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Nucléaire et changement climatique : Stop aux idées reçues !

Article publié le 4 juillet 2011



Climat : que disent les scientifiques ?

Selon la communauté scientifique internationale, la hausse de la température moyenne du globe doit être maintenue en-dessous de +2°C pour éviter les effets les plus catastrophiques du changement climatique. A cette fin, il faut réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’au moins 80 % d’ici à 2050, par rapport à 1990. Quant aux pays industrialisés, premiers émetteurs de gaz à effet de serre, ils devront avoir déjà réduit leurs émissions de 40 % dès 2020 ! [1]

Une technologie "hors sujet" et inefficace

75 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre proviennent de secteurs sans aucun lien avec la production d’électricité, ou pour lesquels recourir à l’électricité est d’un rendement particulièrement mauvais : agriculture, exploitation forestière, procédés industriels, transport, chauffage, etc [2]. Le nucléaire y est donc hors sujet !

Sa capacité à réduire les 25 % d’émissions restants est extrêmement médiocre. Loin d’être antinucléaire, l’Agence Internationale de l’Energie encourage contre toute raison la croissance continue de la consommation d’énergie. Elle calcule cependant que la contribution du nucléaire à la réduction des émissions de CO2 serait d’à peine 6 % pour un coût d’au moins 1 000 milliards d’euros... contre 54 % pour les économies d’énergie et 21 % pour les énergies renouvelables, à un coût très inférieur ! [3]

Puisqu’il faut environ 10 ans pour construire un seul réacteur, cette réduction dérisoire et hypothétique ne commencerait qu’après 2020, donc bien trop tard.

Oui, le nucléaire émet des gaz à effet de serre !

La filière nucléaire émet des quantités non négligeables de gaz à effet de serre, liées au cycle de vie des réacteurs (construction, démantèlement...) et de leur combustible (extraction, transport, retraitement...). Mais surtout, contrairement à d’autres technologies, le nucléaire ne permet pas de récupérer la chaleur dégagée lors de la production d’électricité. Il impose donc de produire de l’énergie supplémentaire pour nos besoins en chaleur. Produire électricité et chaleur en co-génération permet d’émettre 7 fois moins de gaz à effet de serre qu’un système énergétique nucléarisé ! [4]

Le nucléaire : cher… et contreproductif !

Pour un euro investi, l’efficacité énergétique et certaines énergies renouvelables sont jusqu’à 11 fois plus performantes que le nucléaire pour réduire les gaz à effet de serre ! [5] Or la technologie nucléaire est un véritable gouffre financier. De ce fait, elle entrave le développement rapide et massif des vraies solutions contre le changement climatique.

En effet, le nucléaire exige des investissements considérables en matière d’infrastructures et monopolise d’énormes subventions publiques, dont les 2/3 des budgets de recherche européens sur l’énergie. [6] Depuis 1974, les pays de l’OCDE ont officiellement consacré au nucléaire 55 % de leurs budgets de recherche sur l’énergie, soit 250 milliards de dollars. [7] Les coûts futurs du démantèlement des installations nucléaires et de la gestion des déchets radioactifs se chiffreront en centaines de milliards d’euros.

Des centrales vulnérables au changement climatique

Plus il fait chaud, moins les réacteurs nucléaires sont opérationnels : 1/4 du parc nucléaire français a dû être arrêté en 2003 à cause de la canicule estivale ! En outre, le nucléaire consomme 25 000 fois plus d’eau par kWh produit que les énergies éolienne et solaire. [8] Les événements climatiques extrêmes (tempêtes, inondations...), dont la fréquence augmente, accroissent les risques d’accidents. Ainsi, en 1999, la centrale nucléaire française du Blayais, qui avoisine Bordeaux, a frôlé la catastrophe en raison d’une inondation, et la ville a bien failli être évacuée. [9] Inondée par le tsunami du 26 décembre 2004, la centrale indienne de Kalpakkam a été arrêtée en urgence. 15 000 familles auraient été évacuées le lendemain par mesure de précaution. Des niveaux de radioactivité inquiétants ont été mesurés 2 mois plus tard dans une zone de 20 km à la ronde. [10]

Une industrie polluante et dangereuse

En fonctionnement normal, la filière nucléaire pollue les eaux et les sols, notamment lors de l’extraction minière de l’uranium. Elle rejette en permanence de la radioactivité dans l’environnement. Une étude scientifique allemande a mis en évidence un surcroît de 117 % des leucémies infantiles jusqu’à 5 km de certaines centrales. [11] La très officielle Commission Internationale de Protection Radiologique affirme elle-même que "toute dose de rayonnement comporte un risque cancérigène et génétique". [12] Un accident majeur, toujours possible, contaminerait de vastes territoires pour des milliers d’années, et il n’existe aucune solution pour gérer les déchets nucléaires. Enfin, la multiplication des réacteurs nucléaires favorise la prolifération de l’arme atomique.

