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Sortir du nucléaire n°85



printemps 2020

Dossier : Et l’humain dans tout ça ?

À Bure l’État porte atteinte aux droits humains et c’est la LDH qui le dit !

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°85 - printemps 2020

 Bure - CIGEO


De cinq en juin 2018, on est passé à sept en septembre, à huit en août 2019, neuf en octobre puis dix en novembre. Dix malfaiteurs·ses mis·es en examen et placé·es sous contrôle judiciaire avec interdiction de territoire et d’entrer en contact, pour 15 000 pages d’un dossier qui s’épaissit de 2 000 pages tous les trois mois.



© Adobe Stock

Tout part de l’intrusion d’un peu moins d’une dizaine d’opposant·es dans les locaux de l’Hôtel-restaurant situés dans l’enceinte du laboratoire de l’Andra à Bure. Des pierres brisent des vitres, du mobilier est chahuté dans le réfectoire et un départ de feu sur une flaque d’essence est maîtrisé par le cuistot tandis que les intrus quittent les lieux. Le départ de feu devient un incendie dans la presse, la présence de clients dans l’hôtel, une mise en danger de la vie d’autrui pour le procureur : les critères sont réunis pour caractériser le crime en bande organisée. Et s’il y a crime organisé, il y a organisation, il n’en faut pas plus pour que toute la lutte et ses opposant·es deviennent suspects et ouvrent ainsi le champ à une instruction sans limites. [1]

Pour faire face à cette répression judiciaire sans précédent, de nombreuses initiatives verront le jour : des centaines de rassemblements de soutien, des bals des malfaiteurs, des présences devant les tribunaux, la mise en place de défenses juridiques collectives (voir notre article en page 33). Parmi ces initiatives, la Ligue des Droits de l’Homme sera saisie. Une accumulation d’interrogations l’a conduira alors à solliciter de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) l’envoi d’un observateur indépendant, Me Jacques Englebert, avocat au Barreau de Namur, à l’audience du 5 février 2019 “dédiée“ à Bure.

Dans son rapport publié en juin dernier, la LDH considère que “les autorités publiques se livrent à un harcèlement contre les opposants au site d’enfouissement à Bure, destiné à criminaliser leur position et leur manifestation et qui a pour effet de porter atteinte aux libertés individuelles“.

En décembre, alors qu’un nouveau membre du collectif a été mis en examen dans le cadre de l’instruction pour “association de malfaiteurs“, la LDH communiquera à nouveau pour soutenir le mouvement et dénoncer une atteinte aux droits humains. Nous reproduisons ici un extrait de leur communiqué du 4 décembre dernier.

“Les mesures de contrôle judiciaire ordonnées il y a plus d’un an, alliées au harcèlement des autorités publiques documenté par la Ligue des droits de l’Homme dans un rapport publié en juin dernier, représentent en elles-mêmes une atteinte aux libertés d’association, d’expression et de manifestation. Après une telle durée de mise en œuvre, ces mesures ne se justifient aujourd’hui même plus par la nécessité d’éviter la fréquentation des lieux de l’enquête par les personnes mises en cause, ou d’éviter les contacts entre elles, puisqu’elles ont été entendues par la justice.

Le choix d’assortir cette nouvelle mise en examen d’une interdiction de territoire et de communiquer avec les autres personnes mises en cause vise à justifier le maintien des mesures précédentes, tout en créant artificiellement de nouvelles péripéties.

La conduite de l’enquête trahit encore une fois la volonté de criminaliser et de paralyser des activités politiques en maintenant un mouvement sous des chefs d’accusation disproportionnés et inconsistants. L’intimidation et le déni de réalité ne sont pas des méthodes d’instruction dans un État de droit !“

Laura Hameaux


Notes

[1Introduction issue d’un texte publié initialement sur https://frama.link/malfaiteurs-bure

© Adobe Stock

Tout part de l’intrusion d’un peu moins d’une dizaine d’opposant·es dans les locaux de l’Hôtel-restaurant situés dans l’enceinte du laboratoire de l’Andra à Bure. Des pierres brisent des vitres, du mobilier est chahuté dans le réfectoire et un départ de feu sur une flaque d’essence est maîtrisé par le cuistot tandis que les intrus quittent les lieux. Le départ de feu devient un incendie dans la presse, la présence de clients dans l’hôtel, une mise en danger de la vie d’autrui pour le procureur : les critères sont réunis pour caractériser le crime en bande organisée. Et s’il y a crime organisé, il y a organisation, il n’en faut pas plus pour que toute la lutte et ses opposant·es deviennent suspects et ouvrent ainsi le champ à une instruction sans limites. [1]

Pour faire face à cette répression judiciaire sans précédent, de nombreuses initiatives verront le jour : des centaines de rassemblements de soutien, des bals des malfaiteurs, des présences devant les tribunaux, la mise en place de défenses juridiques collectives (voir notre article en page 33). Parmi ces initiatives, la Ligue des Droits de l’Homme sera saisie. Une accumulation d’interrogations l’a conduira alors à solliciter de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) l’envoi d’un observateur indépendant, Me Jacques Englebert, avocat au Barreau de Namur, à l’audience du 5 février 2019 “dédiée“ à Bure.

Dans son rapport publié en juin dernier, la LDH considère que “les autorités publiques se livrent à un harcèlement contre les opposants au site d’enfouissement à Bure, destiné à criminaliser leur position et leur manifestation et qui a pour effet de porter atteinte aux libertés individuelles“.

En décembre, alors qu’un nouveau membre du collectif a été mis en examen dans le cadre de l’instruction pour “association de malfaiteurs“, la LDH communiquera à nouveau pour soutenir le mouvement et dénoncer une atteinte aux droits humains. Nous reproduisons ici un extrait de leur communiqué du 4 décembre dernier.

“Les mesures de contrôle judiciaire ordonnées il y a plus d’un an, alliées au harcèlement des autorités publiques documenté par la Ligue des droits de l’Homme dans un rapport publié en juin dernier, représentent en elles-mêmes une atteinte aux libertés d’association, d’expression et de manifestation. Après une telle durée de mise en œuvre, ces mesures ne se justifient aujourd’hui même plus par la nécessité d’éviter la fréquentation des lieux de l’enquête par les personnes mises en cause, ou d’éviter les contacts entre elles, puisqu’elles ont été entendues par la justice.

Le choix d’assortir cette nouvelle mise en examen d’une interdiction de territoire et de communiquer avec les autres personnes mises en cause vise à justifier le maintien des mesures précédentes, tout en créant artificiellement de nouvelles péripéties.

La conduite de l’enquête trahit encore une fois la volonté de criminaliser et de paralyser des activités politiques en maintenant un mouvement sous des chefs d’accusation disproportionnés et inconsistants. L’intimidation et le déni de réalité ne sont pas des méthodes d’instruction dans un État de droit !“

Laura Hameaux



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