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Des accidents nucléaires partout

France : Gravelines : Un travailleur contaminé pendant la visite décennale du réacteur 1




1er février 2022


Fin janvier 2022, un travailleur a été contaminé à la centrale nucléaire de Gravelines (Hauts-de-France) : une particule radioactive est venue se nicher dans son cou, malgré les équipements de protection qu’il portait. Les détecteurs de radioactivité ambiante se sont déclenchés, mais il a continué ses activités. Ce n’est que bien plus tard que le service médical de la centrale le prendra en charge. Directement irradié, il a reçu lors de cette seule intervention plus du quart de la dosse maximale autorisée en toute une année.


Le réacteur 1 de Gravelines est arrêté depuis août 2021 pour sa quatrième visite décennale, un grand programme de vérifications des installations, remises en conformité des équipements et modifications des systèmes. Un arrêt particulièrement long, mais aussi particulièrement dense : près de 17 000 activités programmées et plusieurs examens réglementaires qui ne sont faits que tous les 10 ans (inspection de la cuve, test du circuit primaire et de l’enceinte en béton). Ceux-ci venaient juste de se terminer lorsque le travailleur a été contaminé.

Il devait manœuvrer des vannes. Il avait les habilitations pour intervenir en zone nucléaire, il a donc normalement été formé par son employeur aux risques induits par les rayonnements ionisants. Il portait les protection fournies par EDF. Pourtant il a été contaminé et n’a pas perçu le danger. Malgré les alarmes qui se déclenchent à son passage, il ne stoppe pas ses activités et continu à travailler. À la seconde alarme, il prévient sa hiérarchie. Ce n’est qu’après avoir passé plus de 2 heures en zone nucléaire qu’il passera dans les portiques de détection de radioactivité, à la demande d’un tiers. La particule radioactive sur son cou est alors détectée. Ce n’est qu’à ce moment là qu’il sera pris en charge par le service médical de la centrale et que la particule sera retirée. L’ASN s’interroge sur l’absence de réactivité des personnes impliquées.

On ne sait pas combien de temps il a porté sur lui la particule radioactive, ni où il a été contaminé puisque EDF ne précise pas dans quel bâtiment il était lors de l’incident. Ni pourquoi les équipements de protection ne l’ont pas protégé de cette sur-exposition aux rayons. Ni pourquoi les personnes alertées de sa possible contamination n’ont pas été plus réactives.
On ne sait pas non plus quel type de rayonnement émettait la particule radioactive, ni quelle dose [1] précise son corps a reçu lors de cette intervention. Comme souvent lors d’un incident de radioprotection, EDF précise seulement que le quart de la dose annuelle est dépassé, ce quart étant le seuil de déclaration d’un évènement dit significatif [2] pour la (non)radioprotection au niveau 1 de l’échelle INES [3] (le niveau 2 étant le dépassement de la limite annuelle autorisée). Une chose est sûre : la zone nucléaire du réacteur 1 de Gravelines n’est pas si propre que ça. Et les moyens mis par EDF pour protéger les travailleurs de la radioactivité ambiante ne sont pas suffisants.

Ce que dit EDF :

Déclaration d’un événement significatif de radioprotection de niveau 1, relatif à la contamination corporelle externe d’un intervenant, inférieure à la limite annuelle

Événement radioprotection

Publié le 01/02/2022

Le 27 janvier 2022 à 15h30, un intervenant d’exploitation se rend en partie nucléaire de l’installation pour réaliser des activités de manœuvre de vannes sur l’unité de production n°1 de la centrale nucléaire de Gravelines, actuellement à l’arrêt programmé pour maintenance. Il porte les équipements de protection adaptés et est en possession des autorisations de travail pour intervenir en zone nucléaire.

A deux reprises, l’intervenant passe devant des appareils de contrôle radiologique mobiles qui se mettent en alarme, indiquant l’élévation du bruit de fond de la radioactivité ambiante. Au second passage, l’intervenant prévient sa hiérarchie et poursuit ses activités.

A 17h38, à la demande du préventeur sur place, l’intervenant réalise son premier niveau de contrôle radiologique de sortie de zone nucléaire qui détecte une contamination au niveau du cou. L’équipe médicale du site est aussitôt appelée. L’intervenant, avec l’assistance d’un personnel de surveillance habilité, retire la particule radioactive. Il est ensuite pris en charge par un infirmier pour réaliser des contrôles complémentaires au service médical, qui se révèlent conformes et confirment le retrait de la particule radioactive.

Les analyses réalisées par le service médical ont permis d’estimer que la dose à laquelle l’intervenant a été exposé est supérieure au quart de la limite réglementaire annuelle d’exposition des travailleurs, sans dépasser toutefois la limite annuelle. Pour les travailleurs susceptibles d’être exposés aux rayonnements ionisants lors de leur activité professionnelle, la limite réglementaire de dose, pour douze mois consécutifs, est de 20 millisieverts pour le corps entier et de 500 mSv pour une surface de 1 cm2 de la peau.

