20 mars 2023
Abandonnés à la merci des flammes, les vieux labos de Fontenay-aux-Roses (Île-de-France). Le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) les a laissé sans surveillance, sans moyen de détecter un incendie et sans système d’alarme. Les différents problèmes cumulés dans ces laboratoires retraités où étaient conduites des expériences sur le plutonium démontrent un total manque de suivi. Du Commissariat mais aussi du gendarme du nucléaire.
C’est qu’en peu de temps, plusieurs déclarations ont été faites par le CEA à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Toutes sur le même bâtiment et toutes sur le risque d’incendie. Le CEA laisse manifestement les vieux labos qu’il a mis à la retraite il y a plus d’une quinzaine d’années [1] , à l’abandon. Et ne semble pas vraiment s’en soucier. Pourtant, ce n’est pas parce qu’ils sont retraités de leurs activités nucléaires qu’il ne se passe plus rien dans ces anciens labos. Ils sont en cours de démantèlement et des travailleurs y viennent régulièrement.
Le Commissariat a déclaré aux autorités mi janvier 2023 qu’il avait laissé, depuis au moins 5 ans, les détecteurs et les alarmes des cellules blindées sans aucun entretien et sans en vérifier le fonctionnement. Mauvaise organisation du contrôle et manque d’accessibilité des sondes argue-t-il. C’est peu dire, puisque sur 9 cellules, une seule avait une sonde de détection incendie accessible. Elle n’a pour autant pas été contrôlée (voir notre article à ce sujet). Le CEA avait-il tout simplement "oublié" qu’il devait faire régulièrement ces contrôles pourtant obligatoires ? Pour la maîtrise d’un risque majeur dans une installation nucléaire, le Commissariat repassera. Quant à la "police" du nucléaire, elle non plus, durant 5 as, n’a rien vu. L’ASN est pourtant censée s’assurer que les responsables des installations respectent les règles qu’elle leur a fixées.
Àux cellules à la merci d’un incendie sont venus s’ajouter d’autres découvertes. La centrale qui reçoit les signaux des détecteurs de feu et qui les transmet au poste de commandement sécurité, celle qui détecte et donne l’alarme donc, est restée hors-service durant près de 24 heures, entre le 28 février et le 1er mars 2023. Des cartes électroniques défaillantes. Cette même centrale incendie avait déjà eu le même problème un mois avant.
Le CEA a mis en route en 2022 le remplacement de l’équipement. Comme pour démanteler ses anciennes installation, le CEA prend manifestement son temps. Le "plan d’action" qu’il a mis en œuvre ne semble pas si efficace que ça. Et la surveillance exercée par le Commissariat sur ses dispositifs de protection contre les incendies pas assez rapprochée. L’ASN dit qu’elle va suivre les opérations et qu’elle sera "attentive à l’identification des défaillances ayant conduit à cet évènement et aux actions curatives mises en place". Il serait temps !
L.B.
Indisponibilité de la détection incendie des laboratoires du bâtiment 18
Publié le 20/03/2023
Procédé Installation de recherche en démantèlement - CEA
Le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), exploitant de l’INB n° 165 à Fontenay-aux-Roses, dénommée « PROCÉDÉ », a déclaré le 3 mars 2023 à l’ASN un événement significatif pour la sûreté, relatif à l’indisponibilité de la détection incendie des laboratoires du bâtiment 18 de l’INB n° 165.
L’installation PROCÉDÉ était un laboratoire dont les activités portaient sur la chimie du plutonium et sur l’étude des combustibles nucléaires à base de plutonium ; elle est aujourd’hui en démantèlement, comme la plupart des installations nucléaires de base du CEA sur le site de Fontenay-aux-Roses. C’est notamment le cas du bâtiment 18, qui hébergeait auparavant des activités expérimentales. Afin de maitriser le risque incendie, ce bâtiment est équipé de dispositifs de détection automatique incendie reportés vers une centrale incendie.
Le 1er mars 2023 vers 9h, un contrôle visuel de la centrale incendie des laboratoires du bâtiment 18 a détecté l’apparition de deux dérangements sur cette centrale. L’analyse a permis de constater que les détections automatiques d’incendie des laboratoires n’étaient plus opérationnelles depuis le 28 février à 23h. La cause identifiée durant l’intervention était la défaillance d’une des cartes électroniques de la centrale incendie à laquelle sont connectés les relais communiquant avec les détecteurs automatiques. Après intervention de l’équipe de maintenance dans la journée du 1er mars 2023, la centrale était à nouveau opérationnelle à 18h.
Cette centrale avait fait l’objet d’un événement similaire le 29 janvier 2023, concernant un défaut de communication des remontées d’alarmes entre la centrale et le PC sécurité de l’installation. Des interventions du fournisseur sur le système ont permis à ce stade d’identifier des défauts sur des cartes électroniques, qui font l’objet d’un plan d’actions.
Un évènement distinct, mais concernant également la maîtrise du risque incendie, relatif à l’absence de réalisation du contrôle périodique de sondes de températures dans le même bâtiment, avait été déclaré le 16 janvier 2023.
Cet événement n’a pas eu d’incidence sur les personnes et l’environnement. Toutefois, en raison de la répétition de défaillances portant sur un équipement participant à la maîtrise du risque d’incendie et importants pour la sûreté, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).
Le CEA a engagé un programme de remplacement de la centrale incendie concernée en 2022. L’ASN suit l’avancement de ces opérations et sera attentive à l’identification des défaillances ayant conduit à cet événement et aux actions curatives qui seront mises en place.
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Publié le 13/03/2023
Procédé Installation de recherche en démantèlement - CEA
Absence de réalisation du contrôle périodique des sondes de température de la chaine blindée PROLIXE
Le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), exploitant de l’INB (installation nucléaire de base) n° 165 à Fontenay-aux-Roses, dénommée « PROCÉDÉ », a déclaré le 16 janvier 2023 à l’ASN un événement significatif pour la sûreté, relatif à l’absence de réalisation du contrôle périodique des sondes de température de la chaine blindée PROLIXE de l’INB n° 165.
[1] Le démantèlement des deux installations Procédé et Support, qui constituent respectivement l’INB 165 et l’INB 166, a été autorisé par deux décrets du 30 juin 2006. La durée initiale prévue pour les opérations de démantèlement était d’une dizaine d’années. Le CEA a informé l’ASN que, en raison de fortes présomptions de contamination radioactive sous un des bâtiments, de difficultés imprévues et d’un changement de la stratégie globale de démantèlement des centres civils du CEA, la durée des opérations de démantèlement devait être prolongée et que le plan de démantèlement serait modifié. Le CEA a déposé, en juin 2015, une demande de modification des échéances prescrites pour ces démantèlements. https://www.asn.fr/tout-sur-l-asn/l-asn-en-region/ile-de-france/procede