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Sortir du nucléaire n°75



Automne 2017

Vie du Réseau

1997-2017 Comment est né le Réseau "Sortir du nucléaire" ?

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°75 - Automne 2017

 Luttes et actions


Il y a tout juste 20 ans naissait le Réseau "Sortir du nucléaire". Depuis celui-ci a pris de l’envergure. Quelques souvenirs de cette naissance.



Avant 1997, de nombreuses tentatives de coordination antinucléaire ont eu lieu, la plupart échouant après une mobilisation décevante. Du côté de la lutte contre le surgénérateur de Superphénix (Isère), dans les années 1990, un débat stratégique entre militants rhône-alpins et suisses conduit à mettre en place la coordination appelée Les Européens contre Superphénix. Celle-ci ne se fixe qu’un seul but : arrêter Superphénix, mis en route en 1986 et le plus souvent en panne. Le fait d’avoir un but restreint fait que de très nombreux groupes adhèrent. Elle est animée par les groupes de Lyon, Grenoble et Genève. L’élargissement de la lutte (Bourgogne, Franche-Comté, Italie) et de nombreuses actions militantes vont inciter les Verts à mettre l’arrêt de Superphénix comme condition de leur entrée dans le gouvernement Jospin. En juin 1997, le gouvernement annonce l’arrêt du réacteur. C’est la première fois en France que l’on obtient l’arrêt d’un réacteur par la lutte militante.

© Yann Forget / Wikimedia Commons

Reproduire le modèle pour fédérer la lutte antinucléaire en France

En octobre 1997, une réunion se tient à Valence-d’Agen (tout près de la centrale de Golfech) en présence d’une vingtaine de groupes antinucléaires. Ce sera le point de départ du Réseau "Sortir du nucléaire" avec Philippe Brousse comme premier permanent dès février 1998. À l’ordre du jour : peut-on reproduire ce qui s’est fait contre Superphénix à l’ensemble du programme nucléaire ? Cela nécessite d’avoir un objectif simple dans lequel la majorité de la population (et donc des groupes) puisse se reconnaître. Le but adopté est "obtenir une décision de la part du gouvernement de sortie du nucléaire". Cette décision provoque une première coupure avec ceux qui veulent "une sortie immédiate du nucléaire" et/ou "lutter contre le nucléaire et son monde". Quelques petits groupes vont dès le départ prendre leur distance avec le tout nouveau Réseau, la plupart participant toutefois aux phases de mobilisation. L’avantage d’un objectif simple et étroit est que cela permet de fédérer largement, de la Fédération anarchiste au Mouvement des jeunes socialistes en passant par les groupes de protection de la nature, les magasins Biocoop, etc.

Un autre sujet de débat dans les premières années concerne le positionnement par rapport au nucléaire militaire. Il y a vingt ans, le lien entre les deux était souvent masqué, notamment parce que la mouvance communiste était contre le nucléaire militaire, mais pour les réacteurs. Avec le temps, la liaison civil-militaire est devenue plus évidente [1] .

20 ans plus tard, le Réseau "Sortir du nucléaire" constitue un puissant contre-pouvoir citoyen avec 916 associations et 61 346 personnes signataires de sa charte, une quinzaine de salarié-e-s et un budget de plus d’un million d’euros !

Au fil du temps, le Réseau "Sortir du nucléaire" est devenu une référence incontournable. Il permet d’ancrer résolument et visiblement la parole antinucléaire dans le paysage énergétique français.
DR

Par ici la sortie

L’équilibre entre un discours clairement antinucléaire et la nécessité d’élargir le mouvement pour arriver à une majorité politique anime toujours les motions à chaque Rencontre nationale ; de même pour l’équilibre à trouver entre sortie du nucléaire, protection du climat (et lutte contre l’énergie fossile), développement des énergies renouvelables et sobriété énergétique.

© Yann Forget / Wikimedia Commons

Ces débats enrichissants restent toutefois dans le cadre fixé il y a vingt ans : obtenir un plan de transition énergétique qui prévoie l’arrêt le plus rapide possible des réacteurs nucléaires et l’abandon des armes atomiques. La sortie du nucléaire constitue désormais une urgence absolue. Du fait de l’accident de Fukushima en 2011 et du manque de compétitivité économique du nucléaire, nous n’en sommes sans doute plus très loin.