Créer plus d’emplois avec d’autres énergies

En moins de 10 ans, l’Allemagne a créé près de 300 000 emplois dans les énergies renouvelables [13] . Ce secteur encore émergent occupait déjà au bas mot 2,3 millions de personnes dans le monde en 2008. Les pays industrialisés ne sont pas seuls à en bénéficier, et certains développent des programmes d’énergie solaire parmi les plus dynamiques au monde. Ainsi, 100 000 toits photovoltaïques ont été installés en quelques années au Bangladesh, et cette filière pourrait créer 100 000 emplois dans le pays d’ici à 2015. [14] A investissement égal, les économies d’énergie et les énergies renouvelables créent 15 fois plus d’emplois que le nucléaire !  [15]

Les vraies solutions existent, utilisons-les !

De nombreuses mesures pertinentes doivent être mises en œuvre en matière de politique énergétique (efficacité énergétique, économies d’énergie, développement des énergies renouvelables…), mais aussi dans les autres secteurs : lutte contre la déforestation, transition vers une agriculture durable, relocalisation des activités économiques,… Sans oublier la réduction des émissions de méthane, un gaz qui réchauffe 49 fois plus que le CO2. Sa récupération dans les décharges françaises permettrait d’éviter bien plus de gaz à effet de serre que la construction de 3 réacteurs EPR ! [16]

De nombreuses études [17] ont démontré que les alternatives énergétiques déjà disponibles permettraient à la fois de lutter efficacement contre le changement climatique et de se passer totalement de l’électricité nucléaire… qui ne représente aujourd’hui que 2,4 % de l’énergie consommée dans le monde ! [18]


Notes

[1GIEC (Groupement d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat), Quatrième Rapport, 2007.

[2Climate Analysis Indicators Tool (CAIT), version 4.0, World Ressources Institute, 2007 ; cité dans Réseau Action Climat et alii, "Face à la menace climatique, l’illusion du nucléaire", 2007, p.17.

[3Agence Internationale de l’Energie, "Energy technology perspectives 2008, Scenarios and strategies to 2050", 2008 ; cité dans Les cahiers de Global Chance n°25, "Nucléaire : la grande illusion", 2008, p.17.

[4Comparaison entre un système énergétique utilisant conjointement le nucléaire et le chauffage au fioul d’une part, et un système de co-génération d’électricité et de chaleur en centrales au biogaz d’autre part. Öko-Institut, "Comparison of Greenhouse Gaz Emissions and Abatement Cost of Nuclear and Alternative Energy Options from a Life-Cycle Perspective.", 2006, p.5-6 ; Mycle Schneider, "Oui, le nucléaire émet des gaz à effet de serre !", revue L’Ecologiste, Vol.1 n°2, 2000, p.58-59.

[5Rocky Moutain Institute, "The Nuclear Illusion", 2008, p.19.

[6Données synthétisées par le Réseau "Sortir du nucléaire" à partir de plusieurs sources, dont les principales sont : Greenpeace, rapport "Invest in a Clean Energy Future", 2005, notamment p.10 ; Groupe des Verts au Parlement européen, "Future Nuclear and Energy Research under the FP7s", 2006 ; les textes réglementaires des Programmes-Cadres de la recherche européenne, consultables sur le Journal officiel de l’Union européenne.

[7Ministère fédéral allemand de l’Environnement (Bundesministerium für Umwelt), "The World Nuclear Industry Status Report 2009", 2009, p.74. Extrapolation aux années 2008 et 2009 des données sur la période 1998-2007.

[9Conversation de Yann Arthus-Bertrand avec Alain Juppé, maire de Bordeaux et ex-Premier ministre, rapportée sur France-Inter, émission Le Zapping de France-Inter, 30 mai 2009.

[10VT Padmanabhan et NP Nakul, "Radiation Monitoring around Madras Atomic Power Station", 2005.

[11Office fédéral allemand de protection contre les radiations (Bundesamt für Strahlenschutz) / Université de Mayence, "Epidemiologische Studie zu Kinderkrebs in der Umgebung von Kernkraftwerken (KiKK-Studie)", 2007.

