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Lettre d'information du Réseau Sortir du nucléaire
 
 
 

Le 19 octobre 2016, suite à une succession de dysfonctionnements, la centrale nucléaire de Golfech (Tarn-et-Garonne) a rejeté en quelques minutes une quantité très importante de radioactivité dans l’environnement. Le tribunal de police de Montauban et la cour d’appel de Toulouse ayant refusé de sanctionner EDF, nos associations avaient mené le combat contre l’impunité du pollueur jusqu’en Cour de cassation. La décision de cette dernière ayant permis la poursuite de la procédure, une nouvelle audience s’est tenue le 1er avril 2022, à la cour d’appel de Bordeaux. Ce 9 septembre 2022, cette dernière a finalement condamné EDF.

Après des années de procédure, nos associations se félicitent de cette décision qui vient enfin sanctionner les fautes d’EDF qui ont conduit à cet important rejet dans l’environnement. Dans un contexte de sévère dégradation de la sûreté à la centrale depuis quelques années, un signal d’impunité aurait été déplorable.

Un important rejet radioactif dans l’environnement révélateur d’inquiétants dysfonctionnements

Le 19 octobre 2016, la centrale nucléaire de Golfech a laissé s’échapper un important rejet radioactif gazeux. La radioactivité rejetée est montée en flèche, au point de dépasser pendant 2 minutes le seuil d’alarme à la cheminée. Au total, 136 milliards de becquerels ont été relâchés dans la nature, dont 78 milliards sur cette seule séquence de 2 minutes !

Ce dépassement n’est pas à prendre à la légère : les seuils de rejets, taillés « sur mesure » selon les propositions de l’exploitant, sont fixés très haut, en fonction d’un optimum économique et technique, et non de normes sanitaires. Par ailleurs, selon certains chercheurs, de tels pics de rejets sont susceptibles d’entraîner des impacts sanitaires chez les riverains [1].

Cette pollution était le résultat d’une série de dysfonctionnements aussi bien techniques qu’organisationnels, révélateurs d’une sûreté défaillante.Les gaines contenant le combustible nucléaire du réacteur 1, censées être parfaitement étanches, laissaient fuir la radioactivité. Ce problème était connu de l’exploitant depuis juin 2016. En outre, le dégazeur, qui permet de séparer les gaz radioactifs des effluents liquides afin que ceux-ci puissent être stockés pendant 30 jours minimum pour permettre la décroissance de la radioactivité, avait été mal utilisé et avait mal fonctionné. En conséquence, ces gaz avaient alors été rejetés directement dans l’environnement [2]…

Six ans après, EDF enfin condamnée !

Nos associations refusaient qu’une telle pollution reste impunie. Après un dépôt de plainte le 28 novembre 2016, le Réseau “Sortir du nucléaire“ a fait citer directement EDF devant le tribunal le 17 octobre 2017. L’Association Française des Malades de la Thyroïde, les Amis de la Terre Midi-Pyrénées, France Nature Environnement Midi-Pyrénées, France Nature Environnement 82, la SEPANLOG et Stop-Golfech-VSDNG se sont constitués partie civile.

Le 10 janvier 2019, malgré des faits accablants, le tribunal de police de Montauban a relaxé EDF. Face à cette décision incompréhensible, nos associations ont fait appel. Le 10 février 2020, la cour d’appel de Toulouse a reconnu qu’EDF avait bien commis des fautes dans le cadre de cette affaire, mais ne l’avait pas condamnée.

Nos associations ont alors déposé un pourvoi en Cour de cassation, accompagné d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Le 29 juin 2021, l’arrêt de la Cour de cassation a rouvert la voie à une potentielle condamnation pour EDF.

Le 1er avril 2022, une nouvelle audience s’est tenue à la cour d’appel de Bordeaux. Dans un arrêt rendu le 9 septembre 2022, celle-ci a reconnu les fautes commises par EDF et l’a condamnée à réparer le préjudice subi. Après tant d’années de combat, nos associations se réjouissent que l’impunité du pollueur prenne fin (voir notre analyse en annexe).

Une condamnation bienvenue dans un contexte de sûreté dégradée

Cette condamnation signe enfin la fin de l’impunité d’EDF, alors que la situation à la centrale nucléaire de Golfech, années après années, continue d’inquiéter. En 2022, l’Autorité de sûreté nucléaire considère toujours que les performances de la centrale en matière de sûreté nucléaire laissent à désirer, comme en témoigne un grand nombre d’incidents survenus en 2021 ; elle fait également état de "défauts de compétence et de maîtrise des activités" concernant la maintenance. Enfin, des défauts de corrosion sous contrainte sont soupçonnés sur le réacteur n° 1. La condamnation reçue par EDF peut sonner comme un signal dans une situation dégradée.

Pour en savoir plus et télécharger l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux : https://www.sortirdunucleaire.org/Important-rejet-radioactif-a-la-centrale-49838

Notes :

[1] Pour ces chercheurs, ces pics de rejets pourraient expliquer le surcroît de leucémie aux alentours des installations nucléaires (voir notamment les travaux d’Ian Fairlie et Alfred Körblein sur le sujet). Plusieurs études font en effet état d’une telle corrélation (voir l’étude allemande KiKK en 2007 et l’étude de l’INSERM parue en 2012. Plus d’informations)

[2] Le non-respect de cette procédure n’était pas anodin, sachant que certains gaz nécessitent plus de 50 jours pour voir leur radioactivité divisée par 1000. Un tel rejet n’avait donc rien d’ « évanescent », pour reprendre l’expression de l’avocat d’EDF en première instance !


Annexe : un long combat qui permettra des avancées juridiques contre l’impunité des pollueurs

Dans sa décision du 10 février 2020, la cour d’appel de Toulouse avait reconnu qu’EDF avait bien commis des fautes dans le cadre de cette affaire, mais ne l’avait pas condamnée à une indemnisation, invoquant une absence de préjudice pour nos associations, ce que nous contestons.

Cette question du préjudice dépasse largement le fait d’obtenir ou non une indemnisation financière, qui ne mènent pas ce combat pour en retirer des gains. Il s’agissait ici de faire reconnaître que cette pollution avait porté atteinte aux objets que nous défendons (protection de l’environnement, lutte contre les pollutions radioactives).

Un pourvoi en Cour de cassation a donc été déposé, accompagné d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur la conformité à la Constitution de l’article 1247 du Code civil qui permet uniquement la réparation de l’atteinte non négligeable à l’environnement.

Cette QPC a été transmise au Conseil Constitutionnel par la Cour de cassation. Le 5 février 2021, celui-ci a estimé que le fait de limiter l’obligation de réparation du préjudice écologique aux atteintes non négligeables n’allait pas à l’encontre du principe prévu par l’article 4 de la Charte de l’environnement selon lequel toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement. Pour autant, cette décision ne mettait pas fin à la procédure devant la Cour de cassation qui devait tout de même trancher la question du préjudice causé aux associations par la violation des règles de sûreté nucléaire.

Dans son arrêt de cassation rendu le 29 juin 2021, la Cour a estimé que "la seule violation de la réglementation est de nature à causer aux associations un préjudice indemnisable". Cet arrêt a permis le réexamen de l’affaire et la reconnaissance par la cour d’appel de Bordeaux du préjudice causé aux associations dans cette affaire. Au total, EDF a été condamnée à près de 50 000 euros.

Dans un contexte de vieillissement du parc nucléaire et d’accumulation des anomalies, le respect des règles régissant la sûreté nucléaire ne devrait pas être considéré comme optionnel !

 
 
 
 
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