19 janvier 2024
C’est arrivé en novembre 2023 mais ce n’est qu’en janvier 2024 que le public en est informé : en pleine séance d’irradiation, la personne censée surveiller et conduire l’installation nucléaire exploitée par Ionisos à Pouzauges (Vendée) est partie. Elle a quitté son poste, sans attendre la relève et sans prévenir personne.
Dans l’usine de Pouzauges, des produits médicaux et alimentaires sont stérilisés par ionisation. Ils sont donc exposés à des rayonnements ionisants. Les sources radioactives, qui émettent ces rayons, sont dans un bunker en béton et mises sous eau pour limiter l’irradiation des personnes et de l’installation. Elles sont extraites de l’eau lors des séances d’irradiation des produits. C’est donc durant ces temps, mais aussi avant et après les séances, que la conduite de l’installation est la plus critique, c’est là qu’il y a le plus de risques. La surveillance des opérations est donc d’autant plus cruciale lors de ces séances. C’est justement à ce moment que l’opérateur de nuit a quitté son poste, le 28 novembre 2023. Sans attendre la personne qui devait le relever, et sans prévenir qui que ce soit. Il a laissé l’usine tourner, en auto-gestion, alors que les sources radioactives étaient sorties.
Certes, l’installation est dotée d’un système de télésurveillance et de barrières pour empêcher l’accès à la zone nucléaire. Mais l’opérateur de conduite doit surveiller le déroulement des séances de rayons, réagir en cas de problèmes et c’est à lui qu’incombe de faire les diagnostics en cas de dysfonctionnement ou en cas d’incident, comme lors d’un incendie par exemple.
Son remplaçant a pris la relève 8 minutes plus tard. Heureusement, aucun dysfonctionnement n’est survenu durant la séance en cours. Mais là n’est pas la question : il est strictement interdit de laisser ainsi tourner une installation nucléaire sans surveillance. L’exploitant, Ionisos, est seul responsable de la formation de son personnel. Si celui-ci n’a pas compris les règles ou n’a pas conscience des risques, c’est à l’employeur qu’en revient la faute et c’est à lui de corriger le tir.
Après plusieurs échanges avec l’Autorité de sûreté (ASN) et alors que Ionisos avait initialement déclaré les faits un mois après leur survenue et au plus bas niveau de l’échelle de gravité des incidents nucléaires, l’industriel les a finalement reclassés à un niveau plus élevé. Si l’employeur minimise lui-même la gravité des entorses et du non respect des règles, comment escompter de son personnel qu’il ne fasse pas de même ?
Non-respect des règles générales d’exploitation (RGE) et défaut de culture de sûreté
Publié le 19/01/2024
Installation d’ionisation de Pouzauges Installation d’ionisation - Ionisos
La société IONISOS, implantée à Pouzauges (85), utilise des sources radioactives de haute activité dans un bunker en béton pour la stérilisation de produits, notamment pour le secteur médical. Ces sources sont conservées au fond d’une piscine, dont l’épaisseur d’eau constitue une barrière biologique pour atténuer les rayonnements ionisants, et elles sont remontées au-dessus de la piscine en phase de traitement des produits à stériliser.
Le mardi 28 novembre 2023, l’opérateur de nuit en charge de l’exploitation de l’installation a quitté son poste de travail sans attendre la relève de son collègue en poste de jour. L’installation était en fonctionnement et les sources radioactives en position de traitement. Il résulte de ce départ l’absence de transmission de consignes entre les deux opérateurs et l’absence de mise sous surveillance du site pendant une durée de 8 minutes. Cet écart a été déclaré par la société IONISOS, le 21 décembre 2023, en tant qu’événement significatif de niveau 0 sur l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).
L’incident n’a eu aucune conséquence sur le personnel ni sur l’environnement du fait notamment de la présence de barrières physiques et organisationnelles encore disponibles telles que la supervision du site par l’équipe de télésurveillance et la présence de barrières pour l’accès à la casemate et au site.
A la suite de la déclaration de cet incident, un échange avec l’exploitant a été entrepris par l’Autorité de sûreté nucléaire dans le cadre de l’examen de l’analyse des causes de l’événement et des actions correctives et préventives mises en place par la société IONISOS. Cet échange a confirmé le non-respect des règles générales d’exploitation de l’installation (RGE) et de la consigne concernant la surveillance du site, par manque de culture sûreté de l’opérateur, qui n’a par ailleurs pas informé l’encadrement ou l’astreinte avant sa prise de décision lors de l’événement. De même l’équipe de supervision, en charge notamment de la gestion du risque incendie, n’a pas été informée de ce départ alors qu’en cas d’incendie, elle s’appuie sur le diagnostic de l’opérateur de conduite présent sur site.
Compte tenu de ces éléments, l’exploitant a reclassé, en accord avec l’ASN, cet événement au niveau 1 sur l’échelle INES en raison du défaut de culture de sûreté ayant entraîné le non-respect des règles générales d’exploitation.
L’exploitant a prévu de former l’ensemble des opérateurs de nuit au bon respect des consignes notamment de mise sous surveillance du site.
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