8 octobre 2019
De multiples défaillances organisationnelles ont causé des rejets radioactifs dans l’air au Bugey (Ain), à 2 reprises en septembre 2019. Des travaux faits là où sont traités les déchets nucléaires produits par la centrale et le manque de réaction d’EDF suite au premier rejet sont à l’origine de l’évènement.
Été 2019, des travaux sont prévus dans la zone où sont traités et conditionnés les déchets nucléaires produits par l’installation (bâtiment des auxiliaire nucléaire). Même s’ils sont dits "faiblement" radioactifs, les radionucléides peuvent contaminer l’air ambiant. L’atmosphère de ces locaux est donc censée être filtrée avant que l’air ne soit rejeté dans l’environnement par une cheminée. Ce filtre avant rejet est imposé par une décision de l’Autorité nucléaire, qui a également défini des "seuils" de rejet, c’est-à-dire des quantités maximales de radionucléides à ne pas dépasser.
L’entreprise a le droit de polluer, mais jusqu’à une certaine limite. Or, cette limite a été dépassée 2 fois pour le Cobalt 60, un élément radioactif artificiel, créé par l’irradiation des métaux du circuit primaire, qui émet des rayons durant plus de 5 ans. Durant la 1ère et la 3ème semaine de septembre. Lors des travaux de l’été, aucun filtre n’a été posé dans la cheminée de rejets. Et lors du 1er dépassement du seuil maximal autorisé la 1ère semaine de septembre, EDF ne s’est tout simplement pas questionné sur l’origine de ce dépassement, et a continué l’exploitation de son usine comme si de rien n’était. Résultat : les rejets radioactifs ont continué sans être filtrés, et les seuils autorisés ont de nouveau été dépassés. L’ASN a mené une inspection réactive, l’atelier de traitement des déchets a été arrêté, des prélèvements sur l’eau et la végétation aux alentours du site sont en cours d’analyse. Même si l’ASN argue que les quantités de Cobalt 60 rejetées sont faibles, EDF a, par son manque de rigueur, d’organisation et de suivi, violé plusieurs règles censées régir le fonctionnement de son usine et, par 2 fois, pollué l’environnement alors que cela aurait pu être évité.
Courant septembre EDF découvrait aussi qu’un de ses équipements essentiels, le moteur diesel qui prend le relai en cas de coupure électrique pour permettre aux circuits élémentaires de continuer à fonctionner, n’aurait pas pu produire assez de courant... suite à un entretien mal fait dudit équipement. L’erreur là aussi est restée inaperçue : durant 1 mois le site nucléaire a fonctionné - sans le savoir ! - avec une source électrique de secours en moins, ce qui est aussi une violation du règlement établi par l’ASN. Là encore, à l’origine : le manque de rigueur de l’exploitant. Cette fois-ci, il ne s’est même pas rendu compte que ses interventions avaient générées des problèmes. Cela étant, lorsque EDF s’est rendu compte du surplus des rejets radioactifs dans l’air, il n’a pas pour autant initié quoique ce soit pour revenir à une situation conforme. Le manque de rigueur de l’exploitant se fait donc sentir à tous les niveaux : à l’origine des incidents, mais aussi dans leur traitement.
L.B.
Modification d’une ventilation ayant conduit à deux dépassements des seuils de rejets radioactifs gazeux autorisés par l’ASN
Publié le 10/10/2019
Centrale nucléaire du Bugey - Réacteurs de 900 MWe - EDF
Le 1er octobre 2019, EDF a déclaré un événement significatif relatif à la détection de deux dépassements des seuils relatifs au cobalt 60 [1], fixés par l’ASN pour les rejets de la centrale nucléaire du Bugey.
Les relevés hebdomadaires des filtres de surveillance des rejets de la ventilation de la zone dite de « stockage des déchets faiblement contaminés » (SFC), située dans le bâtiment des auxiliaires nucléaires généraux (BANG), ont mis en évidence le dépassement des seuils relatifs au cobalt 60, durant la première et la troisième semaine du mois de septembre 2019. Or, la décision de l’ASN n° 2014-DC-0443 dispose que « les circuits d’extraction de la ventilation [du BANG] ne mettent pas en évidence d’activité volumique bêta globale d’origine artificielle supérieure à celle naturellement présente dans l’air ambiant ».
