Faire un don

Sortir du nucléaire n°54



Eté 2012

Falea : des Maliens se mobilisent contre une mine d’uranium

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°54 - Eté 2012

 Uranium et mines


La commune de Falea, située dans la région de Kayes, dans le cercle1 de Kenieba, au sud-ouest du Mali, composée de 21 villages soit 17 000 habitants, est une des trois zones au Mali menacée par l’exploitation uranifère. La société Rockgate a un permis d’exploration sur le tiers de la commune, et en a débuté l’exploration en 2007.

Les réserves totales en uranium correspondraient à l’équivalent de la production annuelle d’Areva au Niger, qui pourrait pourtant en être l’exploitant, selon les informations de l’association des ressortissants et des amis de la commune de Falea (ARACF)2. Mais pour cette dernière, il est hors de question qu’on en arrive là. Face aux effets sanitaires, environnementaux et sociaux incommensurables, et ce dès l’exploration, que pèsent quelques retombées financières et en termes d’emploi qui, l’expérience le montre, ne bénéficieront guère aux riverains ?

Dégâts de l’exploration et mépris des populations

Pour amplifier son combat, l’ARACF a organisé à la mi-mars 2012 un forum sur les dangers liés à l’uranium avec des militants venus des quatre coins du monde, puis une visite de Falea. Édifiant ! Les méthodes de Rockgate et de son sous-traitant Foraco sont marquées par une violence extrême et un mépris total vis-à-vis des habitants et de leurs propres employés, un classique des sociétés minières. À Simbeye, un petit hameau à flanc de colline, cinq forages sont prévus à quelques mètres des cases. À raison de 15 jours de forage par point, les habitants vont subir pendant 75 jours, jour et nuit, le brouhaha de la foreuse. Sans compter les autres dégâts : deux forages se feront en amont du village, dont un juste au-dessus de l’espace de cuisine. Le Professeur Many Camara, un des animateurs de l’ARACF, traduit les propos du chef de famille : "Quand ils sont arrivés, ils ont demandé "est-ce que tu nous autorises à faire le travail ?" J’ai dit que non, je ne peux pas du tout vous autoriser parce que vous ne m’expliquez pas ce que vous allez faire et quelles vont être les conséquences pour mon travail aux champs et pour ma famille. Ils ont quand même apporté une machine pour déblayer et marqué les points où ils vont forer. […] Cela va perturber la coupe des arbres pour la préparation de mon champ […] et nous voyons déjà qu’il y a comme de l’huile sur l’eau au marigot où nous allons prendre l’eau pour boire, à cause du forage qui est un peu plus loin : l’eau n’est plus consommable pour nous." À proximité, le puits de Foukoura a été contaminé par des écoulements boueux d’un forage. Pour calmer les esprits, la société a d’abord affrété sur place une citerne mais ce n’est désormais plus le cas. Les fillettes n’ont plus qu’à aller plus loin puiser l’eau. Plus loin, des carottes de roche sont déversées dans le lit de la rivière Faleme.

La mobilisation de l’ARACF

L’équipe locale de radioprotection de l’ARACF, formée et équipée par la CRIIRAD, assure des relevés, note les problèmes, compile cela soigneusement. La sensibilisation tous azimuts est également cruciale. Radio Kayira Falea, montée en 2011, diffuse des informations, mobilise et contre ainsi la propagande de Rockgate. La sensibilisation des autorités locales porte ses fruits : les 12 maires du cercle de Kenieba ont signé un mémorandum contre l’exploitation de l’uranium à Falea.

Mais le combat est loin d’être gagné. Un enjeu à venir est de faire en sorte que la société minière et l’État ne passent pas outre les textes en vigueur et diligentent étude d’impact et concertation locale. Selon les textes, toute mise en exploitation est en outre impossible si les autorités locales la refusent. Ce travail exceptionnel doit continuer à être soutenu et relayé pour que Falea ne soit pas une prochaine victime de l’exploitation de l’uranium.

