Faire un don

Nos actions juridiques

Cinq associations attaquent devant le Conseil d’État l’arrêté ministériel fixant le coût du projet Cigéo


Passées / Installation : Bure


Par complaisance envers EDF, Areva et le CEA, qui souhaitaient provisionner le moins possible pour l’enfouissement de leurs déchets les plus radioactifs, Ségolène Royal a fixé par arrêté le coût de Cigéo à 25 milliards d’euros, un montant largement sous-estimé. 5 associations attaquent cet arrêté devant le Conseil d’État.

 

© Philippe Demail


Coût de Cigéo minimisé : un cadeau à une filière nucléaire en déroute

La décision de la ministre est intervenue en pleine polémique sur le coût de Cigéo, ce projet d’enfouissement à 500 m sous terre des déchets radioactifs les plus dangereux à Bure (en Lorraine-Champagne-Ardenne). Suite à l’action d’associations opposées à l’enfouissement des déchets, l’Autorité de sûreté nucléaire venait de rendre public un avis où elle jugeait optimiste le coût de 34,5 milliards d’euros avancé par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), lui reprochant de ne pas prendre en compte l’intégralité des coûts de Cigéo (voir en annexe les critiques exprimées par l’ASN).

En réponse, EDF, Areva et le CEA ont publié leur propre estimation, d’un montant de 20 milliards d’euros. Embourbés dans d’importantes difficultés financières, ils souhaitent avant tout minimiser les provisions à constituer, pour ne pas grever leurs budgets déjà fragilisés et faire plonger encore plus leurs actifs en bourse. Quelques jours après, le 15 janvier 2016, la ministre « coupait la poire en deux » en fixant par arrêté les coûts à un montant 30% inférieur à celui de l’Andra.

Si le chiffrage de l’Andra est déjà jugé faible par l’ASN, que dire des 25 milliards retenus par Ségolène Royal ? Le coût arrêté par la ministre ne permettra pas de constituer des provisions suffisantes pour faire face aux frais entraînés par la gestion de ces déchets le moment venu. Ce choix aboutira à faire payer par les générations futures les sommes non provisionnées. Déchets ingérables et lourde facture : un bel héritage !

Recours contre un décret illégal

Cet arrêté, qui fixe un coût insuffisant pour l’unique programme de gestion des déchets de haute activité retenu par le gouvernement à ce jour, constitue une infraction à la réglementation européenne. L’article 9 de la directive 2011/70/EURATOM impose en effet aux États-membres de se doter d’un cadre national garantissant que des ressources financières suffisantes seront disponibles le moment venu pour la gestion de leurs déchets.

La méthode apparaît tout aussi choquante : le coût de Cigéo a été arrêté à la suite d’un jeu tripartite entre l’Etat, l’Andra et les exploitants nucléaires. Alors que cette décision emportera des impacts sociétaux et environnementaux majeurs, à aucun moment le public n’a eu son mot à dire dans cette procédure ! La ministre s’est en effet exonérée de la participation du public sur la question cruciale de la fixation des coûts du projet Cigéo, en violation de l’article 10 de la directive Euratom et de l’article 7 de la charte constitutionnelle de l’environnement. Ce déni de démocratie n’est pas une première, comme l’ont montré les nombreuses irrégularités observées lors du débat public de 2013 (lesquelles ont d’ailleurs mené les associations à déposer un recours en 2015).

En réponse à ce cadeau fait aux exploitants, qui impose un lourd héritage aux générations futures, le Réseau "Sortir du nucléaire", les Amis de la Terre, France Nature Environnement, Mirabel Lorraine Nature Environnement, Burestop 55 ont attaqué le 3 mars 2016, devant le Conseil d’État, l’arrêté pris par Ségolène Royal (voir nos écritures, en documents joints).

Le Conseil d’Etat a examiné l’affaire le 19 mars 2018 [1]. La rapporteure publique a conclu au rejet de la requête. La décision a été rendue le 11 avril 2018 : le Conseil d’Etat a décidé de rejeter la requête des associations.

Deux démarches ont été lancées en parallèle : un courrier adressé à Nicolas Hulot pour lui demander de procéder à une réévaluation du coût de Cigéo (voir document joint) et un courrier adressé à la Commission européenne car cette sous-évaluation du coût de la gestion des déchets radioactifs constitue très probablement une aide d’État, illégale donc.

Malheureusement, pour la Commission, l’évaluation à 25 milliards d’euros entre dans la fourchette d’évaluation établie par l’Andra en 2011. Elle précise également que la responsabilité des exploitants nucléaires pour la gestion de leurs déchets radioactifs est sans préjudice de la fixation du coût estimé par arrêté ministériel. Enfin, elle rappelle que l’arrêté ministériel prévoit un mécanisme d’adaptation du coût estimé, a minima aux étapes importantes du projet.

