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Paluel, 29 septembre 2011 : exercice de crise... ou mise en scène ?

1- Paluel, une centrale dont la maintenance est déficiente

Article publié le 9 septembre 2011



Au sein de ce parc nucléaire, le Centre Nucléaire de Production d’Electricité (CNPE) de Paluel comporte 4 unités de production de 1300 MW chacune, soit une puissance totale de 5200 MW. A en croire EDF, cette centrale a une place non négligeable dans le dispositif énergétique français :



« En ayant produit plus de 33 milliards de kWh en 2010 soit environ de 7 % de la production d’électricité française et 35 % de l’énergie consommée dans la région, la centrale nucléaire de Paluel constitue un atout essentiel pour répondre aux besoins de la consommation d’électricité en France. [1] »

La réalité est bien moins honorable qu’EDF le déclare [2]. Depuis plusieurs années, la centrale de Paluel connaît une suite ininterrompue d’incidents divers et variés qui ont entraîné des avis sévères de l’Autorité de sûreté nucléaire, des arrêts des réacteurs et même des prolongations des opérations de rechargement en combustible.

Un article récent du quotidien Mediapart donne à voir les problèmes récurrents que connaît Paluel et plus encore le malaise social qui règne dans la centrale.

« Fuites à répétition, rejets de gaz radioactif, déclenchements de balises d’alertes, contaminations de travailleurs : depuis plus d’un mois, l’une des plus grosses centrales nucléaires françaises, le site de Paluel, en Haute-Normandie, connaît des dysfonctionnements en série. La multiplication des incidents crée un vent de panique chez les agents qui y travaillent, selon des témoignages et des documents exclusifs recueillis par Mediapart. La centrale de Paluel produit, à elle seule, environ 7% de l’électricité nationale. [3] »

Il n’est pas difficile de vérifier ces informations. Le site internet de la centrale publie dans des délais raisonnables les déclarations d’incidents. Ainsi peut-on lire un compte-rendu des récents problèmes survenus en juin dernier :

Note d’information du 23 juin 2011 réactualisée le 26 juin - L’unité de production n°3 de la centrale nucléaire de Paluel a été arrêtée en mars dernier pour recharger le combustible. Elle a été reconnectée au réseau de distribution d’électricité le 19 avril. Elle fonctionne aujourd’hui normalement et à pleine puissance. Dans le cadre de la surveillance permanente de son fonctionnement, le 28 avril 2011, les équipes de conduite ont constaté un défaut d’étanchéité sur l’un des assemblages combustible qui avaient été chargés dans la cuve du réacteur à l’occasion de l’arrêt (193 sont chargés dans un réacteur comme celui de Paluel). Ce défaut n’a aucun impact sur la sûreté des installations et l’environnement, les assemblages combustible étant immergés dans l’eau de la cuve en acier du réacteur, lui-même protégé par le bâtiment en béton hermétiquement fermé. La situation est actuellement suivie et contrôlée en continu par les équipes de conduite et de chimie de Paluel. Des émanations de gaz xénon, issues de la réaction chimique à l’intérieur du combustible, ont en outre été mesurées dans le bâtiment réacteur, elles sont prises en compte dans les dispositifs d’exploitation et de sûreté de la centrale. Un arrêt pour maintenance sur le réacteur n°3 de la centrale de Paluel, du 11 et au 13 juin, a permis de réparer une fuite d’air comprimé sur un équipement à l’intérieur du bâtiment réacteur, identifier et réduire un écoulement d’eau sur deux robinets du circuit primaire (en cas de fuite, l’eau est aussitôt collectée dans des réservoirs prévus spécifiquement). Durant le week-end du 25 au 26 juin, la centrale de Paluel a mis à profit un arrêt du réacteur, réalisé dans un contexte de faible consommation d’électricité due à une météo clémente, pour réparer les robinets concernés. Ces robinets seront remplacés lors d’un prochain arrêt pour maintenance. Durant ces deux opérations (du 11 au 13 comme du 25 au 26 juin), les équipes sont intervenues dans le bâtiment réacteur avec les protections adaptées. Les intervenants ont ensuite passé les examens de radioprotection d’usage qui ont montré qu’aucun d’eux ne présentait de contamination interne [4].

