Faire un don

Des accidents nucléaires partout

France : Bugey : 7ème incident en 3 mois

Les erreurs d’EDF génèrent des prises de risques répétées avec la sûreté




24 décembre 2019


Difficulté à réguler la pression du circuit primaire, mauvais réglage d’injection de bore, apparition d’alarme qui ne suscite aucune réaction... Erreurs, détections tardives, analyses incomplètes et fausses, et multiples violations des règles censées régir l’exploitation de la centrale nucléaire du Bugey (Ain), le nouvel évènement significatif pour la sûreté déclaré le 19 décembre 2019, le 7ème en tout juste 3 mois, est un palmarès des manquements de l’exploitant. Manquements qui ne vont pas sans risques, et qui semblent devenir coutumes sur le site nucléaire au vu des dernières déclarations de l’exploitant.


Pompe du circuit de contrôle volumétrique et chimique hors service pendant 6 mois suite à une mauvaise maintenance mais considérée comme apte au service par EDF (erreur de diagnostic sur plusieurs essais de fonctionnement non concluants), système qui permet d’injecter de l’eau et du bore pour arrêter la réaction nucléaire et refroidir le combustible qui ne fonctionnait qu’à moitié depuis 10 mois, des opérations de maintenance qui laissent un réacteur avec un moteur diesel en moins sans que personne ne s’en rende compte avant un mois ; de multiples rejets radioactifs dans l’air à cause de travaux mal faits et d’une absence totale de réaction d’EDF lors du 1er rejet ; une mauvaise surveillance de la radioactivité dans le bâtiment réacteur à cause de mesures faussées ; débit de bore en dessous du minimum autorisé en raison d’une erreur d’analyse et une méconnaissance de la configuration des circuits de son installation... Tous ces évènements ont été déclarés par EDF entre le 19 septembre et le 19 décembre 2019. Sans compter les 2 arrêts en urgence successifs du réacteur 3 fin novembre, l’un pour un problème d’alimentation en eau des générateurs de vapeur, l’autre lié à un problème sur l’alternateur.

Manque de rigueur dans les opérations de maintenance et leurs vérifications, dans la surveillance de l’installation et dans le suivi en service d’équipements importants qui doivent pourtant être l’objet de toutes les attentions, analyses parcellaires, erreurs de diagnostics, détections de pannes plus que tardives, violations multiples et répétées des règles de fonctionnement... À l’heure où la Communauté de communes de la plainte de l’Ain et les élus du département ont délibéré, sans consultation préalables de leurs administrés, en faveur de l’implantation de 2 nouveaux réacteurs nucléaires sur les terres agricoles jouxtant la centrale du Bugey, les incidents déclarés à un rythme plus que soutenu par la direction de la centrale et donc, la manière manifeste dont EDF gère les réacteurs du site, auraient pourtant dû les alerter sur les risques bien réels générés par le site nucléaire pour l’environnement et ses habitants.

Ce que dit l’ASN :

Non-respect des spécifications techniques d’exploitation pour la mise à l’arrêt d’une pompe primaire du réacteur 2 de la centrale nucléaire du Bugey

Publié le 23/12/2019

Centrale nucléaire du Bugey - Réacteurs de 900 MWe - EDF

Le 19 décembre 2019, EDF a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un événement significatif pour la sûreté relatif au non-respect d’une prescription particulière prévue pour permettre l’arrêt d’une pompe primaire du réacteur 2.

Le 15 décembre 2019, le réacteur 2 est à l’arrêt, refroidi par les générateurs de vapeur, en raison d’un débit parasite sur un robinet d’aspersion qui perturbe la régulation de la pression du circuit primaire. EDF décide d’arrêter l’une des pompes primaires, qui assurent la circulation de l’eau du circuit primaire dans chacune des trois boucles du circuit primaire, afin de faciliter l’intervention sur la régulation du robinet d’aspersion et stabiliser la pression du circuit primaire.

Dans cet état du réacteur, les spécifications techniques d’exploitation permettent l’arrêt d’une pompe primaire sous réserve de respecter une prescription particulière qui définit trois mesures à respecter. L’une des mesures consiste à isoler toutes les arrivées d’eau vers le circuit primaire dont la concentration en bore serait inférieure à la concentration requise pour celui-ci.