L’ASN a conduit une inspection réactive le 3 octobre 2019 portant sur l’origine de ces dépassements (voir plus bas pour télécharger le rapport de l’inspection).
Dans le courant de l’été 2019, EDF a modifié la zone SFC pour améliorer les opérations de réception, de traitement et de conditionnement des déchets. Cette modification a été réalisée sans mise en place de système de filtration de la ventilation d’ambiance de la zone concernée alors que certaines activités potentiellement contaminantes y étaient menées. La décision de l’ASN n° 2014-DC-0442 prévoit pourtant que les effluents gazeux provenant du BANG, susceptibles d’être radioactifs, doivent être filtrés avant leur rejet. Cette absence de filtration serait à l’origine de l’événement. L’atelier concerné a été mis à l’arrêt dès la découverte de l’événement.
En outre, la mise en évidence de la présence de cobalt 60 par la surveillance hebdomadaire, lors de la première semaine de septembre, n’a pas fait l’objet d’un traitement suffisant. Elle n’a pas conduit EDF à mener les investigations nécessaires à la recherche de son origine, ce qui aurait permis d’éviter l’occurrence du second rejet la troisième semaine de septembre.
L’activité radiologique rejetée est restée très faible. Les appareils de surveillance de l’environnement implantés sur et autour du site n’ont détecté aucune élévation de la radioactivité. Les prélèvements d’eau et de végétaux réalisés mensuellement autour du site sont en cours d’analyse. L’atelier concerné sera maintenu à l’arrêt jusqu’à la mise en place d’un système de filtration conforme.
Néanmoins, en raison du dépassement, à deux reprises, d’un seuil fixé par la décision de l’ASN encadrant les rejets du site, et de la mise en évidence de plusieurs défaillances organisationnelles, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES.
En savoir plus :
Décision n° 2014-DC-0443 de l’Autorité de sûreté nucléaire du 15 juillet 2014 fixant les limites de rejets dans l’environnement des effluents liquides et gazeux des installations nucléaires de base n° 45, 78, 89 et 173 exploitées par Électricité de France – Société Anonyme (EDF-SA) dans la commune de Saint-Vulbas (département de l’Ain)
Décision n° 2014-DC-0442 de l’Autorité de sûreté nucléaire du 15 juillet 2014 fixant les prescriptions relatives aux modalités de prélèvement et de consommation d’eau et de rejets dans l’environnement des effluents liquides et gazeux des installations nucléaires de base n°45, n°78, n°89 et n°173 exploitées par Électricité de France – Société Anonyme (EDF-SA) dans la commune de Saint-Vulbas (département de l’Ain) [en attente d’homologation de la décision n° 2014-DC-0443]
Anomalie sur la ventilation d’un local de découpe de déchets
Publié le 08/10/2019
Le 27 septembre 2019, lors des analyses hebdomadaires effectuées sur le système d’extraction de la ventilation d’un local de conditionnement de déchets très faiblement radioactifs dans un bâtiment auxiliaire (Bâtiment des Auxiliaires Nucléaires Généraux), la présence de substance radioactive artificielle (Cobalt 60 [2]) est détectée.
Les mesures relevées sont 10 fois inférieures aux seuils fixés par la réglementation applicable à la centrale de Bugey et le contrôle quotidien de l’activité au niveau des balises de surveillance de l’environnement a confirmé l’absence de variation de la radioactivité ambiante à l’extérieur du site. Ce dégagement n’a eu aucune conséquence sur les intervenants, l’environnement et la population.
Par mesure conservatoire, les activités de découpe de déchets dans le local ont été suspendues, le temps de la caractérisation de cet événement et de la recherche des causes précises.
L’analyse des causes met en évidence une anomalie dans la conception du système de ventilation du local qui avait fait l’objet de modifications récentes, et un défaut de surveillance qui n’a pas permis de détecter immédiatement cette situation.
Un événement significatif sûreté de niveau 1 sur l’échelle INES est déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire le 7 octobre 2019 par la Direction de la centrale nucléaire de Bugey.
[1] Le cobalt 60 est un produit d’activation neutronique notamment formé à partir des matériaux de structure des réacteurs nucléaires. Sa période radioactive est de 5,27 ans.
[2] le cobalt60 est un radionucléide produit à partir de l’activation neutronique du cobalt stable. On en trouve en faible quantité dans le circuit primaire d’une centrale nucléaire.