Juliette Poirson Administratrice de l’association Survie

Contact ARACF en France : Many Camara, manycamara@yahoo.fr

Site : www.falea21.org

Informations sur Areva en Afrique : https://survie.org/mot/areva

La commune de Falea, située dans la région de Kayes, dans le cercle1 de Kenieba, au sud-ouest du Mali, composée de 21 villages soit 17 000 habitants, est une des trois zones au Mali menacée par l’exploitation uranifère. La société Rockgate a un permis d’exploration sur le tiers de la commune, et en a débuté l’exploration en 2007.

Les réserves totales en uranium correspondraient à l’équivalent de la production annuelle d’Areva au Niger, qui pourrait pourtant en être l’exploitant, selon les informations de l’association des ressortissants et des amis de la commune de Falea (ARACF)2. Mais pour cette dernière, il est hors de question qu’on en arrive là. Face aux effets sanitaires, environnementaux et sociaux incommensurables, et ce dès l’exploration, que pèsent quelques retombées financières et en termes d’emploi qui, l’expérience le montre, ne bénéficieront guère aux riverains ?

Dégâts de l’exploration et mépris des populations

Pour amplifier son combat, l’ARACF a organisé à la mi-mars 2012 un forum sur les dangers liés à l’uranium avec des militants venus des quatre coins du monde, puis une visite de Falea. Édifiant ! Les méthodes de Rockgate et de son sous-traitant Foraco sont marquées par une violence extrême et un mépris total vis-à-vis des habitants et de leurs propres employés, un classique des sociétés minières. À Simbeye, un petit hameau à flanc de colline, cinq forages sont prévus à quelques mètres des cases. À raison de 15 jours de forage par point, les habitants vont subir pendant 75 jours, jour et nuit, le brouhaha de la foreuse. Sans compter les autres dégâts : deux forages se feront en amont du village, dont un juste au-dessus de l’espace de cuisine. Le Professeur Many Camara, un des animateurs de l’ARACF, traduit les propos du chef de famille : "Quand ils sont arrivés, ils ont demandé "est-ce que tu nous autorises à faire le travail ?" J’ai dit que non, je ne peux pas du tout vous autoriser parce que vous ne m’expliquez pas ce que vous allez faire et quelles vont être les conséquences pour mon travail aux champs et pour ma famille. Ils ont quand même apporté une machine pour déblayer et marqué les points où ils vont forer. […] Cela va perturber la coupe des arbres pour la préparation de mon champ […] et nous voyons déjà qu’il y a comme de l’huile sur l’eau au marigot où nous allons prendre l’eau pour boire, à cause du forage qui est un peu plus loin : l’eau n’est plus consommable pour nous." À proximité, le puits de Foukoura a été contaminé par des écoulements boueux d’un forage. Pour calmer les esprits, la société a d’abord affrété sur place une citerne mais ce n’est désormais plus le cas. Les fillettes n’ont plus qu’à aller plus loin puiser l’eau. Plus loin, des carottes de roche sont déversées dans le lit de la rivière Faleme.

La mobilisation de l’ARACF

L’équipe locale de radioprotection de l’ARACF, formée et équipée par la CRIIRAD, assure des relevés, note les problèmes, compile cela soigneusement. La sensibilisation tous azimuts est également cruciale. Radio Kayira Falea, montée en 2011, diffuse des informations, mobilise et contre ainsi la propagande de Rockgate. La sensibilisation des autorités locales porte ses fruits : les 12 maires du cercle de Kenieba ont signé un mémorandum contre l’exploitation de l’uranium à Falea.

Mais le combat est loin d’être gagné. Un enjeu à venir est de faire en sorte que la société minière et l’État ne passent pas outre les textes en vigueur et diligentent étude d’impact et concertation locale. Selon les textes, toute mise en exploitation est en outre impossible si les autorités locales la refusent. Ce travail exceptionnel doit continuer à être soutenu et relayé pour que Falea ne soit pas une prochaine victime de l’exploitation de l’uranium.

Juliette Poirson Administratrice de l’association Survie

Contact ARACF en France : Many Camara, manycamara@yahoo.fr

Site : www.falea21.org

Informations sur Areva en Afrique : https://survie.org/mot/areva



Soyez au coeur de l'information !

Tous les 3 mois, retrouvez 36 pages (en couleur) de brèves, interviews, articles, BD, alternatives concrètes, actions originales, luttes antinucléaires à l’étranger, décryptages, etc.

Je m'abonne à la revue du Réseau