Chaque mot a ici son importance et mérite qu’on s’y attarde. A croire l’exploitant lui-même, nous avons ici affaire à un problème de sécurité puisque la première et la seconde barrière de protection ont cédé entraînant une perte de gaz radioactifs dans l’enceinte du bâtiment réacteur. L’incident fut suffisamment sérieux pour entraîner un arrêt pour maintenance de l’installation nucléaire. Et l’on est en droit de s’étonner de la prudence de l’ASN qui n’a pas voulu déclarer l’incident au prétexte de la prétendue faiblesse des rejets…

Cet événement du mois d’avril est à mettre en regard d’un autre incident lui aussi minoré par l’Autorité de sûreté nucléaire :

Le jeudi 3 mars 2011, en fin de matinée, de légères traces de contamination interne ont été détectées sur un salarié d’une entreprise extérieure. C’est lors des contrôles systématiques réalisés en sortie du bâtiment réacteur que cette contamination a été observée. L’intervenant a été orienté vers le service médical du site. Les premières analyses effectuées révèlent une contamination interne 40 fois inférieure à la limite réglementaire annuelle de 20 mSv.

Il s’agit bel bien d’un problème survenu lors de ce que l’on a coutume d’appeler un arrêt de tranche, c’est-à-dire des opérations de maintenance des réacteurs au cours desquels différents travaux d’entretien sont effectués et une partie du combustible changée. Là nous touchons un problème essentiel mis en cause par l’association de Philippe Billard et les précaires de l’industrie nucléaire [5]. Cette série de problèmes que le réacteur n°3 de Paluel a connue donne à voir une faiblesse essentielle de l’industrie nucléaire aujourd’hui. EDF essaie par tous les moyens d’accroître la disponibilité de ses centrales qui sont à l’arrêt près de trois mois par an [6]. Une telle exigence impose de limiter tant que faire ce peut les arrêts de tranche et de réduire au strict minimum des opérations de maintenance longues et coûteuses.

Pour reprendre le vocabulaire en vogue dans l’industrie nucléaire, on est passé au cours des dernières années du « risque zéro » au « risque maîtrisé ». Et pour hâter les opérations, EDF a largement externalisé les activités de maintenance, préférant employer des sous-traitants corvéables à merci plutôt que des personnels statutaires dont les droits sont strictement garantis par le statut des électriciens-gaziers.

Le réacteur n°3 n’est cependant pas le seul à connaître des problèmes de sûreté. Les autres réacteurs de la centrale de Paluel donnent eux aussi à voir des faiblesses inquiétantes. L’ASN a mis en cause un problème survenu à l’issue des opérations de maintenance sur le réacteur n°2 dans un courrier en date du 30 mai 2011 [7].

Plus généralement il est apparu que les opérations de maintenance sur les réacteurs 1 et 4 n’ont pas été suivies de tests de sûreté pourtant essentiels [8].

Plus largement c’est l’ensemble de la centrale qui présente des insuffisances en regard de la législation en vigueur. Ainsi en novembre 2010, l’ASN a mis en cause des problèmes structurels et le peu d’empressement de l’exploitant pour réaliser des améliorations convaincantes en termes de sûreté [9]. Enfin nous ne saurions passer sous silence la question des anomalies génériques qui touchent l’ensemble des réacteurs français, mises en évidence par le Réseau " Sortir du nucléaire" dès 2003 puis dernièrement en février 2011 concernant la défaillance des circuits de secours [10].


Notes

[1Dossier de presse : La centrale nucléaire de Paluel, au service d’une production d’électricité sûre, compétitive et sans CO2, au cœur de la région de Haute-Normandie, février 2011 : https://energie.edf.com/fichiers/fckeditor/Commun/En_Direct_Centrales/Nucleaire/Centrales/Paluel/Publications/documents/DP_paluel_fevrier%202011.pdf

[3Jade Lindgaard, Nucléaire : incidents en série à la centrale de Paluel, Mediapart 22 juin 2011 : https://www.mediapart.fr/article/offert/c89bb392210922c31aa5db3fd36f4dbe

[5Association Santé sous-traitance Nucléaire-Chimie : https://www.sst-nucleaire-chimie.org/

[6La Direction générale de l’énergie et du climat du ministère de l’industrie est la première à reconnaître cette faiblesse générique du parc électronucléaire français et recommande à l’exploitant dans la programmation pluriannuelle des investissements en électricité 2009 d’améliorer la disponibilité des centrales (p. 49-52) : https://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/ppi_elec_2009.pdf

[7Contrôle des installations nucléaires de base, Inspection n° INSSN-CAE- 2011-0353 des 26 et 27 avril 2011 : A . Demandes d’actions correctives

