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Des accidents nucléaires partout

France : Dampierre : Alarme et court-circuit

Quand EDF ne surveille pas un réacteur nucléaire : l’alimentation électrique du contrôle-commande laissée sans protection




18 août 2023


Crédit photo : André Paris

11 août 2023, le réacteur 3 de la centrale nucléaire de Dampierre (Centre-Val de Loire) fonctionne. Mais les équipes d’EDF n’ont pas surveillé correctement ses systèmes. Une alarme en salle de commande signalait pourtant que les protections électriques de plusieurs systèmes essentiels, notamment la surveillance de l’activité dans la cuve, les déclenchements des arrêts d’urgence et l’envoi d’eau dans les générateurs de vapeur, étaient hors-service. En cause : un court-circuit qui aurait été déclenché par une intervention de maintenance.
Manque de surveillance d’une intervention et manque de surveillance en salle de commande ont abouti à ce que l’avarie ne soit découverte que bien après le délai maximum autorisé pour réparer en cas de défaillance de ces protections. L’alimentation électrique du système contrôle-commande [1] du réacteur 3 est resté près d’une heure et 45 minutes hors-service.


Ce que dit EDF :

Déclaration d’un événement significatif de sûreté de niveau 1

Publié le 18/08/2023

Non-respect d’une spécification technique d’exploitation (STE)

Le pilotage d’un réacteur s’inscrit dans un cadre de prescriptions, parmi lesquelles les spécifications techniques d’exploitation (STE), qui recueillent l’ensemble des règles à respecter pour la conduite des installations.

Le vendredi 11 août 2023, l’unité de production n°3 de la centrale de Dampierre-en-Burly est en fonctionnement. À 14h44, alors qu’une opération de maintenance est en cours sur un tableau électrique, un geste inapproprié provoque l’ouverture intempestive d’un disjoncteur entraînant l’indisponibilité d’une partie de ses protections. Ce tableau, requis lorsque le réacteur est en fonctionnement, est alors considéré comme indisponible. Le disjoncteur est refermé à 16h25. La remise en conformité a été réalisée en 1h41 alors que notre référentiel exige une réparation sous une heure.

Cet événement n’a pas eu d’impact réel sur la sûreté de l’installation.

Toutefois, compte tenu de la remise en conformité tardive de l’installation, la centrale de Dampierre-en-Burly a déclaré ce non-respect des spécifications techniques d’exploitation le 17 août 2023 à l’Autorité de sûreté nucléaire comme un événement significatif de sûreté de niveau 1 (anomalie) sur l’échelle INES, qui en compte 7.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-dampierre-en-burly/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-dampierre/declaration-dun-evenement-significatif-de-surete-de-niveau-1


Ce que dit l’ASN :

Non-respect de la conduite à tenir prévue par les règles générales d’exploitation

Publié le 24/08/2023

Centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly Réacteurs de 900 MWe - EDF

Le 18 août 2023, l’exploitant de la centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un événement significatif pour la sûreté relatif au non-respect des règles générales d’exploitation (RGE) applicables au système d’alimentation électrique LCA du réacteur 3.

Le système LCA est constitué de tableaux électriques alimentant des automates de régulation et de sécurité utilisés notamment par les systèmes d’arrêt d’urgence du réacteur ou de démarrage des pompes d’alimentation de secours des générateurs de vapeur. Un système redondant (LCB) permet l’alimentation de matériels identiques. Les tableaux électriques disposent de dispositifs de protection tels que des disjoncteurs, afin d’éviter qu’un court-circuit ne les endommage.

Les RGE sont un recueil de règles approuvées par l’ASN qui définissent le domaine autorisé de fonctionnement de l’installation et les prescriptions de conduite des réacteurs associées.

Le 11 août 2023, alors que des opérations de maintenance étaient en cours sur le système LCA, un disjoncteur du système LCA a été détecté ouvert alors que celui-ci aurait dû être fermé, rendant indisponibles les protections d’un tableau électrique du système LCA. Cette situation amène à considérer indisponibles l’ensemble des matériels alimentés par le système LCA.

L’exploitant a procédé à la fermeture du disjoncteur, rétablissant ainsi les protections du tableau électrique du système LCA. En consultant l’historique des alarmes survenues en salle des commandes, l’exploitant a constaté que le disjoncteur était resté ouvert pendant une heure et quarante-et-une minutes. Les règles générales d’exploitation prévoient un repli du réacteur sous une heure dans cette situation ; la conduite à tenir n’a donc pas été respectée.

Les matériels alimentés par le tableau électrique ont néanmoins toujours été alimentés, et le système redondant LCB est également resté disponible pendant toute la durée de l’événement.

Cet événement n’a pas eu de conséquence. Néanmoins, en raison du non-respect des RGE et de sa détection tardive, cet événement qui a affecté la fonction support d’alimentation électrique du contrôle-commande a été classé au niveau 1 de l’échelle INES (échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, graduée de 0 à 7 par ordre croissant de gravité).

Les premières investigations indiquent que la cause la plus probable de l’ouverture du disjoncteur serait un court-circuit généré lors de l’intervention de maintenance sur le système LCA pendant laquelle le disjoncteur a été détecté ouvert.

https://www.asn.fr/l-asn-controle/actualites-du-controle/installations-nucleaires/avis-d-incident-des-installations-nucleaires/non-respect-de-la-conduite-a-tenir-prevue-par-les-regles-generales-d-exploitation11


[1Le controle-commande est constitué de l’ensemble des systèmes qui, dans une installation nucléaire, effectuent automatiquement des mesures et assurent des fonctions de régulation ou de protection. La complexité de ces systèmes s’est considérablement développée au cours des dernières décennies. Ils répondent aux besoins croissants des industriels d’un pilotage plus aisé et plus sûr de leur installation ; ils doivent également permettre d’assurer une surveillance accrue des installations, et par là même favoriser le retour d’expérience issu de l’exploitation. La poursuite de ces objectifs a conduit au recours de plus en plus fréquent à des logiciels dans les systèmes de contrôle-commande. Source : ASN


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Installation(s) concernée(s)

Dampierre-en-Burly

Nombre d'événements enregistrés dans notre base de données sur cette installation
94