[12Commission Internationale de Protection Radiologique, "Recommendations of the International Commission on Radiological Protection, ICRP 60", 1990, Pergamon Press 1991.

[13Ministère fédéral allemand de l’Environnement (Bundesministerium für Umwelt), "Gross Employment from Renewable Energy in Germany in the Year 2008 - A first estimate", 2009

[14Worldwatch Institute, Micheal Renner, "Jobs in Renewable Energy Expanding", 2008.

[16Les cahiers de Global Chance n°24, "De Grenelle à Bali : avancées, incertitudes, contradictions et perspectives", 2008, p.47 et p.55. On parle ici du "pouvoir de réchauffement global" (PRG) du méthane (CH4). Le PRG indique la contribution relative au réchauffement de la planète, pendant une période déterminée, d’une émission ponctuelle en début de période d’un kg d’un gaz à effet de serre particulier, par comparaison avec la contribution sur la même période d’une émission ponctuelle d’un kg de CO2. Comme la durée de vie du méthane dans l’atmosphère est courte (de l’ordre de 12 ans) par rapport à celle du CO2, le PRG du méthane varie de façon importante avec la période de temps choisie. Pour évaluer l’influence d’une émission de CH4 à un horizon donné (2020 ; 2050 ; 2100) par comparaison avec le CO2, il est nécessaire de tenir compte de l’écart entre l’année d’émission et l’année horizon puisque le coefficient d’équivalence (le PRG) varie rapidement en fonction de la période de temps choisie. Ainsi, le PRG du méthane est de 49 à l’horizon 2050 pour les émissions générées en 2010, c’est-à-dire demain… Cela signifie que l’émission ponctuelle de 1 tonne de CH4 en 2010 aura, à l’horizon 2050, une influence sur le climat équivalente à celle d’une émission ponctuelle de 49 t de CO2 en 2010.

[17Virage-Energie, "Energies d’avenir en Nord-Pas de Calais – Quelles solutions au dérèglement climatique", 2008 ; Greenpeace/EREC, "Energy (R)evolution – A sustainable global energy outlook", 2008 ; Réseau "Sortir du nucléaire", "Nucléaire : comment en sortir ? – Etude sur des sorties du nucléaire en 5 ou 10 ans", 2007 ; Institute for Energy and Environmental Research, "Carbon-free and Nuclear-free : a Roadmap for U.S. Energy Policy" (résumé en français), 2007 ; Les 7 Vents du Cotentin, "Un courant alternatif pour le Grand Ouest – Quelles alternatives au réacteur EPR ?", 2006 ; Négawatt (2006), …

[18Les cahiers de Global Chance n°25, "Nucléaire, la grande illusion", 2008, p.10

Climat : que disent les scientifiques ?

Selon la communauté scientifique internationale, la hausse de la température moyenne du globe doit être maintenue en-dessous de +2°C pour éviter les effets les plus catastrophiques du changement climatique. A cette fin, il faut réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’au moins 80 % d’ici à 2050, par rapport à 1990. Quant aux pays industrialisés, premiers émetteurs de gaz à effet de serre, ils devront avoir déjà réduit leurs émissions de 40 % dès 2020 ! [1]

Une technologie "hors sujet" et inefficace

75 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre proviennent de secteurs sans aucun lien avec la production d’électricité, ou pour lesquels recourir à l’électricité est d’un rendement particulièrement mauvais : agriculture, exploitation forestière, procédés industriels, transport, chauffage, etc [2]. Le nucléaire y est donc hors sujet !

Sa capacité à réduire les 25 % d’émissions restants est extrêmement médiocre. Loin d’être antinucléaire, l’Agence Internationale de l’Energie encourage contre toute raison la croissance continue de la consommation d’énergie. Elle calcule cependant que la contribution du nucléaire à la réduction des émissions de CO2 serait d’à peine 6 % pour un coût d’au moins 1 000 milliards d’euros... contre 54 % pour les économies d’énergie et 21 % pour les énergies renouvelables, à un coût très inférieur ! [3]

Puisqu’il faut environ 10 ans pour construire un seul réacteur, cette réduction dérisoire et hypothétique ne commencerait qu’après 2020, donc bien trop tard.

Oui, le nucléaire émet des gaz à effet de serre !

La filière nucléaire émet des quantités non négligeables de gaz à effet de serre, liées au cycle de vie des réacteurs (construction, démantèlement...) et de leur combustible (extraction, transport, retraitement...). Mais surtout, contrairement à d’autres technologies, le nucléaire ne permet pas de récupérer la chaleur dégagée lors de la production d’électricité. Il impose donc de produire de l’énergie supplémentaire pour nos besoins en chaleur. Produire électricité et chaleur en co-génération permet d’émettre 7 fois moins de gaz à effet de serre qu’un système énergétique nucléarisé ! [4]

Le nucléaire : cher… et contreproductif !

