partie industrielle de la centrale.
Le 6 avril, des effluents ont été observés au fond de la fosse. Ils ont été immédiatement analysés par les équipes chimie de la centrale pour connaître leur nature. Les résultats des analyses ont montré la présence de substances chimiques semblables à celles figurant dans les effluents chimiques non radioactifs utilisés pour le développement des films radiographiques.
Le pompage des effluents présents dans la fosse a été effectué. L’utilisation du réservoir et du réseau de collecte a été suspendue.
Le 21 avril, des effluents chimiques non radioactifs ont été observés dans un dispositif connexe à la fosse en béton. Le pompage des effluents présents dans ce dispositif a été réalisé. Depuis ce pompage, il n’est plus identifié d’effluents dans la fosse en béton.
Des investigations techniques ont été menées et sont toujours en cours pour identifier l’origine de ces effluents, et confirmer l’étanchéité totale du réservoir et du réseau de collecte. L’analyse des piézomètres [3] à proximité du réservoir n’a pas révélé d’évolution des paramètres physico-chimiques.
Cet événement significatif environnement (ESE) a fait l’objet d’une déclaration à l’Autorité de sûreté nucléaire le 5 mai 2022.
[1] Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif
[2] Des films radiographiques sont utilisés pour la réalisation de tir radiographique ; technique de contrôle non destructif
[3] Forage qui permet le contrôle des eaux souterraines présentes dans la nappe phréatique
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