Le bore est un élément chimique ayant la propriété d’absorber les neutrons produits par la réaction nucléaire. Il est mélangé à l’eau du circuit primaire et permet ainsi de contrôler, et le cas échéant d’arrêter, la réaction nucléaire. Lorsqu’une pompe primaire est à l’arrêt, les arrivées d’eau dans le circuit primaire doivent être isolées pour éviter la dilution du bore dans la boucle du circuit primaire dont la pompe est à l’arrêt.

A la suite d’un mauvais réglage du débit de bore injecté dans le circuit, cette disposition n’a pas été respectée pendant une durée d’une heure et demie, malgré l’apparition d’une alarme « concentration en bore anormale » quelques minutes après l’arrêt de la pompe.

En outre, pendant cette même période, deux essais périodiques ont été réalisés alors que l’une des conditions préalables à leur mise en œuvre était également de vérifier que toutes les arrivées d’eau à une concentration en bore inférieure à 2385 ppm étaient isolées, ce qui n’était pas le cas.

La concentration de bore dans le circuit primaire est néanmoins restée en permanence supérieure à la concentration requise. Cet écart n’a pas eu de conséquence sur le personnel et l’environnement.

Compte tenu du non-respect des spécifications techniques d’exploitation, de la détection tardive de cette situation par l’organisation en place, ainsi que de la réalisation concomitante de deux essais périodiques alors que les conditions préalables n’étaient pas réunies, cet événement a été classé au niveau 1 de l’échelle INES.

https://www.asn.fr/Controler/Actualites-du-controle/Avis-d-incident-des-installations-nucleaires/Non-respect-des-STE-pour-la-mise-a-l-arret-d-une-pompe-primaire-du-reacteur-2


Ce que dit EDF :

Réglage inapproprié d’un dispositif de gestion de la concentration en bore

Publié le 24/12/2019

Le 15 décembre 2019, l’unité de production n°2 est à l’arrêt pour réaliser des opérations de maintenance sur une vanne du circuit primaire*. La réalisation de cette opération nécessite la mise à l’arrêt d’une des trois pompes du circuit, sous certaines conditions prévues par les procédures d’exploitation, dont un réglage spécifique sur le matériel qui régule la concentration en bore** dans l’eau de ce circuit.

Lors de son intervention, un opérateur utilise une échelle de mesure inappropriée sur ce dispositif de réglage de la concentration en bore. Lorsque le chef d’exploitation délégué détecte l’alarme signalant le défaut de réglage du matériel, il demande à l’opérateur de rétablir le réglage adéquat permettant de retrouver une situation conforme aux prescriptions.

Aucun appoint d’eau borée au circuit primaire n’a été réalisé. Cependant, l’un des termes des prescriptions particulières autorisant l’arrêt de la pompe n’ayant pas été respecté, la centrale du Bugey a déclaré un événement significatif de niveau 1 sur l’échelle internationale INES le 17 décembre 2019.

Cet événement n’a pas d’impact sur la sûreté ni sur l’environnement, les fonctions de sûreté ayant toujours été assurées.

*Le circuit primaire est un circuit fermé contenant de l’eau sous pression, situé dans la partie nucléaire de l’installation. Il assure la transmission aux générateurs de vapeur de la chaleur dégagée dans le cœur du réacteur. Il comprend notamment plusieurs pompes de circulation d’eau.

** Le bore est un élément dont la propriété est d’absorber les neutrons produits par la réaction nucléaire. Mélangé à l’eau du circuit primaire, il permet de moduler la réaction nucléaire.

https://www.edf.fr/groupe-edf/nos-energies/carte-de-nos-implantations-industrielles-en-france/centrale-nucleaire-du-bugey/actualites/reglage-inapproprie-d-un-dispositif-de-gestion-de-la-concentration-en-bore


La surveillance des installations nucléaires au quotidien ? C’est grâce à vos dons que nous pouvons la mener !
Pour surveiller au jour le jour les incidents dans les installations nucléaires, les décrypter et dénoncer les risques permanents qui sont trop souvent minimisés - voire cachés par les exploitants, nous mobilisons tout au long de l’année des moyens humains et techniques.
Pour continuer ce travail de lanceur d’alerte et donner, au plus proche de leur survenue, des informations sur les inquiétants dysfonctionnements d’un parc nucléaire vieillissant, nous avons besoin de votre soutien financier !

Faire un don



Installation(s) concernée(s)

Bugey

Nombre d'événements enregistrés dans notre base de données sur cette installation
151