A.1. Chantier de la GMPP n° 4 dans le local 2 RD 0902 Lors de l’inspection du 26 avril 2011, les inspecteurs ont noté l’absence d’une platine de renfort-cornière métallique du caillebotis entourant le corps du Groupe Moto-Pompe Primaire (GMPP) n° 4 au niveau du local 2 RD 0902. Il a été indiqué que cette platine a été déposé pour permettre aux intervenants de bénéficier de plus d’espace pour effectuer les travaux de maintenance prévus. Une fois le chantier terminé, l’entreprise intervenante a omis de reposer la platine, ce qui peut donner lieu à la chute d’objet étranger dans le corps du GMPP. De plus, l’absence de cette cornière est de nature à créer pour les intervenants, une zone non sécurisée autour du GMPP. Je vous demande de vous assurer que les intervenants remettent les installations en conformité lors du repli des chantiers de maintenance. Vous m’informerez des mesures prisesen ce sens.

https://www.asn.fr/index.php/L-ASN-en-region/Division-de-Caen/Centrales-nucleaires/Centrale-nucleaire-de-Paluel/Lettres-de-suite-d-inspection

[8Contrôle des installations nucléaires de base, Inspection n° INSSN-CAE-2011-0348 du 23 février 2011 :

A.1 Intégration des modifications matérielles

Les inspecteurs ont vérifié par sondage l’intégration de certaines modifications matérielles sur les circuits relatifs à la source froide. Ils ont examiné notamment les résultats des essais faisant suite aux modifications et les modifications documentaires correspondantes.

Concernant la modification PTPA 1186 « Amélioration de la disponibilité des vannes CFI2 » intégrée en 2010 lors des arrêts des réacteurs n° 1 et 4, les inspecteurs ont constaté que le site ne disposait toujours pas des RFI3 produits par les prestataires ayant réalisé cette modification. Ainsi, les agents du site n’ont pas pu présenter aux inspecteurs les preuves de la réalisation d’un test de pression à 12 bars du tronçon de tuyauterie pré-fabriqué ainsi que de la réalisation des contrôles non destructifs sur les soudures.

Par ailleurs, les mises à jour documentaires (notamment la mise à jour des plans) n’ont pas encore été réalisées plusieurs mois après l’intégration de ces modifications.

L’article 10 de l’arrêté qualité du 10 août 1984 stipule que « l’exploitant prend ou fait prendre toutes dispositions utiles pour que les documents nécessaires à l’appréciation de la qualité, y compris ceux décrivant l’installation même, soient archivés pendant une durée appropriée, protégés, conservés dans de bonnes conditions et aisément accessibles. »

A.1-1 Je vous demande de renforcer votre processus d’intégration des modifications matérielles afin que les documents nécessaires à l’appréciation de la qualité des interventions soient archivés dans des délais appropriés. Vous veillerez également au fait que les mises à jour documentaires nécessaires, à la suite de l’intégration d’une modification matérielle, soient réalisées dans un délai maximal qu’il vous appartient de fixer.

Par ailleurs, pour le cas de la modification matérielle PTPA 1186 intégrée en 2010 sur les réacteurs n° 1 et 4, vous me transmettrez les documents justifiant de la réalisation d’un test en pression sur le tronçon préfabriqué et de la réalisation de contrôles non destructifs sur les soudures du tronçon préfabriqué et des soudures réalisées in situ.

Concernant la modification ILPA 0683 « Mesure de niveau d’eau aval des tambours filtrants et augmentation du seuil ΔPmax4 » », cette modification a été intégrée partiellement sur les quatre réacteurs et est aujourd’hui opérationnelle uniquement sur le réacteur n° 3. Par courrier T-SF-10 0060 du 24 février 2010, EDF a transmis l’indice C de la note d’information deuxième stade de cette modification, prenant en compte le retour d’expérience (REX) d’exploitation de cette modification.

Certaines fiches d’analyse de résultats d’exécution des essais (FAREE) consultées ne classent pas ce critère comme un critère de sûreté. Par ailleurs, certaines procédures laissent apparaître des dépassements de ce critère.

A.1-2 Je vous demande de justifier le classement retenu de ce critère. Vous me transmettrez les justifications associées sur l’acceptabilité des essais réalisés vis-à-vis de ce critère sur les quatre réacteurs du site.

A.1-3 Je vous demande de renforcer votre processus d’intégration des modifications matérielles afin de vous assurer que l’ensemble des mises à jour documentaires nécessaires sont effectivement réalisées. Vous m’informerez des actions correctives qui seront mises en œuvre et/ou des justifications pour vous assurer que l’ensemble des mises à jours documentaires requises par la modification matérielle ILPA 0683 sont et/ou seront bien intégrées.

