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Plus que jamais, l’industrie nucléaire profite de la lutte contre le réchauffement climatique pour se présenter comme une alternative aux énergies fossiles. Ni propre, ni décarbonée, l’énergie nucléaire n’est pourtant pas une solution miracle. Avec les énergies renouvelables et les économies d’énergie, nous ne sommes plus contraints de devoir choisir entre charbon et nucléaire. Découvrez pourquoi et comment.


Prix Pinocchio : notre réponse à la lettre d’EDF

Article publié le 27 novembre 2015



EDF fait partie des nominés au Prix Pinnochio des Amis de la Terre dans la catégorie "greenwashing". Pris de court par cette nomination l’entreprise cherche à défendre son cas dans une lettre à laquelle nous répondons point par point.



Email reçu de la part d’EDF suite à sa nomination

Faisant suite à votre e-mail, je ne peux que partager que votre appel à ne pas instrumentaliser le sujet du climat. C’est pourquoi j’ai souhaité porter à votre connaissance quelques éléments d’information sur un sujet suffisamment sérieux pour ne pas souffrir d’approximation. Dans votre courrier, vous mettez en cause la communication d’EDF en matière de contribution à la lutte contre le changement climatique.

Pourtant, et pour ne s’en tenir qu’aux chiffres, les émissions de CO2 du groupe EDF restent parmi les plus basses au monde pour le secteur de la production électrique. Ainsi, en 2014, l’électricité produite par EDF en France avait un facteur carbone de 17g/kWh (35g/kWh en 2013) à comparer à une moyenne européenne proche de 300g/kWh (328 g/kWh en 2013). Dans le monde notre facteur d’émission était en 2014 de 102 g/kWh à comparer à une moyenne mondiale entre 500 et 600 g/kWh. Ces chiffres ont été publiés régulièrement dans notre reporting extra financier. Depuis plusieurs années, les émissions de CO2 d’EDF n’ont cessé de diminuer. De 19 millions de tonnes en France en 2006, elles ont atteint le seuil de 8 millions de tonnes en 2014. Cette diminution notable vaut également pour la production d’EDF dans le monde (de 84 Mtonnes en 2006 à 64 Mt en 2014). Cette amélioration continue est le résultat d’une politique industrielle conduite depuis plusieurs années, en accord avec nos engagements. De ce point de vue, nul ne peut contester que les performances du mix énergétique d’EDF placent le groupe dans le peloton de tête des électriciens les moins émetteurs de gaz à effets de serre.

En revanche, on peut craindre que votre propos ne cible la contribution de l’énergie nucléaire à cette performance. C’est d’autant plus regrettable que, grâce à l’électricité d’origine nucléaire, la France bénéficie aujourd’hui d’une certaine avance dans la lutte contre le changement climatique. Vous n’êtes en effet pas sans savoir que l’un des atouts de l’électricité nucléaire réside dans l’absence de carbone qu’elle dégage pour être produite. De ce point de vue, les choses changent peu lorsque l’on raisonne en termes d’analyse du cycle de vie (ACV). Le rapport du GIEC qui aborde la question de l’ACV des différents moyens de production donne de ce point de vue un léger avantage au nucléaire (médiane : 16g/kWh) sur d’autres formes d’énergies, y compris renouvelables, comme le solaire (médiane : 46g/kWh). J’ajoute que le savoir-faire français en matière de recyclage améliore encore cette performance et porte probablement ce chiffre sous les 10g/kWh.

En France, le rôle prépondérant joué par les 19 sites nucléaires français auxquels s’ajoutent les autres moyens de production hydrauliques et éoliens expliquent le chiffre de 98% d’électricité décarbonée produite par notre parc EDF en 2014. Un prix du CO2 significativement plus élevé que celui qui a cours aujourd’hui sur le marché européen conforterait ce résultat en limitant encore plus le recours en temps réel aux énergies fossiles. EDF a l’ambition d’être un électricien responsable et performant, champion de la croissance bas carbone. C’est pourquoi nous n’opposons pas les énergies entre elles, dés lors qu’elles concourent à cet objectif. Cela explique aussi pourquoi EDF est le premier producteur d’énergies renouvelables en Europe et continue à se développer en faisant appel à des sources de financement innovantes comme les Green Bond.

En 2030, nous avons l’ambition de plus que doubler notre puissance installée dans les énergies renouvelables dans le monde avec plus de 50GW.

Avec cette stratégie assumée, nous démontrons au quotidien la complémentarité du nucléaire et des énergies renouvelables en produisant une électricité parmi les moins émettrices de CO2 au monde.

