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Sortir du nucléaire n°64



Février 2015

Insécurité nucléaire

Survols de centrales : c’est plus drone du tout !

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°64 - Février 2015

 Risque nucléaire  Drones


De mi-octobre à fin novembre 2014, une trentaine de survols de sites nucléaires par des drones (non identifiés au jour où nous écrivons) ont été recensés au-dessus de 15 centrales, trois usines de combustible nucléaire et un centre de recherche. Un phénomène à prendre au sérieux.



De mystérieux pilotes

Selon les témoignages fournis par les médias et la gendarmerie (aucune image de drone en survol n’a été rendue publique), l’envergure des appareils varierait entre 20-30cm et deux mètres. Certains ne sont pas des jouets : un drone poursuivi par la gendarmerie près de la centrale de Golfech continue son vol sur 9 km, un autre est observé volant par vents forts. Les survols simultanés de sites éloignés de centaines de kilomètres indiqueraient une opération concertée.

Exploit d’un groupe écologiste ? Pourtant les faits n’ont pas été revendiqués, même anonymement. Greenpeace, qui avait envoyé un drone au-dessus de La Hague en 2012, dément et réclame une enquête. Pari entre dronistes (mais pourquoi risquer d’aboutir à un durcissement de la législation ?) ? Coup marketing des fabricants de drones à l’approche de Noël, ou de compagnies commercialisant des méthodes de détection ? Opération secrète des services de l’État (mais alors, pourquoi avoir laissé EDF porter plainte ?) ? Travailleurs du nucléaire ou ingénieurs souhaitant démontrer une faille de sûreté ? Ou organisation malveillante ?

Des risques réels

Cette dernière hypothèse ne peut être prise à la légère. Équipé d’une caméra, un drone pourrait repérer des points de vulnérabilité des équipements ou de l’organisation du site.

Un rapport publié par Greenpeace Luxembourg [1] (version expurgée d’une étude remise uniquement aux autorités françaises) met en garde : ces repérages pourraient servir dans le cadre d’une attaque au bazooka ou d’un crash kamikaze d’hélicoptère. En outre, selon la physicienne Oda Becker, "un crash de plusieurs drones chargés de quelques kilos d’explosifs pourrait mettre une centrale dans une situation dangereuse", débordant le personnel et endommageant des sources d’alimentation électrique indispensables pour les fonctions vitales… voire les piscines abritant le combustible usé, protégées par de simples hangars au toit de tôle ! Selon Jean-Claude Zerbib, ingénieur en radioprotection retraité du CEA, une défaillance du système de refroidissement de ces piscines mènerait en quelques heures à un risque de fusion, avec relâchement d’iode radioactif !

Un déni inexplicable

Ces mises en garde ne semblent pas ébranler les autorités, plus préoccupées par les atteintes à "la crédibilité et la réputation" du nucléaire que par la menace d’un attentat - quitte à répéter des mensonges comme la résistance supposée des installations à un crash d’avion [2]. Ce n’est que le 24 novembre qu’une audition parlementaire a été organisée sur ce sujet [3] et le 8 décembre que le gouvernement a annoncé le lancement par l’Agence Nationale de Recherche d’un "appel à projet flash" pour "le développement rapide de démonstrateurs permettant la détection voire la neutralisation de drones aériens" [4]. En parallèle, des députés européens ont interpellé le gouvernement sur ce qu’il prévoit pour mettre fin à cette menace, les dispositifs existants n’ayant pas permis d’interpeller ni les drones ni leurs pilotes [5].

Face au risque d’attentat, la seule solution réelle demeure... la fermeture de tous les sites nucléaires !

Charlotte Mijeon


Notes

[1Greenpeace, "Le risque venu du ciel - Des drones survolent et menacent les centrales nucléaires françaises", décembre 2014.

[2Selon plusieurs études, ni l’EPR ni les réacteurs actuels ne résisteraient à un crash d’avion de ligne. Même le directeur de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire exprime clairement ses craintes, voir la vidéo www.sortirdunucleaire.org/Video-Centrales-nucleaires-survol-de-drones

[3Visionner les auditions sur https://videos.assemblee-nationale.fr/ video.6118

[4https://www.actu-environnement.com/ media/pdf/news-23454-note-sgdsn-drones.pdf

[5"Drones et sécurité nucléaire : courrier de parlementaires européens au gouvernement français", 9 décembre 2014, www.michele-rivasi.eu/medias/drones-securite-nucleaire-courrier-de-parlementaires-europeens-au-gouvernement-francais/

De mystérieux pilotes

Selon les témoignages fournis par les médias et la gendarmerie (aucune image de drone en survol n’a été rendue publique), l’envergure des appareils varierait entre 20-30cm et deux mètres. Certains ne sont pas des jouets : un drone poursuivi par la gendarmerie près de la centrale de Golfech continue son vol sur 9 km, un autre est observé volant par vents forts. Les survols simultanés de sites éloignés de centaines de kilomètres indiqueraient une opération concertée.

Exploit d’un groupe écologiste ? Pourtant les faits n’ont pas été revendiqués, même anonymement. Greenpeace, qui avait envoyé un drone au-dessus de La Hague en 2012, dément et réclame une enquête. Pari entre dronistes (mais pourquoi risquer d’aboutir à un durcissement de la législation ?) ? Coup marketing des fabricants de drones à l’approche de Noël, ou de compagnies commercialisant des méthodes de détection ? Opération secrète des services de l’État (mais alors, pourquoi avoir laissé EDF porter plainte ?) ? Travailleurs du nucléaire ou ingénieurs souhaitant démontrer une faille de sûreté ? Ou organisation malveillante ?

Des risques réels

Cette dernière hypothèse ne peut être prise à la légère. Équipé d’une caméra, un drone pourrait repérer des points de vulnérabilité des équipements ou de l’organisation du site.

Un rapport publié par Greenpeace Luxembourg [1] (version expurgée d’une étude remise uniquement aux autorités françaises) met en garde : ces repérages pourraient servir dans le cadre d’une attaque au bazooka ou d’un crash kamikaze d’hélicoptère. En outre, selon la physicienne Oda Becker, "un crash de plusieurs drones chargés de quelques kilos d’explosifs pourrait mettre une centrale dans une situation dangereuse", débordant le personnel et endommageant des sources d’alimentation électrique indispensables pour les fonctions vitales… voire les piscines abritant le combustible usé, protégées par de simples hangars au toit de tôle ! Selon Jean-Claude Zerbib, ingénieur en radioprotection retraité du CEA, une défaillance du système de refroidissement de ces piscines mènerait en quelques heures à un risque de fusion, avec relâchement d’iode radioactif !

Un déni inexplicable

Ces mises en garde ne semblent pas ébranler les autorités, plus préoccupées par les atteintes à "la crédibilité et la réputation" du nucléaire que par la menace d’un attentat - quitte à répéter des mensonges comme la résistance supposée des installations à un crash d’avion [2]. Ce n’est que le 24 novembre qu’une audition parlementaire a été organisée sur ce sujet [3] et le 8 décembre que le gouvernement a annoncé le lancement par l’Agence Nationale de Recherche d’un "appel à projet flash" pour "le développement rapide de démonstrateurs permettant la détection voire la neutralisation de drones aériens" [4]. En parallèle, des députés européens ont interpellé le gouvernement sur ce qu’il prévoit pour mettre fin à cette menace, les dispositifs existants n’ayant pas permis d’interpeller ni les drones ni leurs pilotes [5].

Face au risque d’attentat, la seule solution réelle demeure... la fermeture de tous les sites nucléaires !

Charlotte Mijeon



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