[9Contrôle des installations nucléaires de base, Inspection n° INS-2010-EDFPAL-0019 du 23 novembre 2010 :

Les inspecteurs ont examiné la mise en oeuvre du PBMP2 PB-1300-AM-121-03-00 et notamment les visites effectuées sur les cheminées de ventilation du Bâtiment des Auxiliaires Nucléaires (BAN). Ils ont constaté que la visite complète prescrite a été réalisé en 2006. Les défauts relevés sur les fixations des crinolines de la cheminée du réacteur n° 2 ont fait l’objet de l’ADN 06-0047 qui conclut à un risque sécurité important et à un risque potentiel sur la sûreté en cas de chute de cette crinoline.

Ainsi, une réparation des défauts a été préconisée avant le prochain arrêt de réacteur. Il semble que les défauts n’ont pas été réparés plus de quatre ans après la visite complète. Par ailleurs, la visite partielle initialement prévue fin 2009 sur ces matériels n’a toujours pas été réalisée. Enfin, une fiche d’écart a été ouverte en 2009 sur le sujet et prévoyait la réalisation de deux visites intermédiaires avant la réalisation de la visite partielle prévue fin 2009. Pour autant, il semble qu’aucune visite intermédiaire n’a été réalisée.

[10Communiqué de l’Association STOP-Civeaux, avril 2003 :

https://stopcivaux.free.fr/comasn/penly_8_2003_pen.html

L’article de Mediapart cité plus haut fait largement référence à cette anomalie générique due notamment à l’alliage des gaines de combustible.

Communiqué du Réseau Sortir du nucléaire, février 2011 :

https://www.sortirdunucleaire.org/actualites/communiques/affiche.php?aff=129

« En ayant produit plus de 33 milliards de kWh en 2010 soit environ de 7 % de la production d’électricité française et 35 % de l’énergie consommée dans la région, la centrale nucléaire de Paluel constitue un atout essentiel pour répondre aux besoins de la consommation d’électricité en France. [1] »

La réalité est bien moins honorable qu’EDF le déclare [2]. Depuis plusieurs années, la centrale de Paluel connaît une suite ininterrompue d’incidents divers et variés qui ont entraîné des avis sévères de l’Autorité de sûreté nucléaire, des arrêts des réacteurs et même des prolongations des opérations de rechargement en combustible.

Un article récent du quotidien Mediapart donne à voir les problèmes récurrents que connaît Paluel et plus encore le malaise social qui règne dans la centrale.

« Fuites à répétition, rejets de gaz radioactif, déclenchements de balises d’alertes, contaminations de travailleurs : depuis plus d’un mois, l’une des plus grosses centrales nucléaires françaises, le site de Paluel, en Haute-Normandie, connaît des dysfonctionnements en série. La multiplication des incidents crée un vent de panique chez les agents qui y travaillent, selon des témoignages et des documents exclusifs recueillis par Mediapart. La centrale de Paluel produit, à elle seule, environ 7% de l’électricité nationale. [3] »

Il n’est pas difficile de vérifier ces informations. Le site internet de la centrale publie dans des délais raisonnables les déclarations d’incidents. Ainsi peut-on lire un compte-rendu des récents problèmes survenus en juin dernier :

Note d’information du 23 juin 2011 réactualisée le 26 juin - L’unité de production n°3 de la centrale nucléaire de Paluel a été arrêtée en mars dernier pour recharger le combustible. Elle a été reconnectée au réseau de distribution d’électricité le 19 avril. Elle fonctionne aujourd’hui normalement et à pleine puissance. Dans le cadre de la surveillance permanente de son fonctionnement, le 28 avril 2011, les équipes de conduite ont constaté un défaut d’étanchéité sur l’un des assemblages combustible qui avaient été chargés dans la cuve du réacteur à l’occasion de l’arrêt (193 sont chargés dans un réacteur comme celui de Paluel). Ce défaut n’a aucun impact sur la sûreté des installations et l’environnement, les assemblages combustible étant immergés dans l’eau de la cuve en acier du réacteur, lui-même protégé par le bâtiment en béton hermétiquement fermé. La situation est actuellement suivie et contrôlée en continu par les équipes de conduite et de chimie de Paluel. Des émanations de gaz xénon, issues de la réaction chimique à l’intérieur du combustible, ont en outre été mesurées dans le bâtiment réacteur, elles sont prises en compte dans les dispositifs d’exploitation et de sûreté de la centrale. Un arrêt pour maintenance sur le réacteur n°3 de la centrale de Paluel, du 11 et au 13 juin, a permis de réparer une fuite d’air comprimé sur un équipement à l’intérieur du bâtiment réacteur, identifier et réduire un écoulement d’eau sur deux robinets du circuit primaire (en cas de fuite, l’eau est aussitôt collectée dans des réservoirs prévus spécifiquement). Durant le week-end du 25 au 26 juin, la centrale de Paluel a mis à profit un arrêt du réacteur, réalisé dans un contexte de faible consommation d’électricité due à une météo clémente, pour réparer les robinets concernés. Ces robinets seront remplacés lors d’un prochain arrêt pour maintenance. Durant ces deux opérations (du 11 au 13 comme du 25 au 26 juin), les équipes sont intervenues dans le bâtiment réacteur avec les protections adaptées. Les intervenants ont ensuite passé les examens de radioprotection d’usage qui ont montré qu’aucun d’eux ne présentait de contamination interne [4].