J’espère que ces informations chiffrées et factuelles auront contribué à mieux éclairer votre perception de la stratégie d’EDF et des résultats obtenus.

Réponse du Réseau "Sortir du nucléaire" et des Amis de la Terre

En réponse à votre mail du 3 novembre suite à la nomination d’EDF aux Prix Pinocchio du Climat, nous nous permettons d’apporter les éléments de réponses suivants à vos affirmations.

Vous affirmez notamment que « les performances du mix énergétique d’EDF placent le groupe dans lepeloton de tête des électriciens les moins émetteurs de gaz à effets de serre. » et que l’électricité produite par EDF compte « parmi les moins émettrices de CO2 au monde ».

Il n’en demeure pas moins qu’EDF continue de faire partie des 20 entreprises les plus émettrices de gaz à effet de serre au niveau mondial et qu’elle ne saurait être mis au même niveau que d’autres électriciens qui, eux, produisent 100% de leur électricité grâce aux énergies renouvelables, comme Enercoop ou EWS Schönau. Vous affirmez également que « grâce à l’électricité d’origine nucléaire, la France bénéficie aujourd’hui d’une certaine avance dans la lutte contre le changement climatique ».

Nous vous rappelons que l’électricité ne constitue qu’une partie des consommations énergétiques, qui elles-mêmes ne représentent qu’une partie des émissions de gaz à effet de serre. Même avec un nucléaire poussé à son maximum, la France continue d’émettre quatre fois trop de gaz à effet de serre. Les solutions pour atteindre nos objectifs climatiques résident avant tout dans la maîtrise des consommations énergétiques et un fort développement des énergies renouvelables. Vous conviendrez que ce n’est pas l’orientation choisie par EDF, qui continue à faire la promotion de scénarios énergétiques où le chauffage électrique (particulièrement énergivore et inefficace) reste dominant et dont les investissements dans les énergies renouvelables en France restent embryonnaires.

Alors que l’Allemagne est passée en un an de 27% à 33% d’énergies renouvelables dans son mix électrique, la France continue de stagner, notamment en raison de la priorité donnée au nucléaire par EDF. Le nucléaire ne constitue donc pas pour la France un atout, mais bien plutôt un obstacle pour la mise en œuvre d’une politique climatique digne de ce nom.

Nous reconnaissons avec vous que le sujet du nucléaire face au changement climatique est « suffisamment sérieux pour ne pas souffrir d’approximation ». Mais si vous refusez les approximations, comment pouvez-vous d’abord prétendre que « l’un des atouts de l’électricité nucléaire réside dans l’absence de carbone qu’elle dégage pour être produite. », pour reconnaître ensuite que l’analyse de cycle de vie fait apparaître des émissions [1], et finalement décréter tout de même le caractère « décarboné » de l’électricité nucléaire ?

Cette manière de présenter les choses est profondément artificielle et malhonnête ; le Jury de déontologie publicitaire a d’ailleurs déjà reconnu qu’elle était « susceptible d’induire en erreur le public ».

Il n’est pas possible de faire fonctionner un réacteur nucléaire en l’absence de toutes les opérations menées en amont et en aval, qu’il s’agisse de l’extraction de l’uranium ou de la gestion des déchets radioactifs. Nous remarquons d’ailleurs qu’EDF ne met toujours pas à disposition les bilans carbones de l’ensemble de ses sites. Vous affirmez également que « le savoir-faire français en matière de recyclage améliore encore cette performance et porte probablement [le contenu CO2 de l’électricité nucléaire] sous les 10g/kWh. ».

En premier lieu, nous contestons ce terme de « recyclage », qui est inexact car les opérations de retraitement aboutissent à la production d’une quantité plus importante encore de déchets ingérables et à des rejets considérables. L’emploi de ce terme, qui évoque une économie circulaire vertueuse, est susceptible d’induire en erreur sur les impacts écologiques réels de cette activité. Le Haut Comité à la Transparence et à l’Information sur la Sûreté Nucléaire lui-même préconise d’ailleurs de ne plus utiliser cette terminologie. Nous nous permettons également de vous demander quelles méthodes de calcul vous permettent de parvenir à ce chiffre approximatif, que nous mettons en doute. Le « retraitement » des déchets entraîne en effet des émissions supplémentaires, qu’il s’agisse des opérations effectuées à l’usine Areva de La Hague, du transport des matières, de la fabrication de combustible MOX. Il faut également prendre en compte les émissions générées par la gestion dans la durée de plus de 60 tonnes de plutonium et plus de 27 000 tonnes d’uranium de retraitement. Vous affirmez également qu’EDF « n’[oppose] pas les énergies entre elles, dés lors qu’elles concourent à cet objectif [de croissance bas-carbone] » et que vous « [démontrez]au quotidien la complémentarité du nucléaire et des énergies renouvelables ».

