Un rapport dicté par EDF ?
Rédigé suite à une mission lancée par les deux ministères, ce rapport concernant "le maintien des capacités industrielles de la filière nucléaire en vue de potentielles nouvelles constructions de réacteurs » a été confié à Yannick d’Escatha, ancien administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et actuel conseiller du président d’EDF, et Laurent Billon, ex-délégué général à l’armement.
Quelle que soit l’importance qui devrait lui être accordée, le statut des rapporteurs fournit une énième preuve de la complaisance, voire de la soumission du gouvernement au lobby nucléaire (civil et militaire). Quoi de plus simple que de laisser EDF dicter elle-même ses souhaits par la voix de son conseiller ? On comprend la gêne de Nicolas Hulot face au passage en force de ses services et à la perspective de cette énième couleuvre à avaler !
Ce rapport prônerait la construction de 6 réacteurs EPR dans la prochaine décennie, le premier chantier commençant en 2025 pour une mise en service en 2035. Comment accorder le moindre crédit à une telle proposition, au vu du fiasco de l’EPR de Flamanville, criblé de malfaçons, qui accumule les retards et a vu son coût quadrupler ? Comment EDF SA, qui est en quasi-faillite, qui peine à financer la gestion de ses déchets et le démantèlement de ses installations, et qui doit être portée à bout de bras par l’État, peut-elle sérieusement envisager ces projets de construction ?
Un mépris écrasant pour la transition énergétique et pour les citoyens
Ce rapport propose donc de persister dans une fuite en avant aussi stupide que dangereuse, imposée par une industrie dépassée, incapable de penser sa fin et d’imaginer une reconversion vers le 100% renouvelable. Mais même si la mise en œuvre de ses recommandations n’était que partielle, elle signerait l’arrêt de mort de la transition énergétique, détournant des sommes colossales des alternatives énergétiques et imposant la perpétuation du risque nucléaire. Comme nous l’avons rappelé dans une tribune commune, à l’heure où un changement de cap s’impose, prétendre lutter contre le changement climatique et « en même temps » construire des EPR relève de la supercherie.
Ce rapport s’annonce de bien mauvais augure quant au contenu de la programmation pluriannuelle de l’énergie, qui doit être publiée prochainement. Sa commande témoigne par ailleurs d’un mépris écrasant pour les aspirations des Français, alors que le panel de citoyens consultés dans le cadre du débat public sur la PPE avait massivement rejeté la construction de nouveaux réacteurs. Il témoigne également d’un mépris de la loi de transition énergétique, qui n’en déplaise à EDF, s’applique toujours et impose une réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50% d’ici 2025.
Le poids du lobby de la bombe ?
Il est révélateur que ce rapport, qui comporte un volet « civil » et un volet « militaire », ait été confié à un ancien délégué général à l’armement. Derrière le projet de construction de nouvelles centrales, il ne s’agit pas seulement d’une tentative désespérée de maintenir les compétences d’une industrie périmée, mais aussi de pérenniser une filière militaire qui, sans l’atome civil, ne pourrait plus subsister.
Rappelons que les abonnés qui achètent de l’électricité d’origine nucléaire contribuent, sans le savoir, au maintien de la dissuasion nucléaire française et au risque de prolifération atomique. Les salariés d’EDF aussi sont pris en otage par ce système.
Il faut mettre fin à ces manœuvres de politiciens qui, de concert avec les lobbies, sacrifient l’avenir du pays à une industrie du passé ! Le Réseau “Sortir du nucléaire“, qui représente des dizaines de milliers de citoyens, appelle à une mobilisation sans appel contre le lobby nucléaire civil et militaire. Un changement de cap énergétique est désormais impératif et vital ; il est urgent de faire front à la volonté du gouvernement de passer outre.
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