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Nos communiqués de presse

Crédit photo : Schoella - Wikimedia Commons - CC BY 3.0

Très cher EPR, ne démarre pas !

Communiqué du 20 mars 2024



La consultation de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) pour la mise en service de l’EPR de Flamanville pourrait être ouverte d’ici au 23 mars [1]. 12 ans après la date annoncée initialement par EDF pour sa mise en service et alors que la date butoir du 10 avril pourrait bien être repoussée une nouvelle fois [2], nous continuons à nous y opposer. Ce projet est dangereux et ne doit pas démarrer.

Falsifications, manquements et malfaçons : un danger pour la population

Le 29 février dernier, l’ASN publie un rapport sur le suivi et la réalisation de contrôles sur 12 soupapes de l’ensemble chaudière [3] ayant fait l’objet de réparations. Elle y fait le constat que Framatome, fabriquant de ces soupapes, a manqué à plusieurs égards à la surveillance du contrôle de ces pièces, pourtant fondamentales pour la sûreté. Pas de surveillance sur le terrain par l’entreprise Framatome des contrôles effectués par EDF alors qu’elle y est obligée, manque de traçabilité des contrôles qui met en doute le fait qu’ils aient effectivement été réalisés... Framatome était tenue par l’ASN de fournir des réponses au 11 mars, mais ont-elles été fournies ? Si c’est le cas, ont-elles été jugées suffisantes ?

Le chantier de l’EPR n’a eu de cesse de présenter ce genre de problèmes : défauts de fabrication du couvercle et du fond de cuve du réacteur, bétons mal coulés, soudures mal réalisées, pièces mal montées... la longue liste de malfaçons et de falsifications a par ailleurs depuis été complétée par les révélations de l’ASN lors de ses voeux à la presse : quarante-trois cas de suspicions de fraudes ou d’irrégularités dans l’industrie du nucléaire ont été enregistrés par l’ASN, dont trois ont fait l’objet d’une saisine de la justice en 2023 sur 10 au total portées devant les tribunaux. Un de ces cas concernerait l’EPR de Flamanville, et en particulier peut-être certaines de ses soupapes ou de ses vannes [4].

Mais alors qu’il serait inconcevable de laisser démarrer une voiture présentant des défauts pouvant faire courir un risque à son ou sa propriétaire et aux autres usager·es de la route, cela ne semble aujourd’hui pas entraver l’avancée des procédures pouvant permettre, à terme, la mise en service d’une installation hautement plus dangereuse.

Un dossier aux lacunes atterrantes... et dangereuses

Du 5 juin au 15 septembre 2023 [5] il a été demandé au public de s’exprimer sur le dossier de demande de mise en service remis par EDF à l’ASN. Le dossier fait 13 000 pages et il est fait de telle manière qu’on en vient à se demander si l’idée est réellement de permettre de le consulter. La situation est hélas terriblement classique et on se demande toujours comment EDF ou le gouvernement peuvent évoquer la "participation du public" sans en rire.

Mais le dossier contient surtout des lacunes révélatrices de nouveaux enjeux pour la sûreté nucléaire. L’étude d’impact, dont la version intiale date de 2006, a bien été mise à jour, mais en 2021. Elle ne tient donc pas compte des trois dernières années. Rien n’y indique que les récents ratés des réacteurs EPR de Taishan et d’Olkiluoto aient été pris en compte par EDF malgré les tentatives du groupe d’être rassurant. Rien n’indique non plus que le phénomène de corrosion sous contrainte, censé être impossible étant donné les choix de conception d’EDF, épargnera l’EPR. Car cette corrosion a touché très sévèrement les réacteurs nucléaires de 1450 MW. Ceux-là même qui ont servi de modèle au réacteur EPR.

Les raisons d’un empressement défiant toute logique

Mais pourquoi alors persister à envisager la mise en service de l’EPR de Flamanville ? Depuis le discours de Belfort en 2022, les gouvernements d’Emmanuel Macron n’ont eu de cesse de promouvoir la relance du nucléaire en France, mais aussi à l’international. A la clé : l’espérance de contrats avec quelques pays dont les dirigeants veulent faire croire que les EPR2, un modèle plus récent et une version simplifiée de l’EPR, leur permettront de diminuer leurs émissions de CO2, et cela avec la bénédiction de la Commission européenne.