Nous ne pouvons que nous étonner de cette affirmation. En effet, il y a opposition dès lors qu’il y a priorisation d’une filière au détriment d’une autre. Historiquement, le nucléaire a bénéficié de subventions publiques massives et il n’y a toujours pas eu de réorientation significative vers les énergies renouvelables. Au contraire, la France est l’un des seuls pays où les PME des énergies renouvelables peuvent disparaître faute de financement.

Si EDF se targue d’être le premier producteur d’énergies renouvelables en Europe, comment se fait-il que dans son pays d’origine les énergies renouvelables soient marginales dans le mix électrique, a fortiori si l’on en retire la production hydroélectrique ? Ce simple constat démontre qu’il n’y a pas complémentarité, mais exclusion des renouvelables par le nucléaire.

Par ailleurs, en ce qui concerne le fait de « concourir à une croissance bas-carbone », nous vous rappelons que les seuls scénarios qui, à l’heure actuelle, permettent d’atteindre le facteur 4 à l’horizon 2050 en France sont ceux qui misent délibérément sur une forte croissance des renouvelables, la maîtrise des consommations et une disparition du nucléaire. Vous déclarez que vous ne pouviez « que partager [notre] appel à ne pas instrumentaliser le sujet du climat. »

C’est pourtant précisément ce que nous reprochons à EDF de faire, en mettant en exergue un bilan CO2 trompeur pour mieux détourner l’attention des nuisances environnementales intrinsèquement liées au recours à la technologie nucléaire : pollution des mines d’uranium, rejets radioactifs et chimiques permanents, production de déchets radioactifs dangereux pour des millions d’années, risque d’accident... Nous pourrions aussi évoquer le risque de prolifération nucléaire et les atteintes aux droits humains (contamination des terres des peuples autochtones par les mines d’uranium, contamination légale des travailleurs du nucléaire, droits des générations futures hypothéqués par la production de déchets radioactifs).

Pour toutes ces raisons, nous estimons que la nomination d’EDF aux Prix Pinocchio du climat dans la catégorie « Greenwashing » est amplement justifiée.


Notes

[1Nous nous permettons d’ailleurs de signaler que les chiffres avancés doivent être relativisés au vu de publications plus sévères sur les émissions de gaz à effet de serre du nucléaire, notamment la méta-étude menée par Benjamin K. Sovacool, Valuing the greenhouse gas emissions from nuclear power : a critical survey https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0301421508001997

Email reçu de la part d’EDF suite à sa nomination

Faisant suite à votre e-mail, je ne peux que partager que votre appel à ne pas instrumentaliser le sujet du climat. C’est pourquoi j’ai souhaité porter à votre connaissance quelques éléments d’information sur un sujet suffisamment sérieux pour ne pas souffrir d’approximation. Dans votre courrier, vous mettez en cause la communication d’EDF en matière de contribution à la lutte contre le changement climatique.

Pourtant, et pour ne s’en tenir qu’aux chiffres, les émissions de CO2 du groupe EDF restent parmi les plus basses au monde pour le secteur de la production électrique. Ainsi, en 2014, l’électricité produite par EDF en France avait un facteur carbone de 17g/kWh (35g/kWh en 2013) à comparer à une moyenne européenne proche de 300g/kWh (328 g/kWh en 2013). Dans le monde notre facteur d’émission était en 2014 de 102 g/kWh à comparer à une moyenne mondiale entre 500 et 600 g/kWh. Ces chiffres ont été publiés régulièrement dans notre reporting extra financier. Depuis plusieurs années, les émissions de CO2 d’EDF n’ont cessé de diminuer. De 19 millions de tonnes en France en 2006, elles ont atteint le seuil de 8 millions de tonnes en 2014. Cette diminution notable vaut également pour la production d’EDF dans le monde (de 84 Mtonnes en 2006 à 64 Mt en 2014). Cette amélioration continue est le résultat d’une politique industrielle conduite depuis plusieurs années, en accord avec nos engagements. De ce point de vue, nul ne peut contester que les performances du mix énergétique d’EDF placent le groupe dans le peloton de tête des électriciens les moins émetteurs de gaz à effets de serre.