Le niveau d’exposition radiologique de l’intervenant, inférieur à la limite annuelle, n’a pas de conséquence sur sa santé et ne nécessite pas de suivi médical particulier. Cependant, en raison du dépassement du quart de la limite annuelle réglementaire, la direction de la centrale de Gravelines a déclaré le 31 janvier 2022 à l’Autorité de sûreté nucléaire, un événement significatif relatif à la radioprotection au niveau 1 de l’échelle INES qui en compte 7.

https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-gravelines/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-gravelines/declaration-d-un-evenement-significatif-de-radioprotection-de-niveau-1-relatif-a-la-contamination-corporelle-externe-d-un-intervenant-inferieure-a-la-limite-annuelle


Ce que dit l’ASN :

Contamination corporelle externe d’un travailleur, ayant entraîné une exposition supérieure au quart d’une limite de dose individuelle annuelle réglementaire.

Publié le 10/02/2022

Centrale nucléaire de Gravelines Réacteurs de 900 MWe - EDF

Le 31 janvier 2022, l’exploitant de la centrale nucléaire de Gravelines a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire un événement significatif relatif à la radioprotection concernant le dépassement du quart d’une limite de dose individuelle annuelle autorisée.

Depuis le 14 août 2021, le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Gravelines est en arrêt pour maintenance et rechargement en combustible dans le cadre de sa quatrième visite décennale. Le 27 janvier 2022, un intervenant a réalisé des activités de manœuvre de vannes dans la zone contrôlée du réacteur 1. Lors d’un contrôle d’absence de contamination en sortie de bâtiment réacteur, l’appareil de contrôle radiologique mobile s’est mis en alarme indiquant une élévation du bruit de fond de la radioactivité ambiante. Malgré le conseil prodigué par un préventeur présent sur place, l’intervenant a poursuivi ses activités sans aller se contrôler en sortie de zone. Lors de son second passage à proximité de l’appareil de contrôle, celui-ci s’est mis à nouveau en alarme. Le gardien du sas et le préventeur ont demandé à l’intervenant s’il avait réalisé le contrôle conseillé. L’intervenant a alors informé sa hiérarchie de la situation. L’activité pouvant être terminée rapidement, le hiérarchique a demandé à l’intervenant de finir son activité avant d’aller se contrôler.

Le responsable de zone, averti de la situation, est parti à la recherche de l’intervenant pour lui faire réaliser un contrôle radiologique immédiat en sortie de zone contrôlée. La contamination au niveau de la tête a ainsi été détectée.

L’intervenant a été pris en charge par le gardien des vestiaires, qui l’a aidé à retirer une particule radioactive présente au niveau du cou. Un contrôle complémentaire par le service médical du site a été mené afin de confirmer l’absence de contamination résiduelle, interne et externe, de l’intervenant.

Pour les travailleurs susceptibles d’être exposés aux rayonnements ionisants lors de leur activité professionnelle, la limite réglementaire de dose, pour douze mois consécutifs, est de 20 millisieverts pour le corps entier, de 150 millisieverts pour le cristallin et de 500 millisieverts pour une surface de 1 cm2 de peau.

Le médecin du travail a estimé la dose reçue par l’intervenant au niveau de la peau, du fait de cette contamination, comme étant supérieure au quart de la limite réglementaire annuelle d’exposition des travailleurs, sans dépasser toutefois la limite annuelle.

Du fait du dépassement du quart d’une limite réglementaire annuelle d’exposition pour un travailleur, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle internationale des événements nucléaires INES.

Si le contrôle radiologique de sortie de zone avait été fait lors de la première alerte, la particule aurait été enlevée plus tôt et la dose reçue par l’intervenant aurait été moins importante. L’ASN sera donc vigilante quant à l’analyse faite par EDF sur le comportement des personnes impliquées.

https://www.asn.fr/l-asn-controle/actualites-du-controle/installations-nucleaires/avis-d-incident-des-installations-nucleaires/contamination-corporelle-externe-d-un-travailleur3


[1Dose : Quantité d’énergie communiquée à un milieu par un rayonnement ionisant - https://www.asn.fr/lexique/D/Dose

[2Événements significatifs : incidents ou accidents présentant une importance particulière en matière, notamment, de conséquences réelles ou potentielles sur les travailleurs, le public, les patients ou l’environnement. https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif

[3INES : International nuclear and radiological event scale (Échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques) - Description et niveaux ici - https://www.asn.fr/Lexique/I/INES


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Installation(s) concernée(s)

Gravelines

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