Mais le planning de construction des EPR2 en France, exigé par le pouvoir politique de manière hors-sol, est très serré, à tel point qu’il est déjà débordé par la réalité industrielle.

Or, pour pouvoir construire et donc vendre des EPR2, EDF doit d’abord démontrer que son EPR français peut fonctionner et que l’exploitant est venu à bout de ce chantier catastrophique [6].

L’empressement à démarrer l’EPR de Flamanville alors même qu’il accumule 12 ans de retard, de nombreuses malfaçons, beaucoup d’incertitudes, et alors qu’il faudrait changer le couvercle de sa cuve après un cycle complet de 18 mois de fonctionnement sans interruption (et par là, créer un nouveau déchet radioactif) prend alors tout son sens. Mais entre faire démarrer à tout prix un réacteur dont on ne sait pas s’il ne va pas causer un accident nucléaire tant il est truffé de problèmes et de rafistolages, et accepter d’avoir gaspillé une vingtaine de milliards... EDF est face à un dilemme. Pour nous, cependant, le choix est évident : il ne faut pas faire démarrer l’EPR de Flamanville et arrêter de s’entêter dans cette onéreuse industrie nucléaire.

Le 23 mars, rejoignez-nous à 14h devant l’ASN de Caen pour vous opposer à l’autorisation de mise en service de l’EPR de Flamanville par l’ASN.


Notes

[1Selon l’article L193-19-2 du code de l’environnement, "Les observations et propositions du public, déposées par voie électronique, doivent parvenir à l’autorité publique concernée dans un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours à compter de la mise à disposition. Le projet de décision ne peut être définitivement adopté avant l’expiration d’un délai permettant la prise en considération des observations et propositions déposées par le public. Sauf en cas d’absence d’observations et propositions, ce délai ne peut être inférieur à trois jours à compter de la date de clôture de la consultation".

[2Selon l’article L593-13 du code de l’environnement, "Si une installation nucléaire de base n’est pas mise en service [qui consiste à charger le combustible dans la cuve. C’est à différencier du démarrage de la fission, qui elle devra attendre l’autorisation de divergence] dans le délai fixé par son autorisation de création, il [c’est-à-dire par le ministre qui adopte le décret d’autorisation de création] peut être mis fin à l’autorisation de l’installation, après avis de l’Autorité de sûreté nucléaire". Or, l’actuel ministre de l’industrie a récemment déclaré : "Dans les faits, l’expiration de ce délai est sans conséquence immédiate. "

[3C’est-à-dire la cuve, ou la cuve et le pressuriseur.

[4A la CLI (Commission Locale d’Information) de Flamanville du 23 février, l’ASN est restée très floue à ce sujet sous couvert du secret de l’instruction. Selon des militant·es présent·es, il aurait cependant été question de soupapes ou de vannes.

[6Selon l’ASN, le réacteur EPR2 "a pour objectif d’intégrer le retour d’expérience de conception, de construction et de mise en service des réacteurs EPR." Et les retours sur expérience de Taishan et d’Olkiluoto, s’ils ont bien été fait, ne suffisent pas. Des études sont ainsi en cours pour en améliorer certaines pièces.

La consultation de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) pour la mise en service de l’EPR de Flamanville pourrait être ouverte d’ici au 23 mars [1]. 12 ans après la date annoncée initialement par EDF pour sa mise en service et alors que la date butoir du 10 avril pourrait bien être repoussée une nouvelle fois [2], nous continuons à nous y opposer. Ce projet est dangereux et ne doit pas démarrer.

Falsifications, manquements et malfaçons : un danger pour la population

Le 29 février dernier, l’ASN publie un rapport sur le suivi et la réalisation de contrôles sur 12 soupapes de l’ensemble chaudière [3] ayant fait l’objet de réparations. Elle y fait le constat que Framatome, fabriquant de ces soupapes, a manqué à plusieurs égards à la surveillance du contrôle de ces pièces, pourtant fondamentales pour la sûreté. Pas de surveillance sur le terrain par l’entreprise Framatome des contrôles effectués par EDF alors qu’elle y est obligée, manque de traçabilité des contrôles qui met en doute le fait qu’ils aient effectivement été réalisés... Framatome était tenue par l’ASN de fournir des réponses au 11 mars, mais ont-elles été fournies ? Si c’est le cas, ont-elles été jugées suffisantes ?