En revanche, on peut craindre que votre propos ne cible la contribution de l’énergie nucléaire à cette performance. C’est d’autant plus regrettable que, grâce à l’électricité d’origine nucléaire, la France bénéficie aujourd’hui d’une certaine avance dans la lutte contre le changement climatique. Vous n’êtes en effet pas sans savoir que l’un des atouts de l’électricité nucléaire réside dans l’absence de carbone qu’elle dégage pour être produite. De ce point de vue, les choses changent peu lorsque l’on raisonne en termes d’analyse du cycle de vie (ACV). Le rapport du GIEC qui aborde la question de l’ACV des différents moyens de production donne de ce point de vue un léger avantage au nucléaire (médiane : 16g/kWh) sur d’autres formes d’énergies, y compris renouvelables, comme le solaire (médiane : 46g/kWh). J’ajoute que le savoir-faire français en matière de recyclage améliore encore cette performance et porte probablement ce chiffre sous les 10g/kWh.

En France, le rôle prépondérant joué par les 19 sites nucléaires français auxquels s’ajoutent les autres moyens de production hydrauliques et éoliens expliquent le chiffre de 98% d’électricité décarbonée produite par notre parc EDF en 2014. Un prix du CO2 significativement plus élevé que celui qui a cours aujourd’hui sur le marché européen conforterait ce résultat en limitant encore plus le recours en temps réel aux énergies fossiles. EDF a l’ambition d’être un électricien responsable et performant, champion de la croissance bas carbone. C’est pourquoi nous n’opposons pas les énergies entre elles, dés lors qu’elles concourent à cet objectif. Cela explique aussi pourquoi EDF est le premier producteur d’énergies renouvelables en Europe et continue à se développer en faisant appel à des sources de financement innovantes comme les Green Bond.

En 2030, nous avons l’ambition de plus que doubler notre puissance installée dans les énergies renouvelables dans le monde avec plus de 50GW.

Avec cette stratégie assumée, nous démontrons au quotidien la complémentarité du nucléaire et des énergies renouvelables en produisant une électricité parmi les moins émettrices de CO2 au monde.

J’espère que ces informations chiffrées et factuelles auront contribué à mieux éclairer votre perception de la stratégie d’EDF et des résultats obtenus.

Réponse du Réseau "Sortir du nucléaire" et des Amis de la Terre

En réponse à votre mail du 3 novembre suite à la nomination d’EDF aux Prix Pinocchio du Climat, nous nous permettons d’apporter les éléments de réponses suivants à vos affirmations.

Vous affirmez notamment que « les performances du mix énergétique d’EDF placent le groupe dans lepeloton de tête des électriciens les moins émetteurs de gaz à effets de serre. » et que l’électricité produite par EDF compte « parmi les moins émettrices de CO2 au monde ».

Il n’en demeure pas moins qu’EDF continue de faire partie des 20 entreprises les plus émettrices de gaz à effet de serre au niveau mondial et qu’elle ne saurait être mis au même niveau que d’autres électriciens qui, eux, produisent 100% de leur électricité grâce aux énergies renouvelables, comme Enercoop ou EWS Schönau. Vous affirmez également que « grâce à l’électricité d’origine nucléaire, la France bénéficie aujourd’hui d’une certaine avance dans la lutte contre le changement climatique ».

Nous vous rappelons que l’électricité ne constitue qu’une partie des consommations énergétiques, qui elles-mêmes ne représentent qu’une partie des émissions de gaz à effet de serre. Même avec un nucléaire poussé à son maximum, la France continue d’émettre quatre fois trop de gaz à effet de serre. Les solutions pour atteindre nos objectifs climatiques résident avant tout dans la maîtrise des consommations énergétiques et un fort développement des énergies renouvelables. Vous conviendrez que ce n’est pas l’orientation choisie par EDF, qui continue à faire la promotion de scénarios énergétiques où le chauffage électrique (particulièrement énergivore et inefficace) reste dominant et dont les investissements dans les énergies renouvelables en France restent embryonnaires.

Alors que l’Allemagne est passée en un an de 27% à 33% d’énergies renouvelables dans son mix électrique, la France continue de stagner, notamment en raison de la priorité donnée au nucléaire par EDF. Le nucléaire ne constitue donc pas pour la France un atout, mais bien plutôt un obstacle pour la mise en œuvre d’une politique climatique digne de ce nom.