Michel Bernard


Notes

[1Les deux pays européens qui poussent à poursuivre le nucléaire dit civil sont la Grande-Bretagne et la France, deux pays qui ont l’arme atomique. Ce n’est pas un hasard : sans réacteur nucléaire, l’armée n’aurait plus de charge pour ses bombes. Au niveau mondial, ce sont principalement la Russie et la Chine qui poursuivent le nucléaire, elles aussi possèdent la bombe atomique.

Avant 1997, de nombreuses tentatives de coordination antinucléaire ont eu lieu, la plupart échouant après une mobilisation décevante. Du côté de la lutte contre le surgénérateur de Superphénix (Isère), dans les années 1990, un débat stratégique entre militants rhône-alpins et suisses conduit à mettre en place la coordination appelée Les Européens contre Superphénix. Celle-ci ne se fixe qu’un seul but : arrêter Superphénix, mis en route en 1986 et le plus souvent en panne. Le fait d’avoir un but restreint fait que de très nombreux groupes adhèrent. Elle est animée par les groupes de Lyon, Grenoble et Genève. L’élargissement de la lutte (Bourgogne, Franche-Comté, Italie) et de nombreuses actions militantes vont inciter les Verts à mettre l’arrêt de Superphénix comme condition de leur entrée dans le gouvernement Jospin. En juin 1997, le gouvernement annonce l’arrêt du réacteur. C’est la première fois en France que l’on obtient l’arrêt d’un réacteur par la lutte militante.

© Yann Forget / Wikimedia Commons

Reproduire le modèle pour fédérer la lutte antinucléaire en France

En octobre 1997, une réunion se tient à Valence-d’Agen (tout près de la centrale de Golfech) en présence d’une vingtaine de groupes antinucléaires. Ce sera le point de départ du Réseau "Sortir du nucléaire" avec Philippe Brousse comme premier permanent dès février 1998. À l’ordre du jour : peut-on reproduire ce qui s’est fait contre Superphénix à l’ensemble du programme nucléaire ? Cela nécessite d’avoir un objectif simple dans lequel la majorité de la population (et donc des groupes) puisse se reconnaître. Le but adopté est "obtenir une décision de la part du gouvernement de sortie du nucléaire". Cette décision provoque une première coupure avec ceux qui veulent "une sortie immédiate du nucléaire" et/ou "lutter contre le nucléaire et son monde". Quelques petits groupes vont dès le départ prendre leur distance avec le tout nouveau Réseau, la plupart participant toutefois aux phases de mobilisation. L’avantage d’un objectif simple et étroit est que cela permet de fédérer largement, de la Fédération anarchiste au Mouvement des jeunes socialistes en passant par les groupes de protection de la nature, les magasins Biocoop, etc.

Un autre sujet de débat dans les premières années concerne le positionnement par rapport au nucléaire militaire. Il y a vingt ans, le lien entre les deux était souvent masqué, notamment parce que la mouvance communiste était contre le nucléaire militaire, mais pour les réacteurs. Avec le temps, la liaison civil-militaire est devenue plus évidente [1] .

20 ans plus tard, le Réseau "Sortir du nucléaire" constitue un puissant contre-pouvoir citoyen avec 916 associations et 61 346 personnes signataires de sa charte, une quinzaine de salarié-e-s et un budget de plus d’un million d’euros !

Au fil du temps, le Réseau "Sortir du nucléaire" est devenu une référence incontournable. Il permet d’ancrer résolument et visiblement la parole antinucléaire dans le paysage énergétique français.
DR

Par ici la sortie

L’équilibre entre un discours clairement antinucléaire et la nécessité d’élargir le mouvement pour arriver à une majorité politique anime toujours les motions à chaque Rencontre nationale ; de même pour l’équilibre à trouver entre sortie du nucléaire, protection du climat (et lutte contre l’énergie fossile), développement des énergies renouvelables et sobriété énergétique.

© Yann Forget / Wikimedia Commons

Ces débats enrichissants restent toutefois dans le cadre fixé il y a vingt ans : obtenir un plan de transition énergétique qui prévoie l’arrêt le plus rapide possible des réacteurs nucléaires et l’abandon des armes atomiques. La sortie du nucléaire constitue désormais une urgence absolue. Du fait de l’accident de Fukushima en 2011 et du manque de compétitivité économique du nucléaire, nous n’en sommes sans doute plus très loin.

Michel Bernard



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