Le chantier de l’EPR n’a eu de cesse de présenter ce genre de problèmes : défauts de fabrication du couvercle et du fond de cuve du réacteur, bétons mal coulés, soudures mal réalisées, pièces mal montées... la longue liste de malfaçons et de falsifications a par ailleurs depuis été complétée par les révélations de l’ASN lors de ses voeux à la presse : quarante-trois cas de suspicions de fraudes ou d’irrégularités dans l’industrie du nucléaire ont été enregistrés par l’ASN, dont trois ont fait l’objet d’une saisine de la justice en 2023 sur 10 au total portées devant les tribunaux. Un de ces cas concernerait l’EPR de Flamanville, et en particulier peut-être certaines de ses soupapes ou de ses vannes [4].

Mais alors qu’il serait inconcevable de laisser démarrer une voiture présentant des défauts pouvant faire courir un risque à son ou sa propriétaire et aux autres usager·es de la route, cela ne semble aujourd’hui pas entraver l’avancée des procédures pouvant permettre, à terme, la mise en service d’une installation hautement plus dangereuse.

Un dossier aux lacunes atterrantes... et dangereuses

Du 5 juin au 15 septembre 2023 [5] il a été demandé au public de s’exprimer sur le dossier de demande de mise en service remis par EDF à l’ASN. Le dossier fait 13 000 pages et il est fait de telle manière qu’on en vient à se demander si l’idée est réellement de permettre de le consulter. La situation est hélas terriblement classique et on se demande toujours comment EDF ou le gouvernement peuvent évoquer la "participation du public" sans en rire.

Mais le dossier contient surtout des lacunes révélatrices de nouveaux enjeux pour la sûreté nucléaire. L’étude d’impact, dont la version intiale date de 2006, a bien été mise à jour, mais en 2021. Elle ne tient donc pas compte des trois dernières années. Rien n’y indique que les récents ratés des réacteurs EPR de Taishan et d’Olkiluoto aient été pris en compte par EDF malgré les tentatives du groupe d’être rassurant. Rien n’indique non plus que le phénomène de corrosion sous contrainte, censé être impossible étant donné les choix de conception d’EDF, épargnera l’EPR. Car cette corrosion a touché très sévèrement les réacteurs nucléaires de 1450 MW. Ceux-là même qui ont servi de modèle au réacteur EPR.

Les raisons d’un empressement défiant toute logique

Mais pourquoi alors persister à envisager la mise en service de l’EPR de Flamanville ? Depuis le discours de Belfort en 2022, les gouvernements d’Emmanuel Macron n’ont eu de cesse de promouvoir la relance du nucléaire en France, mais aussi à l’international. A la clé : l’espérance de contrats avec quelques pays dont les dirigeants veulent faire croire que les EPR2, un modèle plus récent et une version simplifiée de l’EPR, leur permettront de diminuer leurs émissions de CO2, et cela avec la bénédiction de la Commission européenne.

Mais le planning de construction des EPR2 en France, exigé par le pouvoir politique de manière hors-sol, est très serré, à tel point qu’il est déjà débordé par la réalité industrielle.

Or, pour pouvoir construire et donc vendre des EPR2, EDF doit d’abord démontrer que son EPR français peut fonctionner et que l’exploitant est venu à bout de ce chantier catastrophique [6].

L’empressement à démarrer l’EPR de Flamanville alors même qu’il accumule 12 ans de retard, de nombreuses malfaçons, beaucoup d’incertitudes, et alors qu’il faudrait changer le couvercle de sa cuve après un cycle complet de 18 mois de fonctionnement sans interruption (et par là, créer un nouveau déchet radioactif) prend alors tout son sens. Mais entre faire démarrer à tout prix un réacteur dont on ne sait pas s’il ne va pas causer un accident nucléaire tant il est truffé de problèmes et de rafistolages, et accepter d’avoir gaspillé une vingtaine de milliards... EDF est face à un dilemme. Pour nous, cependant, le choix est évident : il ne faut pas faire démarrer l’EPR de Flamanville et arrêter de s’entêter dans cette onéreuse industrie nucléaire.

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