Chaque mot a ici son importance et mérite qu’on s’y attarde. A croire l’exploitant lui-même, nous avons ici affaire à un problème de sécurité puisque la première et la seconde barrière de protection ont cédé entraînant une perte de gaz radioactifs dans l’enceinte du bâtiment réacteur. L’incident fut suffisamment sérieux pour entraîner un arrêt pour maintenance de l’installation nucléaire. Et l’on est en droit de s’étonner de la prudence de l’ASN qui n’a pas voulu déclarer l’incident au prétexte de la prétendue faiblesse des rejets…

Cet événement du mois d’avril est à mettre en regard d’un autre incident lui aussi minoré par l’Autorité de sûreté nucléaire :

Le jeudi 3 mars 2011, en fin de matinée, de légères traces de contamination interne ont été détectées sur un salarié d’une entreprise extérieure. C’est lors des contrôles systématiques réalisés en sortie du bâtiment réacteur que cette contamination a été observée. L’intervenant a été orienté vers le service médical du site. Les premières analyses effectuées révèlent une contamination interne 40 fois inférieure à la limite réglementaire annuelle de 20 mSv.

Il s’agit bel bien d’un problème survenu lors de ce que l’on a coutume d’appeler un arrêt de tranche, c’est-à-dire des opérations de maintenance des réacteurs au cours desquels différents travaux d’entretien sont effectués et une partie du combustible changée. Là nous touchons un problème essentiel mis en cause par l’association de Philippe Billard et les précaires de l’industrie nucléaire [5]. Cette série de problèmes que le réacteur n°3 de Paluel a connue donne à voir une faiblesse essentielle de l’industrie nucléaire aujourd’hui. EDF essaie par tous les moyens d’accroître la disponibilité de ses centrales qui sont à l’arrêt près de trois mois par an [6]. Une telle exigence impose de limiter tant que faire ce peut les arrêts de tranche et de réduire au strict minimum des opérations de maintenance longues et coûteuses.

Pour reprendre le vocabulaire en vogue dans l’industrie nucléaire, on est passé au cours des dernières années du « risque zéro » au « risque maîtrisé ». Et pour hâter les opérations, EDF a largement externalisé les activités de maintenance, préférant employer des sous-traitants corvéables à merci plutôt que des personnels statutaires dont les droits sont strictement garantis par le statut des électriciens-gaziers.

Le réacteur n°3 n’est cependant pas le seul à connaître des problèmes de sûreté. Les autres réacteurs de la centrale de Paluel donnent eux aussi à voir des faiblesses inquiétantes. L’ASN a mis en cause un problème survenu à l’issue des opérations de maintenance sur le réacteur n°2 dans un courrier en date du 30 mai 2011 [7].

Plus généralement il est apparu que les opérations de maintenance sur les réacteurs 1 et 4 n’ont pas été suivies de tests de sûreté pourtant essentiels [8].

Plus largement c’est l’ensemble de la centrale qui présente des insuffisances en regard de la législation en vigueur. Ainsi en novembre 2010, l’ASN a mis en cause des problèmes structurels et le peu d’empressement de l’exploitant pour réaliser des améliorations convaincantes en termes de sûreté [9]. Enfin nous ne saurions passer sous silence la question des anomalies génériques qui touchent l’ensemble des réacteurs français, mises en évidence par le Réseau " Sortir du nucléaire" dès 2003 puis dernièrement en février 2011 concernant la défaillance des circuits de secours [10].



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