Nous reconnaissons avec vous que le sujet du nucléaire face au changement climatique est « suffisamment sérieux pour ne pas souffrir d’approximation ». Mais si vous refusez les approximations, comment pouvez-vous d’abord prétendre que « l’un des atouts de l’électricité nucléaire réside dans l’absence de carbone qu’elle dégage pour être produite. », pour reconnaître ensuite que l’analyse de cycle de vie fait apparaître des émissions [1], et finalement décréter tout de même le caractère « décarboné » de l’électricité nucléaire ?

Cette manière de présenter les choses est profondément artificielle et malhonnête ; le Jury de déontologie publicitaire a d’ailleurs déjà reconnu qu’elle était « susceptible d’induire en erreur le public ».

Il n’est pas possible de faire fonctionner un réacteur nucléaire en l’absence de toutes les opérations menées en amont et en aval, qu’il s’agisse de l’extraction de l’uranium ou de la gestion des déchets radioactifs. Nous remarquons d’ailleurs qu’EDF ne met toujours pas à disposition les bilans carbones de l’ensemble de ses sites. Vous affirmez également que « le savoir-faire français en matière de recyclage améliore encore cette performance et porte probablement [le contenu CO2 de l’électricité nucléaire] sous les 10g/kWh. ».

En premier lieu, nous contestons ce terme de « recyclage », qui est inexact car les opérations de retraitement aboutissent à la production d’une quantité plus importante encore de déchets ingérables et à des rejets considérables. L’emploi de ce terme, qui évoque une économie circulaire vertueuse, est susceptible d’induire en erreur sur les impacts écologiques réels de cette activité. Le Haut Comité à la Transparence et à l’Information sur la Sûreté Nucléaire lui-même préconise d’ailleurs de ne plus utiliser cette terminologie. Nous nous permettons également de vous demander quelles méthodes de calcul vous permettent de parvenir à ce chiffre approximatif, que nous mettons en doute. Le « retraitement » des déchets entraîne en effet des émissions supplémentaires, qu’il s’agisse des opérations effectuées à l’usine Areva de La Hague, du transport des matières, de la fabrication de combustible MOX. Il faut également prendre en compte les émissions générées par la gestion dans la durée de plus de 60 tonnes de plutonium et plus de 27 000 tonnes d’uranium de retraitement. Vous affirmez également qu’EDF « n’[oppose] pas les énergies entre elles, dés lors qu’elles concourent à cet objectif [de croissance bas-carbone] » et que vous « [démontrez]au quotidien la complémentarité du nucléaire et des énergies renouvelables ».

Nous ne pouvons que nous étonner de cette affirmation. En effet, il y a opposition dès lors qu’il y a priorisation d’une filière au détriment d’une autre. Historiquement, le nucléaire a bénéficié de subventions publiques massives et il n’y a toujours pas eu de réorientation significative vers les énergies renouvelables. Au contraire, la France est l’un des seuls pays où les PME des énergies renouvelables peuvent disparaître faute de financement.

Si EDF se targue d’être le premier producteur d’énergies renouvelables en Europe, comment se fait-il que dans son pays d’origine les énergies renouvelables soient marginales dans le mix électrique, a fortiori si l’on en retire la production hydroélectrique ? Ce simple constat démontre qu’il n’y a pas complémentarité, mais exclusion des renouvelables par le nucléaire.

Par ailleurs, en ce qui concerne le fait de « concourir à une croissance bas-carbone », nous vous rappelons que les seuls scénarios qui, à l’heure actuelle, permettent d’atteindre le facteur 4 à l’horizon 2050 en France sont ceux qui misent délibérément sur une forte croissance des renouvelables, la maîtrise des consommations et une disparition du nucléaire. Vous déclarez que vous ne pouviez « que partager [notre] appel à ne pas instrumentaliser le sujet du climat. »

C’est pourtant précisément ce que nous reprochons à EDF de faire, en mettant en exergue un bilan CO2 trompeur pour mieux détourner l’attention des nuisances environnementales intrinsèquement liées au recours à la technologie nucléaire : pollution des mines d’uranium, rejets radioactifs et chimiques permanents, production de déchets radioactifs dangereux pour des millions d’années, risque d’accident... Nous pourrions aussi évoquer le risque de prolifération nucléaire et les atteintes aux droits humains (contamination des terres des peuples autochtones par les mines d’uranium, contamination légale des travailleurs du nucléaire, droits des générations futures hypothéqués par la production de déchets radioactifs).

Pour toutes ces raisons, nous estimons que la nomination d’EDF aux Prix Pinocchio du climat dans la catégorie « Greenwashing » est amplement justifiée.