Faire un don

Sortir du nucléaire n°80



Hiver 2019

Figure de la lutte

Cécile Lecomte, écureuille pacifiste et antinuk

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°80 - Hiver 2019



Au-dessus des rails, dans les arbres, sur les ponts ou les immeubles, elle grimpe ! Malgré une polyarthrite chronique (inflammation des articulations), à 37 ans, voici près de quinze ans que cette ancienne championne de France d’escalade allie passion et militantisme, et pratique le rappel comme blocage non-violent. En Allemagne, où elle vit, celui-ci lui vaut d’être sans cesse menacée d’“arrestation préventive“.



Le 1er septembre dernier, pendant que, sur le plancher des vaches, des militant.es brandissent des banderoles, deux écureuilles descendent en rappel d’un pont d’autoroute culminant à plus de cent mètres au-dessus de la ligne Colence — Trèves (Allemagne). En gare de Coblence, le train parti de Hambourg à destination de Narbonne doit patienter durant sept heures avant de repartir, le temps que police et pompiers délogent les trouble-fête. Il transporte treize conteneurs de yellow cake  [1] et, s’il continue sa route, l’écureuille et les sien.nes ont atteint leur but : rendre visibles ces transports secrets.

Après quelques manifestations et enchaînements aux rails qui lui permettent de mesurer l’ampleur de la répression policière, Cécile Lecomte fait la rencontre en 2004 de membres de l’association allemande Robin Wood, prônant l’action directe et non-violente avant tout, en particulier par l’escalade. Une révélation. Légalement, rien n’interdit de manifester au-dessus de quatre mètres quatre-vingts… “La police, d’abord impuissante face aux actions aériennes, a fini par former ses propres troupes“.

Chaise roulante, perte d’emploi ou détention préventive, rien ne l’arrête !

Pourtant, les obstacles ne manquent pas. Les pieds très touchés par la polyarthrite, Cécile ne peut “guère marcher plus d’un quart d’heure“. Lors des crises, les douleurs sont décuplées. Elle se déplace en chaise roulante. Mais, native d’Épinal, elle continue de skier, constatant chaque année le recul des glaciers, plus que jamais décidée à poursuivre un combat qui ne se borne pas au nucléaire.

D’abord professeur au lycée français de Lünebourg, ses actions trouvent grand écho dans la presse. Les chefs d’établissement apprécient peu d’être contactés par la police politique en filature, qui demande ce que fait cette militante en salle des profs… Exit le professorat. Cécile, handicapée à 80% et désormais rédactrice au mensuel Graswurzelrevolution  [2], devient activiste à plein temps et reçoit un soutien financier régulier dans le cadre d’un programme de la Bewegungsstiftung  [3]. Elle écrit, enchaîne les conférences sur son expérience de militante.

Dans les services de renseignements intérieurs, les pages de rapport s’empilent. Très surveillée, l’écureuille fait l’objet d’une pression permanente. En Allemagne, la Lex Chaos Tage permet à la police de prononcer des interdictions de séjour plus ou moins étendues à l’encontre de potentiels “perturbateurs“. Suivant les régions et leurs tendances politiques, ces incarcérations peuvent durer de 4 à 14 jours, dans des conditions pas toujours idéales. D’où le recours en justice de Cécile.

“Il faut être conscient, prévient-elle, que ce qui m’est arrivé peut arriver à d’autres militants, maintenant que la porte est ouverte“. La Cour constitutionnelle a reconnu la recevabilité de sa plainte “mais seulement sur la question des conditions de détention. (…) Elle estime donc légal que l’on enferme une personne préventivement, sans jugement, pendant 4 jours, uniquement pour l’empêcher de commettre une infraction légère…“

Marie Gagnard-Volta

Quelques actions de l’écureuille

Occupation d’arbres

 Septembre 2007, contre l’extraction de lignite à Lakoma, à Cottbus.

 En 2008, contre l’agrandissement d’un aéroport à Kelsterbach.

 2016 et 2017, contre le centre de recherche nucléaire Cigéo à Bure.

Acrobaties aériennes contre les transports nucléaires

 En 2008, bloque pendant deux heures deux trains de déchets d’uranium à Burgsteinfurt.

 En 2010, contre le transport Castor à Gorleben et en 2011 près de Fulda.

 En 2012, blocage d’un navire-canal qui devait transporter un générateur de vapeur de la centrale nucléaire d’Obrigheim à l’arrêt, en passant par le canal de Dortmund-Ems, à Lubmin.

 En 2014, actions et barrages contre le traitement de l’uranium dans le port de Hambourg.

 Avril 2016, blocage d’un train de concentré de minerai d’uranium à Buchholzer Bahnhof.

 Le 28 juin 2017, contre les Neckar Castors.

Actions sur le terrain contre les OGM

 En 2008, destruction d’un champ de maïs OGM de la société Monsanto.

 En 2011, contre la conférence du lobby du génie génétique à Üplingen [59].

Antimilitarisme

 En 2008, elle s’enchaîne aux voies ferrées pour empêcher un transport militaire à Husum [62].

 En 2017, escalade d’un immeuble de Lunebourg contre la Bundeswehr.

Consumérisme

 En janvier 2009, escalade des façades à la Deutsche Bank contre le gaspillage.