 

Téléchargez la réponse de la Commission européenne
Coût Cigéo - Réponse Commission européenne 29/08/18

 

Téléchargez le courrier adressé à la Commission européenne
Coût Cigéo - Courrier Commission européenne 29/05/18

 

Téléchargez la décision du Conseil d’Etat
Coût Cigéo - Décision CE 11/04/18

Notes

[1Compte-rendu de l’audience du 19/03/18 : Le Conseil d’État a examiné aujourd’hui le recours déposé par le Réseau “Sortir du nucléaire“, France Nature Environnement, MIRABEL-Lorraine Nature Environnement et BureStop55 à l’encontre de l’arrêté ministériel fixant à 25 milliards d’euros le coût de CIGÉO. Pour rappel, cet arrêté avait été adopté alors qu’un chiffrage effectué par l’Andra, d’un montant de 34,5 milliards d’euros, venait d’être rendu public (plus d’informations ici).

Le Conseil d’État rendra sa décision d’ici trois semaines environ, mais d’ores et déjà les conclusions de la rapporteure publique vont dans le sens d’un rejet de la requête.

Celle-ci a certes reconnu l’intérêt à agir des associations, ainsi que le caractère décisoire de l’arrêté ministériel (en ce qu’il servait de base pour la définition des provisions). Cependant, elle a estimé qu’il ne pouvait pas y avoir d’ « erreur manifeste d’appréciation » de la part de l’État dans la mesure où l’Andra aurait apparemment proposé à celui-ci de fixer le coût dans une fourchette allant de 20 à 30 milliards d’euros. Selon elle, il était donc loisible à l’État de choisir un chiffre entre les deux, en effectuant un compromis entre la situation financière des exploitants et le coût pour les générations futures. Elle estime que le coût fixé constitue un « juste équilibre » et insiste sur le fait qu’au regard des nombreuses incertitudes, une réévaluation des coûts aura lieu dans tous les cas.

Les associations ne peuvent évidemment se satisfaire de ce discours.

En premier lieu, l’État n’aurait jamais dû effectuer de compromis en prenant en compte les intérêts financiers à court terme des producteurs de déchets (tel n’était pas le sens de la directive Euratom), mais se focaliser uniquement sur le fait que les ressources disponibles pour la gestion de ces déchets soient disponibles le moment venu. On aboutit ici non à un « coût objectif », mais à un « coût politique ». Un tel choix revient à faire peser un fardeau considérable sur les générations futures.

C’est bien parce que les incertitudes étaient importantes que l’État aurait dû procéder de la manière la plus prudente possible, en retenant le haut de la fourchette proposée, au lieu de « couper la poire en deux » d’une façon pour le moins légère (rappelons que l’Andra avait mis en place une mission de chiffrage du coût du projet qui, à elle seule, coûtait 600 000 € !).

Dans tous les cas, et puisque ce coût est considéré comme « évolutif », les associations estiment que le ministère se doit de procéder en urgence à une réactualisation. Depuis 2016, de nouveaux éléments s’ajoutent qui ne peuvent que faire évoluer le coût du projet à la hausse : recherches complémentaires exigées sur l’ASN sur de nombreux points, nécessité d’une expertise internationale sur les déchets bitumineux… sans compter les critiques émises par la Commission Nationale d’Évaluation (et notamment le choix de taux d’actualisation bien optimistes).

Pour conclure, il est certes compréhensible que le Conseil d’État n’ait pas voulu prendre la responsabilité d’annuler cet arrêté et, ce faisant, de rajouter 2 milliards d’euros au passif d’EDF. Mais il n’est pas exclu que la Commission Européenne se saisisse de la situation, dans la mesure où il s’agirait ici d’une aide d’État déguisée !

Les associations continueront dans tous les cas à mettre sur la place publique la question des coûts cachés du nucléaire et de CIGÉO aussi longtemps que nécessaire.

Coût de Cigéo minimisé : un cadeau à une filière nucléaire en déroute

La décision de la ministre est intervenue en pleine polémique sur le coût de Cigéo, ce projet d’enfouissement à 500 m sous terre des déchets radioactifs les plus dangereux à Bure (en Lorraine-Champagne-Ardenne). Suite à l’action d’associations opposées à l’enfouissement des déchets, l’Autorité de sûreté nucléaire venait de rendre public un avis où elle jugeait optimiste le coût de 34,5 milliards d’euros avancé par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), lui reprochant de ne pas prendre en compte l’intégralité des coûts de Cigéo (voir en annexe les critiques exprimées par l’ASN).