Pour un euro investi, l’efficacité énergétique et certaines énergies renouvelables sont jusqu’à 11 fois plus performantes que le nucléaire pour réduire les gaz à effet de serre ! [5] Or la technologie nucléaire est un véritable gouffre financier. De ce fait, elle entrave le développement rapide et massif des vraies solutions contre le changement climatique.

En effet, le nucléaire exige des investissements considérables en matière d’infrastructures et monopolise d’énormes subventions publiques, dont les 2/3 des budgets de recherche européens sur l’énergie. [6] Depuis 1974, les pays de l’OCDE ont officiellement consacré au nucléaire 55 % de leurs budgets de recherche sur l’énergie, soit 250 milliards de dollars. [7] Les coûts futurs du démantèlement des installations nucléaires et de la gestion des déchets radioactifs se chiffreront en centaines de milliards d’euros.

Des centrales vulnérables au changement climatique

Plus il fait chaud, moins les réacteurs nucléaires sont opérationnels : 1/4 du parc nucléaire français a dû être arrêté en 2003 à cause de la canicule estivale ! En outre, le nucléaire consomme 25 000 fois plus d’eau par kWh produit que les énergies éolienne et solaire. [8] Les événements climatiques extrêmes (tempêtes, inondations...), dont la fréquence augmente, accroissent les risques d’accidents. Ainsi, en 1999, la centrale nucléaire française du Blayais, qui avoisine Bordeaux, a frôlé la catastrophe en raison d’une inondation, et la ville a bien failli être évacuée. [9] Inondée par le tsunami du 26 décembre 2004, la centrale indienne de Kalpakkam a été arrêtée en urgence. 15 000 familles auraient été évacuées le lendemain par mesure de précaution. Des niveaux de radioactivité inquiétants ont été mesurés 2 mois plus tard dans une zone de 20 km à la ronde. [10]

Une industrie polluante et dangereuse

En fonctionnement normal, la filière nucléaire pollue les eaux et les sols, notamment lors de l’extraction minière de l’uranium. Elle rejette en permanence de la radioactivité dans l’environnement. Une étude scientifique allemande a mis en évidence un surcroît de 117 % des leucémies infantiles jusqu’à 5 km de certaines centrales. [11] La très officielle Commission Internationale de Protection Radiologique affirme elle-même que "toute dose de rayonnement comporte un risque cancérigène et génétique". [12] Un accident majeur, toujours possible, contaminerait de vastes territoires pour des milliers d’années, et il n’existe aucune solution pour gérer les déchets nucléaires. Enfin, la multiplication des réacteurs nucléaires favorise la prolifération de l’arme atomique.

Créer plus d’emplois avec d’autres énergies

En moins de 10 ans, l’Allemagne a créé près de 300 000 emplois dans les énergies renouvelables [13] . Ce secteur encore émergent occupait déjà au bas mot 2,3 millions de personnes dans le monde en 2008. Les pays industrialisés ne sont pas seuls à en bénéficier, et certains développent des programmes d’énergie solaire parmi les plus dynamiques au monde. Ainsi, 100 000 toits photovoltaïques ont été installés en quelques années au Bangladesh, et cette filière pourrait créer 100 000 emplois dans le pays d’ici à 2015. [14] A investissement égal, les économies d’énergie et les énergies renouvelables créent 15 fois plus d’emplois que le nucléaire !  [15]

Les vraies solutions existent, utilisons-les !

De nombreuses mesures pertinentes doivent être mises en œuvre en matière de politique énergétique (efficacité énergétique, économies d’énergie, développement des énergies renouvelables…), mais aussi dans les autres secteurs : lutte contre la déforestation, transition vers une agriculture durable, relocalisation des activités économiques,… Sans oublier la réduction des émissions de méthane, un gaz qui réchauffe 49 fois plus que le CO2. Sa récupération dans les décharges françaises permettrait d’éviter bien plus de gaz à effet de serre que la construction de 3 réacteurs EPR ! [16]

De nombreuses études [17] ont démontré que les alternatives énergétiques déjà disponibles permettraient à la fois de lutter efficacement contre le changement climatique et de se passer totalement de l’électricité nucléaire… qui ne représente aujourd’hui que 2,4 % de l’énergie consommée dans le monde ! [18]


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