 En mars 2015, escalade lors des manifestations Blockupy à Francfort-sur-le-Main.


Notes

[1Concentré uranifère utilisé comme matière première pour la fabrication de combustible nucléaire.

[2Révolution de Graswurz.

[3Fondation du Mouvement.

Le 1er septembre dernier, pendant que, sur le plancher des vaches, des militant.es brandissent des banderoles, deux écureuilles descendent en rappel d’un pont d’autoroute culminant à plus de cent mètres au-dessus de la ligne Colence — Trèves (Allemagne). En gare de Coblence, le train parti de Hambourg à destination de Narbonne doit patienter durant sept heures avant de repartir, le temps que police et pompiers délogent les trouble-fête. Il transporte treize conteneurs de yellow cake  [1] et, s’il continue sa route, l’écureuille et les sien.nes ont atteint leur but : rendre visibles ces transports secrets.

Après quelques manifestations et enchaînements aux rails qui lui permettent de mesurer l’ampleur de la répression policière, Cécile Lecomte fait la rencontre en 2004 de membres de l’association allemande Robin Wood, prônant l’action directe et non-violente avant tout, en particulier par l’escalade. Une révélation. Légalement, rien n’interdit de manifester au-dessus de quatre mètres quatre-vingts… “La police, d’abord impuissante face aux actions aériennes, a fini par former ses propres troupes“.

Chaise roulante, perte d’emploi ou détention préventive, rien ne l’arrête !

Pourtant, les obstacles ne manquent pas. Les pieds très touchés par la polyarthrite, Cécile ne peut “guère marcher plus d’un quart d’heure“. Lors des crises, les douleurs sont décuplées. Elle se déplace en chaise roulante. Mais, native d’Épinal, elle continue de skier, constatant chaque année le recul des glaciers, plus que jamais décidée à poursuivre un combat qui ne se borne pas au nucléaire.

D’abord professeur au lycée français de Lünebourg, ses actions trouvent grand écho dans la presse. Les chefs d’établissement apprécient peu d’être contactés par la police politique en filature, qui demande ce que fait cette militante en salle des profs… Exit le professorat. Cécile, handicapée à 80% et désormais rédactrice au mensuel Graswurzelrevolution  [2], devient activiste à plein temps et reçoit un soutien financier régulier dans le cadre d’un programme de la Bewegungsstiftung  [3]. Elle écrit, enchaîne les conférences sur son expérience de militante.

Dans les services de renseignements intérieurs, les pages de rapport s’empilent. Très surveillée, l’écureuille fait l’objet d’une pression permanente. En Allemagne, la Lex Chaos Tage permet à la police de prononcer des interdictions de séjour plus ou moins étendues à l’encontre de potentiels “perturbateurs“. Suivant les régions et leurs tendances politiques, ces incarcérations peuvent durer de 4 à 14 jours, dans des conditions pas toujours idéales. D’où le recours en justice de Cécile.

“Il faut être conscient, prévient-elle, que ce qui m’est arrivé peut arriver à d’autres militants, maintenant que la porte est ouverte“. La Cour constitutionnelle a reconnu la recevabilité de sa plainte “mais seulement sur la question des conditions de détention. (…) Elle estime donc légal que l’on enferme une personne préventivement, sans jugement, pendant 4 jours, uniquement pour l’empêcher de commettre une infraction légère…“

Marie Gagnard-Volta

Quelques actions de l’écureuille

Occupation d’arbres

 Septembre 2007, contre l’extraction de lignite à Lakoma, à Cottbus.

 En 2008, contre l’agrandissement d’un aéroport à Kelsterbach.

 2016 et 2017, contre le centre de recherche nucléaire Cigéo à Bure.

Acrobaties aériennes contre les transports nucléaires

 En 2008, bloque pendant deux heures deux trains de déchets d’uranium à Burgsteinfurt.

 En 2010, contre le transport Castor à Gorleben et en 2011 près de Fulda.

 En 2012, blocage d’un navire-canal qui devait transporter un générateur de vapeur de la centrale nucléaire d’Obrigheim à l’arrêt, en passant par le canal de Dortmund-Ems, à Lubmin.

 En 2014, actions et barrages contre le traitement de l’uranium dans le port de Hambourg.

 Avril 2016, blocage d’un train de concentré de minerai d’uranium à Buchholzer Bahnhof.

 Le 28 juin 2017, contre les Neckar Castors.

Actions sur le terrain contre les OGM

 En 2008, destruction d’un champ de maïs OGM de la société Monsanto.

 En 2011, contre la conférence du lobby du génie génétique à Üplingen [59].

Antimilitarisme

 En 2008, elle s’enchaîne aux voies ferrées pour empêcher un transport militaire à Husum [62].

 En 2017, escalade d’un immeuble de Lunebourg contre la Bundeswehr.

Consumérisme

 En janvier 2009, escalade des façades à la Deutsche Bank contre le gaspillage.

 En mars 2015, escalade lors des manifestations Blockupy à Francfort-sur-le-Main.



Soyez au coeur de l'information !

Tous les 3 mois, retrouvez 36 pages (en couleur) de brèves, interviews, articles, BD, alternatives concrètes, actions originales, luttes antinucléaires à l’étranger, décryptages, etc.

Je m'abonne à la revue du Réseau