En réponse, EDF, Areva et le CEA ont publié leur propre estimation, d’un montant de 20 milliards d’euros. Embourbés dans d’importantes difficultés financières, ils souhaitent avant tout minimiser les provisions à constituer, pour ne pas grever leurs budgets déjà fragilisés et faire plonger encore plus leurs actifs en bourse. Quelques jours après, le 15 janvier 2016, la ministre « coupait la poire en deux » en fixant par arrêté les coûts à un montant 30% inférieur à celui de l’Andra.

Si le chiffrage de l’Andra est déjà jugé faible par l’ASN, que dire des 25 milliards retenus par Ségolène Royal ? Le coût arrêté par la ministre ne permettra pas de constituer des provisions suffisantes pour faire face aux frais entraînés par la gestion de ces déchets le moment venu. Ce choix aboutira à faire payer par les générations futures les sommes non provisionnées. Déchets ingérables et lourde facture : un bel héritage !

Recours contre un décret illégal

Cet arrêté, qui fixe un coût insuffisant pour l’unique programme de gestion des déchets de haute activité retenu par le gouvernement à ce jour, constitue une infraction à la réglementation européenne. L’article 9 de la directive 2011/70/EURATOM impose en effet aux États-membres de se doter d’un cadre national garantissant que des ressources financières suffisantes seront disponibles le moment venu pour la gestion de leurs déchets.

La méthode apparaît tout aussi choquante : le coût de Cigéo a été arrêté à la suite d’un jeu tripartite entre l’Etat, l’Andra et les exploitants nucléaires. Alors que cette décision emportera des impacts sociétaux et environnementaux majeurs, à aucun moment le public n’a eu son mot à dire dans cette procédure ! La ministre s’est en effet exonérée de la participation du public sur la question cruciale de la fixation des coûts du projet Cigéo, en violation de l’article 10 de la directive Euratom et de l’article 7 de la charte constitutionnelle de l’environnement. Ce déni de démocratie n’est pas une première, comme l’ont montré les nombreuses irrégularités observées lors du débat public de 2013 (lesquelles ont d’ailleurs mené les associations à déposer un recours en 2015).

En réponse à ce cadeau fait aux exploitants, qui impose un lourd héritage aux générations futures, le Réseau "Sortir du nucléaire", les Amis de la Terre, France Nature Environnement, Mirabel Lorraine Nature Environnement, Burestop 55 ont attaqué le 3 mars 2016, devant le Conseil d’État, l’arrêté pris par Ségolène Royal (voir nos écritures, en documents joints).

Le Conseil d’Etat a examiné l’affaire le 19 mars 2018 [1]. La rapporteure publique a conclu au rejet de la requête. La décision a été rendue le 11 avril 2018 : le Conseil d’Etat a décidé de rejeter la requête des associations.

Deux démarches ont été lancées en parallèle : un courrier adressé à Nicolas Hulot pour lui demander de procéder à une réévaluation du coût de Cigéo (voir document joint) et un courrier adressé à la Commission européenne car cette sous-évaluation du coût de la gestion des déchets radioactifs constitue très probablement une aide d’État, illégale donc.

Malheureusement, pour la Commission, l’évaluation à 25 milliards d’euros entre dans la fourchette d’évaluation établie par l’Andra en 2011. Elle précise également que la responsabilité des exploitants nucléaires pour la gestion de leurs déchets radioactifs est sans préjudice de la fixation du coût estimé par arrêté ministériel. Enfin, elle rappelle que l’arrêté ministériel prévoit un mécanisme d’adaptation du coût estimé, a minima aux étapes importantes du projet.

 

Téléchargez la réponse de la Commission européenne
Coût Cigéo - Réponse Commission européenne 29/08/18

 

Téléchargez le courrier adressé à la Commission européenne
Coût Cigéo - Courrier Commission européenne 29/05/18

 

Téléchargez la décision du Conseil d’Etat
Coût Cigéo - Décision CE 11/04/18

  C’est grâce à vos dons que nous les poursuivons !

Nous attaquons chaque fois que nécessaire les industriels du nucléaire, pollueurs et menteurs, afin de lutter contre l'impunité dont ils font l'objet et faire barrage à leurs grands projets inutiles et dangereux. Et nous obtenons des résultats ! Mais cette action nous demande évidemment d’engager des moyens humains et financiers.
Parce que nous souhaitons pouvoir continuer à mener cette guérilla juridique, nous avons besoin de votre soutien !

Faire un don





Thèmes
 Nucléaire et économie  Bure